Les réfugiés rohingyas, proies des trafiquants au Bangladesh

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Par AFP
Publié le 17 novembre 2017 - 12:43
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Des réfugiées rohingyas dans un camp de fortune d'Ukhia, au Bangladesh, le 28 octobre 2017
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© Tauseef MUSTAFA / AFP
Des réfugiées rohingyas dans un camp de fortune d'Ukhia, au Bangladesh, le 28 octobre 2017
© Tauseef MUSTAFA / AFP

Lorsqu'elle est arrivée au Bangladesh, seule et sans moyens, la jeune réfugiée rohingya Umme Kulthum a eu l'espoir d'un nouveau départ lorsqu'un homme lui a proposé de l'épouser et de l'emmener à Chittagong. Elle a fini vendue à un bordel.

Âgée de 21 ans, Umme - le nom a été modifié - a perdu son mari dans les violences dans l'État birman du Rakhine (ouest) puis s'est vue séparée de ses deux enfants et ses parents dans la confusion de l'exode.

Comme elle, environ 615.000 musulmans rohingyas de Birmanie sont passés au Bangladesh voisin depuis fin août pour fuir des opérations militaires considérées par l'ONU comme une épuration ethnique.

Cette population vulnérable, parquée dans de gigantesques camps miséreux, est une proie facile pour les trafiquants en tous genres.

Quelques heures après son arrivée à Chittagong, grande ville côtière du sud du Bangladesh, Umme Kulthum est emmenée dans une maison de passe par l'individu qu'elle a rencontré.

"Il m'a conduite dans un bâtiment où j'ai été présentée comme son épouse. J'ai vu beaucoup de jeunes filles comme moi. J'ai pris peur mais je n'avais pas la moindre idée de ce qui m'attendait", raconte-t-elle à l'AFP.

Très vite, elle comprend que son "mari" l'a abandonnée et est reparti avec la somme de 8.000 takas (81 euros) en poche.

"J'ai été vendue pour devenir une prostituée", dit-elle en fondant en larmes. Droguée aux pilules de méthamphétamine, elle a jusqu'à sept clients par jour.

Selon l'Organisation internationale pour les migrations (OIM), nombre de jeunes rohingyas sont appâtées par des promesses d'emploi ou de mariage qui leur permettraient de fuir la misère noire des camps de réfugiés. Mais elles se retrouvent forcées de vendre leur corps.

"Dans une affaire, plusieurs adolescentes, à qui on avait promis des postes de domestiques à Cox's Bazar et Chittagong, se sont retrouvées prostituées de force", s'est alarmée l'institution onusienne dans un communiqué cette semaine.

- Faux passeports -

Dans ces cités de tentes, les réseaux de trafics humains se développent et prolifèrent sur le désespoir.

"Les trafiquants ne restent pas les bras ballants. Ils ciblent les femmes et les enfants, particulièrement ceux qui arrivent seuls", décrit à l'AFP le commandant Ruhul Amin, en charge de l'unité d'élite Rapid Action Battalion (RAB) pour le district de Cox's Bazar.

Le RAB a renforcé sa présence dans la zone. L'un de ses barrages dans la ville de Teknaf a ainsi permis le mois dernier de secourir 30 femmes et enfants captifs.

Selon une source sécuritaire, des femmes rohingyas se sont vu remettre un faux passeport et ont été envoyées à l'étranger par des réseaux criminels, en particulier vers la Malaisie et le Moyen-Orient.

L'OIM a confirmé avoir eu vent d'exfiltrations de Rohingyas du Bangladesh. Les autorités locales confinent les réfugiés dans les camps, qu'ils ont théoriquement interdiction de quitter. Des postes de contrôle sont installés sur les routes de la région.

Travailleur social, Mohammad Hossain Shikder organise des ateliers pour sensibiliser les Rohingyas aux tactiques utilisées par les bandes organisées.

"Ils vous aborderont avec une offre lucrative et crédible, comme un poste dans une usine textile ou un mariage à une personne riche", explique-t-il à un groupe d'une vingtaine de jeunes gens dans le grand camp de Kutupalong.

Pour séduire les réticents, les trafiquants n'hésitent pas à sortir le portefeuille: "parfois les parents sont convaincus par un paiement de 40.000 takas (407 euros) ou plus" de laisser leur fille partir, rapporte-t-il.

Grâce à une opération policière, Umme Kulthum a réussi à s'échapper du bordel de Chittagong auquel elle avait été vendue. Mais à son retour à Kutupalong, elle s'est retrouvée sans nulle part où aller et sans moyen de subsistance.

"Un jour j'espère retrouver mes parents et mes enfants. J'épargne de l'argent pour eux", déclare-t-elle à l'AFP.

Umme Kulthum habite désormais dans une sinistre chambre d'hôtel de la station balnéaire touristique de Cox's Bazar. Elle s'y prostitue, à nouveau.

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