Quelle responsabilité en cas de noyade dans votre piscine familiale ?
Comme détaillées dans un précédent article, de nombreuses règles de sécurité s'imposent pour les propriétaires de piscine. Il convient également d'examiner plus particulièrement les conséquences et la recherche de responsabilité en cas de noyade dans une piscine familiale.
Rappel préalable de la réglementation en vigueur pour les piscines privées à usage familial
C’est la Loi n°2003-9 du 3 janvier 2003 qui s’applique (articles L 128-1 et suivants du code de la construction et de l’habitation).
Les propriétaires de piscines ont l'obligation, depuis le 1er janvier 2004, de choisir un dispositif de sécurité parmi les quatre préconisés par la loi, en conformité avec les normes établies par l'Afnor (Association française de normalisation).
Il s'agit :
>des barrières de protection d'accès au bassin (norme NF P. 90-306);
>des systèmes d'alarme (norme NF P. 90-307);
>des couvertures de sécurité et dispositifs d'accrochage (norme NF P. 90-308);
>des abris de piscine (norme NF P. 90-307).
La mise en place d'un de ces dispositifs est obligatoire depuis le 1er janvier 2004 pour les piscines nouvellement construites; depuis le 1er mai 2004 pour les piscines existantes des habitations mises en location saisonnière; et pour toutes les autres piscines existantes depuis le 1er janvier 2006.
Si la piscine a été construite après 2004, le constructeur ou l'installateur doit vous avoir remis une attestation de la conformité aux exigences légales de votre installation.
Si la piscine a été construite avant 2004, vous devez faire attester de la conformité l'équipement de sécurité par un professionnel (fabriquant, installateur, vendeur ou contrôleur technique agréé par l'État).
Le propriétaire peut également attester, sous sa propre responsabilité, de la conformité de l'installation.
Quelles piscines sont concernées?
Il s’agit :
>des piscines privées de plein air, y compris les spas et jacuzzi, non closes, à usage individuel ou collectif et dont le bassin est semi-enterré ou enterré;
>des piscines familiales ou réservées à des résidents;
L'équipement doit donc être installé dans les piscines privées dont le bassin est totalement ou partiellement enterré.
Les piscines posées sur le sol, gonflables ou démontables ne sont donc pas concernées par la loi de 2003. Selon que la piscine hors sol (gonflage ou en kit par exemple) est installée provisoirement (moins de trois mois) ou non, une autorisation peut cependant être nécessaire en fonction des règles locales d'urbanisme (plan local d'urbanisme [PLU] ou carte communale) qui peuvent imposer des restrictions spécifiques. La consultation du service de l'urbanisme de votre mairie est conseillée
Ces piscines hors sol sont cependant soumises à l'obligation générale de sécurité, selon laquelle "les produits et les services doivent présenter, dans des conditions normales d'utilisation ou dans d'autres conditions raisonnablement prévisibles par le professionnel, la sécurité à laquelle on peut légitimement s'attendre et ne pas porter atteinte à la santé des personnes" (article L. 421-3 du code de la consommation).
Quelle responsabilité en cas d’accident?
Une piscine ne doit présenter aucun danger pour un enfant, qu'il séjourne chez vous ou qu'il ait pénétré dans votre propriété à votre insu. Ainsi, si vous n'aviez pas de dispositif anti-noyade, vous êtes responsable de l'accident.
En revanche si vous avez respecté la loi en termes de sécurité, vous pouvez invoquer la faute de la victime qui était sur votre terrain sans votre accord et durant votre absence.
En effet, en cas de noyade accidentelle, votre responsabilité pourra être retenue car vous restez le gardien de votre piscine (article 1242 du code civil). Cela veut dire qu’en tant que propriétaire, si votre piscine cause un préjudice à autrui, vous devez réparer ce dommage.
Cependant, le propriétaire d'une piscine qui a causé une noyade pourra être exonéré de sa responsabilité, s'il apparaît que ce dommage provient exclusivement du fait de la victime. En revanche, il ne vous sera pas possible de faire fonctionner votre assurance responsabilité civile si aucun dispositif de sécurité n'a été installé conformément à la loi.
Quelles sanctions en cas de non respect?
En cas de non-respect de l'obligation d'équiper votre piscine d'un dispositif de sécurité, vous vous exposez à une amende pouvant aller jusqu'à 45.000 euros, ainsi qu’à des sanctions pénales en cas d’accident. C'est ainsi qu'il a été jugé que la responsabilité du propriétaire a pu être retenue dans une affaire où un enfant avait pénétré sur le terrain du voisinage et s’était blessé.
Dans cette affaire, l'absence de clôture de protection, les autorisations de pénétrer qui lui avaient été précédemment données, et les liens d'amitié et de bon voisinage qu'il avait noués avec le propriétaire, lui permettaient de penser que l'interdiction d'accès ne le concernait pas (Cass. civ. 2e 21 novembre 1990, n° 89-19105). Si la victime a commis une faute, il pourra y avoir partage de responsabilité et la faute de la victime viendra minimiser la réparation qui était due.
Une récente affaire démontre la complexité des responsabilités dans ce type de drame. En avril 2015, une famille avec un enfant de trois ans a rendu visite à des amis dans un lotissement dit "à l’américaine" où les jardins sont séparés par des haies mais communiquent entre eux. L’enfant a disparu et on l'a retrouvé quelques minutes plus tard au fond de la piscine d’un des voisins. Ce jour-là, le propriétaire l’avait nettoyée et recouverte d’une bâche dite de confort, mais la barre de sécurité n’avait pas été enclenchée et il n’y avait aucun panneau signalant la présence d’une piscine dans ce lotissement ouvert ni clôture autour de l’équipement.
Sur la plainte des parents, le procureur de la République a classé l’affaire, estimant que toutes les obligations, dont celle d’équiper la piscine d’un dispositif de sécurité, avaient été respectées. Mais les parents endeuillés n’ont pas voulu pas en rester là et sur citation directe ont fait comparaître les propriétaires de la piscine devant le tribunal correctionnel de Béthune, estimant que le propriétaire aurait dû activer le dispositif de sécurité. Les juges béthunois ont rendu leur décision le 3 février 2017 et sont finalement allés dans le sens du parquet qui avait classé l’affaire et ont mis fin le 3 février 2017 aux poursuites contre les propriétaires de la piscine en les relaxant.
Il est donc clair que tant le parquet que les magistrats ont considéré que la faute de la victime et de ses parents qui ne l’avaient pas assez surveillé exonérait les propriétaires. Il est donc impératif de rappeler que toute baignade dans ces piscines doit se faire sous la surveillance constante d’adultes aptes à intervenir rapidement en cas de danger que ce soient les parents des enfants ou du propriétaire de la piscine. Et n’oubliez pas de condamner l’accès à la piscine après la baignade.
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