A Paris, la zizanie du business des vélos-taxis

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Par AFP
Publié le 13 juillet 2017 - 11:20
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Un vélo-taxi sur le Pont Alexandre III à Paris, le 7 juillet 2017
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© JACQUES DEMARTHON / AFP/Archives
Un vélo-taxi sur le Pont Alexandre III à Paris, le 7 juillet 2017
© JACQUES DEMARTHON / AFP/Archives

Guerre de territoire entre Bulgares, Français et Roumains, jeu du chat et de la souris avec la police, réglementation imprécise, tensions avec les taxis... à Paris, le business des vélos-taxis ne tourne pas rond.

Place de la Concorde, Katya Dobrava a garé son vélo-taxi jaune et bleu, à une cinquantaine de mètres de la sortie du Jardin des Tuileries. Loin du regard des touristes, mais aussi de celui de la police : "Papiers, papiers" imite-t-elle.

De 10H00 à 20H00, "tous les jours" depuis trois ans, Katya Dobrava est sur son "tricycle". Elle gagne jusqu'à 100 euros par jour en conduisant les touristes, deux à la fois, installés sur la banquette arrière, d'un haut-lieu parisien à l'autre.

Pour pouvoir travailler, cette Bulgare de 49 ans a besoin d'un statut d'auto-entrepreneur et d'une assurance responsabilité civile. Elle assure être en règle, mais elle déguerpit à l'arrivée de la police.

Car si les près de 300 vélos-taxis qui exercent à Paris ont le droit de circuler, ils ne peuvent pas stationner devant les monuments touristiques.

"On a besoin de l’État pour réguler", justifie Jean-François Martins, adjoint à la maire de Paris en charge du tourisme, qui admet que si l'idée des vélos-taxis est "très séduisante", le développement d'un marché "informel" et la question de la sécurité, de la qualité des vélos et de l'encombrement de la chaussée posent problème.

Le flou de la situation exaspère les vélos-taxis, bien obligés de s'arrêter devant les monuments touristiques pour récupérer des clients, quitte à récolter une grosse amende. "135 euros", pour stationnement très gênant, se plaignent-ils tous. "C'est n'importe quoi", résume Katya Dobrava.

- Territoires bien définis -

Comme les autres conducteurs bulgares, une quarantaine selon leurs estimations, elle est "basée" à la Concorde, ou en haut des Champs-Élysées, car dans le centre touristique de Paris, les différents "clans" de vélo-taxis ne se mélangent pas. Il y a "les Bulgares", dont beaucoup comme Katya sont arrivés à Paris pour suivre les traces de Todor Pasev, l'homme qui, jurent-ils, a importé le "premier" vélo-taxi à Paris.

Il y a aussi "les Français", majoritairement des jeunes dont c'est le petit boulot, qui représentent une flotte d'une cinquantaine de vélos. Eux sont surtout devant la cathédrale Notre-Dame et au Louvre. Les rapports entre Bulgares et Français sont cordiaux mais ils ont un ennemi commun, disent-ils: "les Roumains", près de 150 et les derniers à être arrivés sur le marché parisien, il y a environ trois ans.

Basés au pied de la tour Eiffel, ces derniers sont critiqués par les autres conducteurs persuadés qu'ils ne travaillent qu'avec des vélos "qui ne tiennent pas la route" et qu'ils arnaquent les touristes. Farid, 28 ans, qui travaille pour une société française, dit ne gagner "pas plus de quarante euros" par jour depuis l'arrivée de ceux qui ont "sali" la réputation des vélos-taxis. "L'arnaque", ils la racontent tous: on annonce un prix de course - 25 euros pour aller de la tour Eiffel à Notre-Dame par exemple - qui sera finalement multiplié par le nombre de passagers à la fin du trajet.

Perché sur son vélo devant la tour Eiffel, Marius, un conducteur roumain de 19 ans, indique pourtant aux curieux les prix des trajets par personne. Il montre l'assurance de son vélo, et les amendes qu'il assure payer comme tout le monde. Face aux critiques de la concurrence, Andrea, 24 ans, hausse les épaules : "on travaille beaucoup, ils sont jaloux", dit-elle. Comme eux, ils sont une dizaine de vélos-taxis à haranguer les touristes sur le quai Branly, en brandissant une pancarte publicitaire indiquant les prix du trajet vers les monuments touristiques.

"Ça me fout la haine", soupire en secouant la tête David Bressac, qui connaît bien ces panneaux : ce sont ceux de son agence de location de vélos-taxis, Cyclopolitain, que ses loueurs revendent aux vélo-taxis indépendants, affirme-t-il.

Cyclopolitain s'est installé à Paris en 2008, mais entre la concurrence "pas déclarée" selon lui, et le flou sur le statut des vélos-taxis, David Bressac a du mal à rester optimiste. "On est au point mort", lâche-t-il. Il se bat auprès de la mairie et de la préfecture de police pour obtenir une vraie réglementation : des vélos avec un numéro de licence, une charte et des places pour stationner.

La mairie assure que la "discussion" est ouverte pour développer ce nouveau mode de transports "dans de bonnes conditions", mais aucun délai n'est encore fixé. A la préfecture de police, on "réfléchit" à un dispositif pour "valoriser les entreprises vertueuses", garantir la sécurité des utilisateurs et assurer une "coexistence pacifique" des différents moyens de déplacements.

Une référence aux chauffeurs de taxis, peut-être: en juin, l'un d'entre eux a été interpellé par la police après s'être énervé contre des vélos garés sur leurs places sur les Champs-Élysées. "C'est l'anarchie totale", s'énerve un chauffeur, Rabah Baouche, "ils se garent n'importe comment, ils roulent n'importe où". "On en arrive à l'accrochage... Il va falloir réglementer un peu, c'est n'importe quoi", complète un de ses collègues.

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