Covid : les soignants de "réa" s'inquiètent d'un afflux de patients plus jeunes
Des patients plus jeunes, sans comorbidités, qui développent des formes graves du Covid-19 et occupent des lits de réanimation: la troisième vague de l'épidémie inquiète gouvernement et médecins.
"Des jeunes trentenaires, de 40 et quelques années, et qui n'ont pas forcément de comorbidités mais qui développent des formes graves ou intermédiaires" de la maladie affluent à l'hôpital, témoigne auprès de l'AFP Patrick Pelloux. "On n'est pas du tout dans le même cadre que l'an dernier", poursuit le président de l'Association des médecins urgentistes de France (Amuf).
Un constat qu'a partagé Jean Castex, jeudi après-midi, en relevant lors d'un déplacement en Seine-et-Marne que "plus de 1.400 patients sont hospitalisés en réanimation en Île-de-France: parmi eux - je l'ai encore constaté à Melun - des profils plus jeunes et sans comorbidités". "Le virus n'épargne personne: j'appelle solennellement chacune et chacun à respecter les restrictions sanitaires", a-t-il insisté.
"La gorge nouée", le directeur de l'ARS Île-de-France, Aurélien Rousseau, a abondé dans un tweet: "Des équipes extraordinaires de force prennent en charge des patients de plus en plus jeunes, très jeunes, touchés par des formes particulièrement sévères".
Ces nouveaux malades sont "de toutes les origines (africaines, asiatiques, caucasiennes)", de "tous les milieux sociaux", souligne le Dr Pelloux, qui se dit qu'"il s'est passé quelque chose dans l'épidémie. Quelque chose a changé, mais on ne sait pas quoi".
Relativement épargnés jusqu'à présent, les jeunes n'ont pas les bons réflexes et sont pris en charge un peu trop tard, selon lui: "Ils regardent sur internet pour trouver des réponses, tout en négligeant leurs symptômes, et retardent leurs appels aux services d'urgence et à leur médecin traitant".
- Pour une "vaccination de masse" -
Résultat: "Quand on arrive, c'est plus grave que si on avait donné un traitement plus précocement, avec de l'oxygène voire des corticoïdes", s'agace Patrick Pelloux.
Un constat que partage Lidye*, 33 ans, infirmière à l'hôpital privé Foch de Suresnes (Hauts-de-Seine): "Les moins de 50 ans se disent qu'ils sont coriaces, invincibles, et tardent à appeler pour être pris en charge. Or cette maladie touche tout le monde, qu'on soit sportif ou non, qu'on mange sainement ou non".
"Une fois que les poumons sont touchés, c'est plus compliqué", souffle l'infirmière, mais cette fois, avec l'expérience acquise en un an, "on n'est pas sur un protocole où on sédate la personne tout de suite et on l'intube. Là, on les garde éveillés et on leur donne de l'oxygène".
Pour Mathias Wargon, "on a l'impression" que les patients admis en réanimation "sont plus jeunes. Mais que disent les statistiques?", interroge cet urgentiste de Seine-Saint-Denis, en faisant valoir que si "on a un peu moins de vieux", c'est que "les vieux sont vaccinés".
Selon les dernières données de Santé Publique France, la troisième vague, attisée par le variant anglais, n'épargne aucune tranche d'âge, y compris chez les actifs. Ainsi, on décomptait vendredi 120 personnes âgées de 30 à 39 ans en réanimation sur le territoire national (103 le 27 février), 339 chez les 40-49 ans (contre 228), 801 chez les 50-59 ans (contre 542).
"Depuis septembre, lorsqu'on regarde l'incidence par classe d'âge, on observe qu'elle augmente le plus chez les 20-29 ans, et cette augmentation se diffuse sur les autres classes d'âge", relève le Dr Wargon.
Selon Stéphane Gaudry, professeur de médecine intensive et réanimation à l'hôpital Avicenne, à Bobigny, la moyenne d'âge des patients accueillis a diminué, passant d'"environ 65 ans il y a six semaines à plutôt 56-57 ans maintenant".
"Les appels au Samu de Paris ont augmenté de 30% en à peine cinq jours", détaille Patrick Pelloux, qui plaide pour "une vaccination de masse. Il faut abandonner le concept de catégorie et vacciner toute la population !"
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