Zika : contrôle renforcé des dons du sang aux Antilles
Le don du sang est placé depuis lundi 15 février sous contrôle renforcé en Guadeloupe et en Martinique, où chaque poche prélevée est testée au virus Zika avant toute transfusion, sans toutefois causer d'inquiétudes chez les donneurs.
"Je n'y ai même pas pensé. Je suis venue parce que cela faisait un moment que je n’avais pas donné", raconte à l'AFP Muriel Duport, 43 ans. "Je m'inquiète plus du fait d'avoir eu un rhume il y a quelque temps que du Zika", plaisante de son côté Thierry Michel, originaire de Haute-Savoie et installé en Guadeloupe depuis deux ans.
Le camion de l'Etablissement français du Sang (EFS) est stationné sur le boulevard maritime de la touristique ville de Sainte-Anne (sud Grande-Terre.) Autour, des vendeurs de fruits et légumes, d'artisanat local, de liqueurs et autres douceurs. "Un peu de sang pour sauver une vie", haranguent des bénévoles de l'association des donneurs de sang de la commune. A l'intérieur, l'ambiance est feutrée et sereine. Aucune inquiétude sur les visages.
"Personne ne nous pose trop de questions", confirme Dominique Stradel, infirmière. Avec 22 cas biologiquement confirmés en Guadeloupe et à Saint-Martin au 12 février et une circulation virale dite débutante, les deux territoires sont bien moins touchés que la Martinique et la Guyane, toutes deux en épidémie.
"Nous prenons le Zika au sérieux. Nous demandons aux donneurs si dans les 28 jours ils ont eu une relation sexuelle avec un partenaire malade. Toute personne qui nous déclare de la fièvre ne pourra pas donner son sang", explique le Dr Edgard Ozourma, médecin de prélèvements.
"Pour nous, la procédure ne change pas par rapport à celle qui avait été mise en place lors du chikungunya en 2014", ajoute Dominique Stradel. Désormais, un tube de sang supplémentaire est prélevé et envoyé pour analyse au laboratoire expert de l'EFS à Marseille, aux frais de l'établissement.
En léopard du legging aux boucles d'oreilles, Ginette, pimpante septuagénaire, est allongée sur un fauteuil dans le camion. Inquiète de tout ce qu'elle entend sur le Zika, elle dit pour autant ne pas y avoir pensé avant de venir, espérant faire un don pour la première fois : "Je pense que c'est une bonne chose que le sang soit testé".
"Les tubes sont envoyés deux fois par semaine. Nous avons les résultats sous 24 à 48 heures. Si le test est positif, nous n'utilisons pas la poche", explique le Dr Mireille Bordenet, responsable prélèvement à l'EFS Guadeloupe-Guyane. En janvier, 646 poches de sang ont été prélevées, soit environ 25 par jour.
C'est pourtant encore loin des cinquante poches de sang qui seraient nécessaires à chaque collecte quotidienne pour couvrir les besoins de la Guadeloupe, des Îles du Nord et de la Guyane, où le don du sang n'est plus organisé.
D'autant, que selon Nathalie Moulin, chargée de communication à l'EFS, les patients souffrant de la drépanocytose (maladie génétique de l'hémoglobine touchant principalement les sujets d'origine africaine) ont des besoins spécifiques, leur sang étant davantage compatible avec les donneurs afro-antillais.
Par ailleurs, explique le Dr Bordenet, "nous avons plus de contre-indications que dans l'hexagone. Pour 100 poches, il nous faut 130 donneurs contre 110 en hexagone. Avec 2%, le taux de participation de la population en âge de donner est deux fois moins important".
"Nous ne nous faisons pas de mauvais sang pour le don du sang", veut rassurer malgré tout Nathalie Moulin. "Nous savons que nous pouvons compter sur la solidarité nationale". En 2015, 7.900 poches ont été récoltées contre 6.600 en 2014 quand l'épidémie du chikungunya sévissait, entraînant une chute des dons de 30% par rapport à 2013.
Dans 80% des cas, les patients touchés par le Zika, maladie transmise par un moustique, ne développent aucun symptôme. Mais des cas de microcéphalie chez les fœtus de femmes enceintes et de maladies neurologiques préoccupent la communauté internationale.
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