Débat sur l'obligation, crainte d'un plafond de verre : les prochains défis de la vaccination
Faut-il rendre le vaccin contre le Covid-19 obligatoire? Le débat agite les spécialistes mais découle d'une crainte plus large: celle que la vaccination finisse par plafonner cet été à un niveau insuffisant.
"+Obligation+ n'est pas un gros mot quand il s'agit de vacciner contre la Covid-19", a estimé mardi l'Académie de médecine, qui juge nécessaire de mettre cette mesure en place progressivement.
Le raisonnement est avant tout mathématique: "Même si les livraisons de vaccins permettent de maintenir un rythme de 600.000 doses injectées par jour, le dynamisme de la campagne va se heurter à l'obstacle des hésitants et des opposés à la vaccination, l'importance de ces deux catégories récalcitrantes étant actuellement estimée à 15% pour chacune d'elles".
"Il sera très difficile d'obtenir avant la fin de l'été un taux de couverture vaccinale qui assurerait une immunité collective suffisante pour contrôler l'épidémie, soit 90% de la population adulte ou 80% de la population totale (enfants inclus)", redoute l'Académie.
Sa proposition ne fait pourtant pas l'unanimité.
"Rendre un vaccin obligatoire pourrait être paradoxalement un frein à l'adhésion vaccinale", a jugé Benoît Elleboode, le patron de l'Agence régionale de Santé (ARS) Nouvelle-Aquitaine, mercredi sur France Bleu Gironde.
"Vous savez comment sont les Français: il suffit de leur dire que quelque chose est obligatoire pour trouver qu'il y a quelque chose de louche derrière", a-t-il fait valoir.
Et côté gouvernement, on indique à l'AFP qu'il n'y a "pas d'évolution de la position" sur l'obligation.
- "Aller vers" -
Au-delà de cette seule question, se pose celle d'un éventuel plafond de verre pour la vaccination. Elle sera officiellement ouverte à tous le 31 mai, après la levée graduelle des conditions d'âge ou d'état de santé en vigueur au début de la campagne fin décembre.
Jusqu'à présent, le gouvernement a atteint ses objectifs: celui des 20 millions d'injections mi-mai avant sans doute celui des 30 millions mi-juin. Mais après?
Dans les catégories qui ont déjà droit à la vaccination, notamment les gens plus âgés, "on commence à arriver de plus en plus sur la population des sceptiques", reconnaît-on au ministère de la Santé.
Pour autant, "on ne se résout pas à ce que 20% des plus de 75 ans ne soient pas encore vaccinés", renchérit-on dans l'entourage du Premier ministre.
Le mot d'ordre est donc clair: il faut aller chercher ceux qui ont droit à la vaccination, pour limiter au maximum le nombre de non-vaccinés. Une stratégie que l'exécutif résume par la formule "Aller vers".
"On continue cette politique d'+Aller vers+ systématique, et on descend par tranche d'âge", explique-t-on au ministère de la Santé.
"En ce moment, on en est aux plus de 65 ans: on appelle chaque personne pour laquelle on a un contact via l'Assurance maladie, pour faciliter leur accès à la vaccination par tous les moyens possibles et imaginables", ajoute-t-on de même source.
"On a appelé les préfets, ARS, élus, centres de vaccination à mettre en place une stratégie de +dernier kilomètre+" pour amener la vaccination aux gens, assure-t-on également dans l'entourage de Jean Castex.
- Restos du coeur -
Par exemple, dans la Somme, les autorités ont mis en place "un programme avec les Restos du coeur pour accompagner les bénéficiaires de la distribution alimentaire, et en particulier des plus âgés, à la prise de rendez-vous" pour la vaccination, selon le ministère.
Autre préoccupation, celle des vacances d'été, qui ne doivent pas devenir un frein pour la vaccination.
Il faut "éviter à tout prix que les Français ne reculent leur première injection parce qu'ils anticipent des difficultés pour faire leur deuxième", souligne le ministère de la Santé, qui prône donc la "souplesse".
D'une part, il pourrait y avoir "un petit assouplissement sur la question de l'espacement entre les deux doses", pour éviter que la deuxième "tombe exactement au milieu des vacances".
D'autre part, le ministère veut qu'il y ait "des doses supplémentaires dans un certain nombre de lieux touristiques" pour que les vacanciers puissent y recevoir leur deuxième injection, après avoir eu la première là où ils vivent.
Enfin, le dernier levier pourrait être la vaccination prochaine des ados.
Selon le ministère de la Santé, l'Agence européenne des médicaments "devrait se prononcer (en) fin de semaine" sur une éventuelle autorisation du vaccin Pfizer/BioNTech chez les 12-16 ans.
Dans la foulée, la Haute autorité de santé (HAS) dira si ce vaccin peut être administré en France aux ados de 16 à 18 ans, voire de 12 à 16 ans.
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