Le FMI inquiet d'un "déraillement" de l'économie mondiale
L'économie mondiale pourrait bientôt "dérailler": en pleine tempête boursière, le FMI a abaissé mardi ses prévisions de croissance et lancé une mise en garde face au ralentissement chinois et à la méforme persistante des autres pays émergents.
"La croissance mondiale pourrait dérailler si les transitions importantes de l'économie mondiale ne sont pas bien gérées", prévient le Fonds monétaire international dans ses nouvelles projections trimestrielles.
Signe du pessimisme ambiant, le Fonds a abaissé de 0,2 point sa prévision de croissance pour 2016 (3,4%) comme pour 2017 (3,6%) en pointant la situation "périlleuse" de nombreux pays émergents, guettés par le "ralentissement généralisé".
L'économiste en chef du FMI, Maurice Obstfeld, a prévenu en outre que les "risques" pesant sur ces prévisions s'étaient "intensifiées" ces tout derniers mois et averti que le monde pourrait emprunter "un chemin cahoteux cette année", particulièrement dans les pays émergents.
L'enjeu n'est pas mince: les pays émergents, guettés par le "ralentissement généralisé", et les nations en voie de développement pèsent au total pour "plus de 70%" de la croissance planétaire, note le Fonds.
Le premier d'entre eux, la Chine, a engagé une difficile transition vers une économie davantage tournée vers la consommation mais a été récemment pris de soubresauts qui ont fait dévisser l'ensemble des marchés mondiaux. Une réaction jugée toutefois "extrême" par Maurice Obstfeld lors d'une conférence de presse à Londres.
Le FMI fait en effet encore le pari de laisser inchangée sa prévision pour la Chine cette année, à 6,3%, bien qu'il mette en garde contre l'impact d'un "ralentissement plus marqué que prévu" de la deuxième puissance économique mondiale, dont la croissance s'est limitée en 2015 à 6,9%, au plus bas depuis 25 ans.
Le coup de mou de l'ogre chinois a déjà de lourdes conséquences pour les autres pays émergents: l'"atonie de la demande", comme l'appelle le FMI, fait aujourd'hui chuter le cours de nombreuses matières premières, privant les pays qui les exportent de précieux relais de croissance et ressources cruciales.
Les prix du pétrole sont ainsi tombés sous la barre des 30 dollars le baril, du jamais vu depuis 12 ans. Cette évolution abaisse les coûts de production de nombreux secteurs et entraîne des conséquences positives pour les consommateurs, mais ces effets favorables s'"atténuent", prévient le Fonds, à mesure qu'augmentent les pertes des pays producteurs, "soumis à rude épreuve", et que fondent les investissements dans l'extraction de pétrole et de gaz.
Certains pays émergents n'avaient pas besoin de ça. Déjà frappée par des sanctions liées à la crise ukrainienne, la Russie devrait rester en récession cette année (-1,0%) tout comme le Brésil (-3,5%) qui pâtit, selon le FMI, d'"incertitude politique" et des "répercussions persistantes" du scandale de corruption de la compagnie pétrolière Petrobras.
Le géant d'Amérique latine devrait entraîner encore dans sa chute l'ensemble du sous-continent, attendu en récession de 0,3% cette année.
L'Afrique sub-saharienne est mieux lotie avec une croissance attendue de 4,0% en 2016.
Dernier péril pour les pays émergents, la normalisation progressive de la politique monétaire américaine, amorcée en décembre, a déjà contribué à un "durcissement" de leur financement, à un assèchement des flux de capitaux et à de "nouvelles dépréciations monétaires", souligne le FMI.
Du côté des pays industrialisés, les États-Unis continuent de mener le bal même si le FMI abaisse légèrement sa prévision cette année (-0,2 point, à 2,6%) en arguant de la "vigueur du dollar", qui pèse sur l'activité manufacturière, et de la chute de l'activité du secteur pétrolier.
Ancien épicentre de la crise, la zone euro se relève peu à peu et voit sa prévision rehaussée de 0,1 point à 1,7%, malgré un petit "fléchissement" des exportations.
L'Espagne (2,7%) et l'Allemagne (1,7%) devraient porter l'économie de la région cette année, selon le FMI, tandis que la croissance française devrait se limiter à 1,3%, un peu moins que précédemment prévu.
L'afflux de migrants en Europe constitue toutefois un "grave problème" pour un marché du travail déjà au ralenti et requiert des mesures d'intégration pour "débloquer" les bienfaits économiques à plus long terme, exhorte le Fonds.
"La vague de réfugiés constitue un grave problème pour la capacité d'absorption des marchés du travail de l’Union européenne et met à l'épreuve les systèmes politiques", note l'institution.
Plus généralement, alors que les attaques terroristes ne faiblissent pas et que l'instabilité reste forte au Moyen-Orient, le Fonds s'inquiète d'une possible "escalade des tensions géopolitiques" qui minerait davantage la confiance et perturberait le commerce mondial.
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