Zemmour empêché ? Le retour au régime des partis
CHRONIQUE — Dans une vidéo de quelques minutes, diffusée jeudi 6 janvier sur C8, Éric Zemmour vient de lancer un appel au président de l'Association des maires de France, David Lisnard, afin qu'il favorise la collecte des 500 signatures nécessaires à la présentation d'une candidature à l'élection présidentielle.
Je voudrais rappeler qu'à l'aube de la Vᵉ République, et pour les trois premiers scrutins présidentiels de 1965, 1969 et 1974, ce ne sont pas 500 signatures qui étaient requises, mais seulement 100. Inspirateur de nos institutions, le général de Gaulle avait indiqué à l'un de ses proches compagnons, Gaston Palewski, président du Conseil constitutionnel de 1965 à 1974 : « Je veux qu'un Tixier-Vignancour puisse se présenter ». Candidat en décembre 1965, l'avocat Jean-Louis Tixier-Vignancour avait recueilli 5,2 % des suffrages.
Chacun sait que, depuis une loi organique du 18 juin 1976, ce sont donc 500 signatures qui sont exigées, et que François Hollande a été à l'origine de la publication de la liste des maires ayant parrainé un candidat à l'élection présidentielle, ce qui entraîne une réticence évidente d'élus locaux qui n'entendent pas être trop marqués politiquement, même s'il s'agit pourtant de favoriser l'exercice normal de la démocratie.
Ce que l'on sait peut-être moins en revanche, c'est qu'une autre tentative de limitation du nombre des candidatures à l'élection présidentielle était intervenue à la fin de l'année 1973, avec l'adoption par le Sénat, avec l'accord du gouvernement Messmer, d'une proposition de loi tendant à instaurer une caution de 25 parlementaires pour postuler la magistrature suprême.
Rencontrant Christian Fouchet en janvier 1974, j'avais abordé ce sujet avec l'ancien ministre et compagnon de route du général pendant 30 ans. Certes, cela ne date pas d'hier. Mais sa réponse catégorique prend aujourd'hui une tonalité particulière. « Ils n'oseront pas aller jusque-là, m'avait-il dit. Songez qu'avec un pareil système, le général de Gaulle, le général de Gaulle, avait-il insisté, n'aurait pas pu être candidat en 1957. Il n'aurait pas eu 25 parlementaires avec lui. Mais s'ils vont jusque-là, alors je crierai au coup d'État légal ».
La proposition de loi adoptée au Sénat a ensuite été abandonnée, et la caution de parlementaires n'a jamais vu le jour.
Mais, en ce mois de janvier 2022, il est bien clair que si un candidat comme Éric Zemmour, recueillant de manière répétée entre 13 et 16 % des intentions de vote dans les sondages, ne pouvait pas être candidat, faute de réunir les 500 signatures en provenance d'au moins 30 départements, cela signifierait clairement que les partis politiques auraient repris possession de la République, en ayant établi - à la suite de la publication de la liste des parrainages, un monopole de présentation des candidats réservé aux grandes formations politiques.
Insidieusement, un rude coup serait porté à la Vᵉ République et à la démocratie française.
Pour toutes celles et tous ceux qui proclament leur attachement à nos institutions, le moment est venu de se souvenir des enseignements du général de Gaulle et de permettre l'expression de toutes les opinions.
Alain Tranchant est ancien Délégué départemental du Mouvement pour l'Avenir du Peuple français (présidé par Christian Fouchet).
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