Muriel Pénicaud, VRP de la France auprès des investisseurs étrangers
Enfant, elle voulait être chef d'orchestre. Si elle n'en a finalement pas fait son métier, Muriel Pénicaud, patronne de l'agence publique Business France, met à sa façon en musique la politique de promotion de la France et des entreprises tricolores auprès des investisseurs étrangers.
L'Asie en décembre, Davos en janvier, New York en février, Téhéran et Moscou bientôt... adoubée du titre d'"ambassadrice déléguée aux investissements internationaux", Muriel Pénicaud vante inlassablement les atouts de l'Hexagone à l'étranger depuis presque trois ans.
Pas toujours une sinécure, tant le "French-bashing" s'est développé sous le quinquennat de François Hollande. "Quand j'ai commencé, j'étais choquée parce certains investisseurs disaient: Ah non, la France je ne regarde même pas", raconte la directrice générale de Business France, teint clair et cheveux bouclés.
Mais "ça s'est beaucoup amélioré", assure-t-elle. Selon un sondage de Kantar Public réalisé en septembre, 74% des investisseurs étrangers jugent la France attractive contre 65% en 2014.
Pour changer le regard sur la France, cette femme de 61 ans à l'énergie communicative et au naturel avenant, mère de deux enfants, prévoit systématiquement lors de ses missions à l'étranger une "séquence d'influence" : des rencontres avec des dirigeants, des cercles de réflexion et des médias.
"Il faut faire ce travail de conviction, et c'est millimètre par millimètre", insiste-t-elle.
Son parcours, et en particulier son passage de plus de vingt ans dans le privé, pèsent aussi sans doute dans sa capacité à convaincre les patrons.
"Je parle le même langage qu'eux. Je parle stratégie business avant de parler France", raconte celle qui fut directrice générale des ressources humaines de Danone - où elle développa notamment un système de couverture sociale pour les 100.000 salariés du groupe à travers le monde - après six ans au comité exécutif de Dassault Systèmes.
- Profil atypique -
Une expérience qui a aussi sans doute inspiré le choix du gouvernement de faire appel à elle en mai 2014.
La mission qui lui est alors confiée est d'orchestrer la fusion entre Ubifrance, en charge du soutien à l'export, et l'Agence française pour les investissements internationaux (AFII), pour rationaliser les accompagnements à l'export et à renforcer l'attractivité du territoire.
"Le plus important c'est d'avoir un esprit commun, de bâtir ensemble la maison", souligne Muriel Pénicaud, qui comptait déjà à son actif une dizaine de fusions.
Mission réussie: "maintenant il y a une fierté d'être Business France" dans l'esprit des 1.500 collaborateurs de l'agence, se félicite-t-elle. "Nous sommes là pour faire réussir les entreprises, mais le but c'est de faire réussir le pays."
Ce sens de l'intérêt général, Muriel Pénicaud l'a acquis lors de ses années dans les collectivités territoriales, où elle a débuté sa carrière avant de bifurquer dans le privé.
A 21 ans à peine, diplômée d'histoire et de sciences de l'éducation à l'université de Nanterre - elle refusait de faire une grande école - et après avoir passé un an au Canada pour étudier les pédagogies pour les enfants des milieux défavorisés, la jeune femme originaire de région parisienne devient responsable pédagogique dans ce qui deviendra plus tard le Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT).
Puis elle évolue dans diverses structures territoriales en Lorraine et en Normandie. Repérée par le ministère du Travail, elle finit par devenir conseillère pour la formation de Martine Aubry, ministre entre 1991 et 1993.
Aujourd'hui, les patrons saluent sa polyvalence. "Son profil est exemplaire, c'est quelqu'un qui connaît très bien le privé, la gouvernance des grands groupes, elle a aussi une expérience des pouvoirs publics", dit à l'AFP un dirigeant de PME.
Mais elle est "confrontée à une politique de saupoudrage et se retrouve au milieu d'un jeu où tout le monde s'occupe de l'international", regrette-t-il, déplorant par ailleurs la baisse de la subvention accordée à l'agence, qui s'établit à environ 100 millions d'euros par an.
Un coup de rabot contre lequel Muriel Pénicaud s'insurge désormais ouvertement, dénonçant une "contradiction" avec l'objectif affiché par l'Etat de réduire le déficit commercial abyssal de la France et d'attirer les investisseurs, surtout à l'heure du Brexit.
"La baisse devient trop importante, ce n'est pas raisonnable", fulmine-t-elle. "On demande de la vision, de l'investissement sur l'emploi et l'économie".
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