Les commerçants "non essentiels" tempêtent contre la "concurrence déloyale"
Librairies fermées contre Fnac ayant finalement décidé de fermer ses rayons culture, magasins de vêtements contre grandes surfaces, magasins de jouets contre plateformes en ligne... Les commerces "non essentiels" protestent contre leur fermeture pour cause de reconfinement, et dénoncent une "concurrence déloyale" de ceux qui restent ouverts.
. Quels sont les commerces essentiels?
Le décret sur les activités commerciales autorisées a été publié vendredi. Outre les commerces alimentaires, sont autorisés les opticiens et pharmacies, les magasins multi-commerces, les vendeurs de matériaux de construction et quincaillerie, d'alimentation animale, de bureautique, de tabac et vapotage, la réparation de véhicules, les blanchisseries ou encore les activités financières et d'assurance.
S'y ajoutent les centres commerciaux, qui "ne peuvent accueillir un nombre de personnes supérieur à celui permettant de réserver à chacune une surface de 4 m2", le préfet pouvant aussi limiter le nombre maximum de personnes.
Enfin, le texte autorise l'ensemble des magasins à "accueillir du public" "pour leurs activités de livraison et de retrait de commandes", le fameux click&collect (commande en ligne, retrait en magasin).
. Et les autres?
Forcément, les absents de la liste s'en émeuvent. C'est le cas des magasins de jouets. "Le 25 décembre, le Père Noël passe au pied des sapins, c'est un besoin essentiel à satisfaire pour toutes les familles", plaide Franck Mathais, porte-parole de JouéClub. Le click&collect? Malgré une forte accélération cette année, les ventes en ligne représentent une part toujours très minoritaire du chiffre d'affaires de ces magasins spécialisés.
Parmi les autres commerces contraints de garder porte close, outre les bars et restaurants ne proposant pas de vente à emporter, les parfumeries, les salons de coiffure et instituts de beauté. Leur Fédération professionnelle, la FEBEA, plaide que "le bien-être est un élément essentiel de la santé", dixit son président Patrick O'Quin. Même argument du côté des fleuristes, "le végétal est essentiel à la vie".
Autres victimes: les libraires, pour lesquelles la mobilisation d'acteurs culturels et politiques est forte, ou le prêt-à-porter.
. Pourquoi une "concurrence déloyale"?
Ces commerces spécialisés s'émeuvent. "Le gouvernement, en procédant de la sorte, a redistribué les positions concurrentielles", explique Franck Mathais. Dans le cas des jouets, supermarchés ou Fnac par exemple peuvent rester ouverts et en vendre. "Ils ont déjà mis en place des campagnes de promotion fortes pour attirer un maximum de nouveaux consommateurs!".
"Face au constat de l'impossibilité d'une ouverture de l'ensemble des acteurs de la vente de livres", Fnac-Darty a finalement décidé vendredi de fermer "l'ensemble des rayons culture" des magasins Fnac pour les 15 prochains jours, à compter de samedi matin.
Cela ne résout pas tous les problèmes. "L'Etat est en train de créer un cataclysme. S'il maintient ses positions, il va tuer tous les centres-villes", proteste auprès de l'AFP Michel Vieira, patron du discounter d'électroménager MDA. "On a pu résister à la première vague mais on ne peut plus accepter la rupture d'égalité avec les grandes surfaces et les sites généralistes qui vendent nos produits".
"Je n'incrimine pas la grande distribution", a pointé vendredi matin sur BFM Business le co-gérant d'Etam Laurent Milchior, mais les acheteurs "vont pouvoir faire leurs cadeaux dans d'autres magasins et je trouve que ça c'est une concurrence déloyale".
. Quelles perspectives?
Le dirigeant a indiqué avoir entamé des discussions avec l'Autorité de la concurrence. Mais cette dernière explique à l'AFP que "le débat porte sur la réglementation mise en place par le gouvernement", et "relève par suite d'un contentieux devant le juge administratif (Conseil d'Etat) mais pas de la compétence de l'Autorité qui porte sur les pratiques des entreprises".
Justement, le groupe La Maison de la literie a annoncé vendredi "entamer un référé liberté devant le tribunal administratif de Paris", dénonçant une "atteinte injustifiée et disproportionnée à la liberté du commerce".
Les réactions des commerçants sont épidermiques parce que la période est cruciale pour leur activité. "Quinze jours, en cette période, c'est deux mois de chiffre d'affaires perdus!", s'exclame Franck Mathais. "Et le stock dans les magasins de jouets dans leur ensemble, c'est plus de 600 millions d'euros de valeur de vente".
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