Policier blessé dans un braquage à Saint-Ouen en 2015 : des séquelles à vie
Le "choc" des deux balles qui pénètrent dans la tête et les séquelles à vie. Un policier grièvement blessé par un braqueur à Saint-Ouen en 2015, a témoigné vendredi au procès de deux complices présumés du malfaiteur, tué dans la fusillade.
Le 5 octobre 2015, vers 09H00, l'équipage de ce brigadier de la BAC (brigade anti-criminalité) de Saint-Denis reçoit un appel radio: un entrepôt de bijoux vient d'être braqué, deux hommes sont en fuite dans un utilitaire blanc.
Une course-poursuite s'engage, quatre équipages sont mobilisés. Elle va durer 10 minutes, en pleine circulation. Les malfaiteurs sont finalement bloqués par un barrage mis en place sur un quai de l'île-Saint-Denis, une commune voisine.
Le brigadier de la BAC sort du véhicule, arme à la main, avance vers l'utilitaire. "Je sais qu'on est une dizaine de fonctionnaires pour deux personnes à interpeller, je me dis que ça va aller", raconte à la barre cet homme de 38 ans, petit et athlétique.
Mais le braqueur, un récidiviste en fuite, fiché "S", n'est pas décidé à se rendre. "Il sort du véhicule, en une seconde je vois son arme pointée sur moi. Après c'est le choc, je sens comme un uppercut, et c'est le trou noir".
Le brigadier ne "réalise pas" que l'homme a tiré trois fois avec un pistolet automatique. La première balle a touché son arme, la deuxième l'a atteint à la joue, la troisième a pénétré dans son crâne. "Après je ne me souviens plus de rien", dit-il. "Je me rappelle avoir vu le ciel et puis on m'a endormi". Le malfaiteur, touché par des tirs de riposte des policiers, succombera à l'hôpital.
Deux hommes sont jugés jusqu'au 13 octobre devant la cour d'assises de Seine-Saint-Denis dans cette affaire. L'un, 26 ans, officiait comme chauffeur, l'autre, 31 ans, est accusé d'être la "taupe" au sein de l'entrepôt de bijoux. Ils comparaissent pour "vol en bande organisée avec arme" et, pour l'un d'eux, "participation à une association de malfaiteurs".
- "Du plomb au niveau du cerveau" -
Miraculé, le brigadier, dont le pronostic vital avait été engagé, sort du coma le 23 octobre. Enchaîne les rééducations. "J'ai toujours du plomb au niveau du cerveau", dit-il à barre. Il souffre de "troubles de mémoire", de troubles sensitifs. Impossible de "boire une boisson chaude" par exemple, "ça me fait l'effet d'une décharge électrique dans la boîte crânienne, à cause du plomb dans mon palais". Il gardera des séquelles à vie selon les médecins.
Il ne peut plus conduire, ni courir, a des difficultés à lire: "la lecture se fait, mais elle est très lente. Je dois solliciter ma femme pour le courrier, les mails".
Son soutien, comme celui de ses parents, de ses collègues et de la hiérarchie, l'ont "beaucoup aidé dans la rééducation", explique-t-il.
"Il s'est senti soutenu", avait expliqué son père en marge de l'audience, jeudi, à l'ouverture du procès. Alors qu'il était dans le coma, "il y avait en permanence autour de lui des collègues en tenue qui faisaient le pied de grue". "Il avait quitté l'hôpital sous une haie d'honneur."
Il a repris le service il y a trois semaines. Devenu capitaine, il travaille en mi-temps thérapeutique, dans l'administratif, il ne fera plus de terrain. L'avocat général a salué "sa force morale". "Ma vie c'était la voie publique", venait de dire le policier. "J'essaie de ne pas penser à ça, mais je sais que je ne peux plus monter dans une voiture de police".
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