Lutte contre les marées vertes : "les derniers kilomètres les plus durs"

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Par AFP
Publié le 02 juin 2017 - 14:18
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Un tracteur retire les algues vertes dans une plage de Saint-Michel-en-Grève, dans l'ouest de la Fra
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Un tracteur retire les algues vertes dans une plage de Saint-Michel-en-Grève, dans l'ouest de la France, le 2 mai 2017
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Les plages bretonnes connaissent ce printemps leurs pires marées vertes depuis longtemps et pourtant le phénomène commence à se résorber, selon des scientifiques qui appellent à poursuivre les efforts.

Plus précoces cette année, les "laitues de mer" sont aussi plus nombreuses. C'est ce qu'a constaté Sylvain Ballu, chercheur au Centre d'étude et de valorisation des algues (Ceva).

Depuis quinze ans, il survole le littoral breton pour mesurer l'ampleur du phénomène : en mai, il a ainsi recensé quelque 600 hectares de plages ensevelies sous les ulves, soit deux fois plus qu'habituellement à la même période.

La faute à un "hiver particulièrement calme", sans grosse tempête pour disperser les stocks d'algues. Des eaux plus chaudes que la moyenne ont elles aussi favorisé le phénomène.

Cette recrudescence des ulves printanières n'implique pas pour autant que l'été lui aussi sera vert. En effet, explique Patrick Durand, directeur de recherches à l'Institut national de recherche agronomique (Inra), "l'hiver a été extrêmement sec, les débits des cours d'eau vont très vite se tarir, et ça pourrait s’épuiser relativement vite" fin juin, début juillet.

"C'est le scénario le plus crédible", acquiesce Sylvain Ballu, qui rappelle qu'en 2009, "on a eu des très grosses marées vertes jusqu'en juin, et puis ça a fait flop. C'est la météo qui va commander".

Mais les conditions météo ne font pas tout. Malgré le déni tenace de certains syndicats agricoles, il a été établi par les scientifiques que c'est bien la fertilisation (épandage d'engrais azotés et de déjections animales) qui est responsable à plus de 90% des flux de nitrates qui enrichissent les cours d’eau, puis engraissent les algues vertes.

- 'à la moitié du chemin' -

Fraîchement échouées, ces algues sont inoffensives. Mais au bout de 48 heures, elles commencent à pourrir et dégagent du sulfure d'hydrogène. Malodorant, ce gaz est surtout très toxique.

C’est la mort d’un cheval, intoxiqué en 2009 par des ulves en décomposition, qui a poussé les pouvoirs publics à lancer un Plan de lutte contre les algues vertes ou PLAV (2011-2015) dans les huit baies touchées par cette prolifération.

Résultat: depuis le début des années 2000, la teneur en nitrates des cours d’eau a baissé de 30%, atteignant en moyenne 30 à 35 mg/l.

"Les pratiques ont changé et la prise de conscience est réelle. On est à la moitié du chemin, il faut poursuivre les efforts. Les derniers mg/l, c'est le plus compliqué", estime Thierry Burlot, vice-président chargé de l'Environnement à la région Bretagne.

"Tant qu’on n'a pas atteint le seuil de 10 à 20 mg/l de nitrate fixé par les scientifiques, il ne faut pas imaginer qu'on n'aura plus d'algues", prévient pour sa part Gilles Huet, de l'association Eau et rivières de Bretagne (ERB).

Parmi les limites du plan, ERB pointe notamment l'échec sur "la question cruciale du foncier" : "la moitié des exploitations vont changer de mains au cours des 10 prochaines années et c'est un moment-clé pour changer de système de production. Malheureusement, c'est une question taboue pour les syndicats agricoles qui veulent en conserver la maîtrise" et font obstacle au changement.

Pour les associations et les scientifiques, le PLAV 2, qui sera lancé le 5 juillet, doit être plus ambitieux, plus tourné aussi vers le développement de modes de production moins polluants.

A la région, Thierry Burlot ne dit pas autre chose. "Paradoxalement, relève-t-il, cette crise environnementale est une vraie chance pour passer à un modèle agricole plus familial, plus vertueux. C'est la qualité du produit qui fera la différence demain, avec des plus-values sur la valeur environnementale".

"La tendance est bonne", mais "ce sera long d’aller au bout de la reconquête", prévient Sylvain Ballu. Car comme l'explique son homologue de l’Inra, Patrick Durand, "entre le moment où l'agriculteur change ses pratiques et ce qui se passe dans la rivière, il peut se passer 10 à 15 ans". Sans conteste, "les derniers kilomètres seront les plus durs".

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