Vide, le premier centre de déradicalisation joue sa survie
Le sort du centre de déradicalisation de Pontourny (Indre-et-Loire), le premier et le seul en France, décrié par les riverains et actuellement vide, va se jouer dans les prochaines semaines, les élus locaux réclamant un moratoire pour "tout remettre sur la table".
Lors d'une réunion ce vendredi 10 du comité de suivi sur le fonctionnement du centre, les élus locaux ont réclamé un moratoire "d'au minimum un mois" pour décider de son avenir, après le départ cette semaine du dernier pensionnaire, condamné notamment pour violences.
Le centre de déradicalisation a été prévu pour 25 à 30 jeunes "volontaires en voie de radicalisation" mais en a reçu "un maximum de neuf" depuis son ouverture le 1er juillet 2016, a indiqué Jean-Luc Dupont, maire LR de Chinon et président de la communauté de communes.
"La question de la fermeture du centre reste posée, mais l'État souhaite continuer l'expérience, même s'il admet des difficultés sérieuses", a expliqué aux journalistes Laurent Baumel, député PS de la circonscription.
Pour lui, un moratoire d'un mois "va permettre de discuter sérieusement des garanties que l'État peut apporter quant au respect des critères qui avaient été fixés" sur le profil des jeunes peuvent être accueillis à Pontourny.
"Si l’État dit: nous ne sommes pas capable de trouver des jeunes volontaires, il n'est pas question de continuer cette expérience en faisant venir des individus dangereux. La fermeture de ce centre, tel qu'il est, sera à mon avis inéluctable", a déclaré le député.
Cependant, le ministre de l'Intérieur Bruno Le Roux a écarté la fermeture de Pontourny. "Je peux vous dire que ce centre va rester ouvert", a-t-il déclaré ce vendredi sur Europe 1. "Localement, il n'y a jamais eu aucun problème avec ce centre", a-t-il assuré en annonçant "une évaluation à la fin du premier semestre". "J'ai demandé au préfet de donner de nouveaux cas pour pouvoir le remplir", a ajouté M. Le Roux.
Mais "l'objectif n'est pas de remplir à tout prix Pontourny. Il faut des profils idoines pour intégrer le centre", a-t-on tempéré au ministère de l'Intérieur.
Pontourny est actuellement le seul centre de déradicalisation en activité en France. Il a reçu la visite en octobre 2016 de Manuel Valls et de Bernard Cazeneuve, à l'époque respectivement Premier ministre et ministre de l'Intérieur.
Son ouverture s'était heurtée à l'hostilité des riverains et les élus avaient exprimé de fortes réticences. Pour vaincre ces oppositions, le gouvernement s'était engagé à n'intégrer que des volontaires, qui ne seraient "pas sous main de justice pour faits de terrorisme, n'auraient pas tenté d'aller en Syrie ou n'auraient pas été condamnés pour des faits de violence".
La population riveraine est cependant toujours vent debout et estime avoir été flouée après deux "dysfonctionnements": en septembre 2016, un pensionnaire avait dû être exclu après la révélation de précédentes condamnations pour des faits violents, et en janvier dernier, l'interpellation en Alsace d'un pensionnaire de Pontourny lors d'une opération anti-djihadistes a constitué "le couac de trop", pour le député PS de la circonscription.
"L'État nous a constamment menti. Aux riverains, aux élus locaux, à la presse. Dès début septembre il y avait un individu de Strasbourg qui faisait partie de la filière de ceux qui ont massacré au Bataclan. Il y a eu un fiché S", dénonce M. Michel Carrier, président de l'"Association radicalement digne de Pontourny", composée de riverains.
Celle-ci appelle à manifester samedi à proximité du centre, pour réclamer sa "fermeture pure et simple".
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