Affaire Cahuzac : la décision de la Cour de Cassation attendue mercredi 30 mars
La Cour de cassation, qui a examiné ce mercredi 23 une délicate question de droit posée par la défense de Jérôme Cahuzac, se prononcera le 30 mars sur le dossier de l'ex-ministre, ex-chantre de la rigueur à l'origine du premier scandale du quinquennat.
Cette question prioritaire de constitutionnalité (QPC), qui conteste le cumul de sanctions pénales et fiscales en matière d'impôt sur la fortune (ISF), avait interrompu le procès ouvert en février devant le tribunal correctionnel de Paris.
Quelle que soit la décision de la plus haute juridiction, l'ancienne étoile montante de la galaxie socialiste sera bien jugée. Et avec Jérôme Cahuzac, son ex-épouse, Patricia Ménard, poursuivie comme lui pour fraude fiscale et blanchiment. A leurs côtés, leurs anciens conseillers, le banquier suisse François Reyl et l'ex-avocat Philippe Houman, répondront de blanchiment. Tous encourent jusqu'à sept ans de prison et un million d'euros d'amende.
Le tribunal avait simplement reporté le procès au 5 septembre pour permettre l'examen par la Cour de cassation, puis au Conseil constitutionnel si la Cour le décidait, de la QPC interrogeant la constitutionnalité d'articles du code général des impôts qui autorisent, "à l'encontre de la même personne et en raison des mêmes faits, le cumul de procédures ou de sanctions pénales et fiscales".
"On ne peut pas juger deux fois une même personne pour la même chose", a martelé ce mercredi Me Emmanuel Piwnica, l'avocat de Jérôme Cahuzac. Il a rappelé que les époux Cahuzac avaient accepté "un redressement fiscal majoré de 80%", d'un montant de plus de 2,3 millions d'euros, dont 500.000 euros de pénalités, enjoignant la Cour à s'en remettre au Conseil constitutionnel, "qui nous répondra vite, dans les trois mois".
Hors de question de parler "d'identité des peines" pour l'avocat général Denis Mondon. "On ne peut pas affirmer qu'une amende est de même nature qu'une peine de prison", a-t-il affirmé. "Les sanctions fiscales protègent les intérêts financiers de l'Etat", tandis que "les sanctions pénales protègent la citoyenneté, la Nation": dans un cas, on veut être remboursé, dans l'autre, on vise "l'exemplarité", la "dissuasion" via la "publicité des débats", a-t-il lancé, appelant à ne pas transmettre cette QPC.
La Cour de Cassation rendra son arrêt le 30 mars, en même temps que sa décision dans l'affaire du marchand d'art Guy Wildenstein, dont le procès pour fraude fiscale avait été interrompu en janvier pour une question similaire.
C'est précisément le report du procès Wildenstein qui avait entraîné celui de Cahuzac: le tribunal s'était appuyé sur ce précédent, ainsi que celui, encore plus retentissant, d'EADS. Le Conseil constitutionnel avait mis fin à une procédure pénale contre le groupe aéronautique car les faits avaient déjà été examinés par une juridiction administrative.
Pour l'ex-ministre comme pour Wildenstein, même dans l'hypothèse d'une décision du Conseil constitutionnel invalidant les poursuites concernant la fraude fiscale, demeureront les mises en cause pour blanchiment.
L'affaire Cahuzac avait démarré en décembre 2012: le site Mediapart révèle que le ministre a possédé un compte caché à l'étranger. Il commence par tout nier, avant de démissionner en mars 2013 puis passer aux aveux en avril.
L'instruction a démonté les mécanismes d'une fraude fiscale "sophistiquée" et "familiale", visant à placer l'argent des revenus de la clinique spécialisée dans les implants capillaires tenue par les époux Cahuzac, mais aussi des prestations du chirurgien, ex-conseiller ministériel, auprès de laboratoires pharmaceutiques.
Un premier compte a été ouvert par un "ami" en 1992, puis un autre au nom de Cahuzac. Lorsque le secret bancaire suisse se fissure en 2009, les quelque 600.000 euros qu'y détient Jérôme Cahuzac prennent la route de Singapour, via une société enregistrée aux Seychelles.
Les époux ouvrent aussi ensemble un compte sur l'île de Man en 1997. Patricia Cahuzac ouvre en 2007 son propre compte suisse. L'argent est aussi "blanchi" via les comptes de la mère de l'ancien ministre, qui a reconnu s'être fait livrer de l'argent liquide à Paris.
À LIRE AUSSI
L'article vous a plu ? Il a mobilisé notre rédaction qui ne vit que de vos dons.
L'information a un coût, d'autant plus que la concurrence des rédactions subventionnées impose un surcroît de rigueur et de professionnalisme.
Avec votre soutien, France-Soir continuera à proposer ses articles gratuitement car nous pensons que tout le monde doit avoir accès à une information libre et indépendante pour se forger sa propre opinion.
Vous êtes la condition sine qua non à notre existence, soutenez-nous pour que France-Soir demeure le média français qui fait s’exprimer les plus légitimes.
Si vous le pouvez, soutenez-nous mensuellement, à partir de seulement 1€. Votre impact en faveur d’une presse libre n’en sera que plus fort. Merci.