Conseil constitutionnel : trois propositions de nominations politiques au parfum très affairiste

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FranceSoir
Publié le 15 février 2022 - 20:28
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F. Froger / D6
Trois nominations qui jettent le doute sur la qualité des membres de l'organe juridique.
F. Froger / D6

Le jeu des chaises musicales qui consiste à remplacer les trois postes bientôt vacants au Conseil constitutionnel est lancé. Trois mandats – ceux de Claire Bazy-Malaurie, Nicole Maestracci et Dominique Lottin – doivent prendre fin d’ici le 14 mars. Leur mandat au Conseil constitutionnel, présidé actuellement par Laurent Fabius et composé de neuf membres nommés, dure neuf ans et ne peut être renouvelé.

Le président de la République, Emmanuel Macron, le président du Sénat, Gérard Larcher, et le président de l’Assemblée nationale, Richard Ferrand, sont chacun chargés de nommer un candidat remplaçant. Une fois les noms communiqués, ces trois candidats doivent être confirmés par les commissions des lois des deux chambres.

Le moins que l’on puisse dire, c’est que le profil des candidats a de quoi interpeller.

Véronique Malbec

Le choix le plus sulfureux est celui de Richard Ferrand, président de l’Assemblée nationale et membre du parti d’Emmanuel Macron. Ce dernier propose la magistrate Véronique Malbec, actuelle directrice de cabinet du ministre de la justice, Eric Dupond-Moretti.

Mme Malbec était supérieure hiérarchique du procureur de Brest lorsque celui-ci a décidé le 13 octobre 2017 le classement sans suite de l’enquête préliminaire concernant l’affaire des Mutuelles de Bretagne. Cette affaire, aussi connue sous le nom d’« affaire Ferrand », révélée par Le Canard Enchainé, remonte à 2011. Richard Ferrand, alors directeur général des Mutuelles de Bretagne, avait fortement gonflé son patrimoine familial en faisant louer par l’organisme qu’il dirigeait des locaux commerciaux appartenant… à sa compagne.

Décider de nommer la magistrate qui a classé son affaire ressemble, politiquement, ni plus ni moins qu’à un renvoi d’ascenseur pour un poste au sein de la plus haute juridiction de la Ve République.

Jacqueline Gourault

Le choix d’Emmanuel Macron interroge, lui, par le profil de la candidate. Alors que la fonction du Conseil constitutionnel est juridictionnelle en raison du développement des questions prioritaires de constitutionnalité, le président de la République choisit de nommer Jacqueline Gourault, une responsable politique qui n’est pas une habituée des questions constitutionnelles. Proche de François Bayrou, la ministre de la Cohésion des territoires a intégré en juin 2017 le gouvernement d’Edouard Philippe. Un choix qui ne semble donc pas avoir été fait sur des motivations liées à la compétence de la candidate.

Un élément qui n’aura pas échappé à la vigilance de Pierre Gentillet, avocat au barreau de Paris :

Déjà en février 2019, le choix par Emmanuel Macron de Jacques Mézard pour remplacer Michel Charasse au Conseil constitutionnel avait été perçu comme un appel du pied au centre de l'échiquier politique. Le responsable du Mouvement radical (gauche) venait de faire son retour au Sénat après avoir dû confier en octobre 2018 son portefeuille au sein du gouvernement à… Jacqueline Gourault.

François Seners

Bien que le choix de François Seners par Gérard Larcher semble moins sujet à polémique, il semble que ce soient là aussi les relations personnelles qui aient surtout joué dans la proposition de ce candidat. En effet, ce conseiller d’État a été le directeur de cabinet du président du Sénat de 2014 à 2017.

Sauf veto des assemblées, ces trois personnalités vont donc rejoindre pour un mandat de neuf ans non renouvelable les six autres membres du Conseil constitutionnel, dont deux anciens Premiers ministres, Laurent Fabius, le président de l’institution, et Alain Juppé. Comme l’a fait remarquer sur Twitter Jean Quatremer, correspondant européen du journal Libération, le Conseil compterait alors sur neuf membres… cinq politiques purs.

Des nominations qui ont aussi déclenché l’ire du président des Patriotes sur le même réseau, qui dénonce la mainmise du pouvoir politique sur cette institution et appelle à sa dissolution pour le remplacer par « un aréopage de citoyens tirés au sort ».

Rappelons que le Conseil constitutionnel avait validé la loi sur le passe sanitaire l’été dernier ainsi que la loi sur le passe vaccinal en janvier 2022. Des décisions qui avaient généré « déception et inquiétude » chez la députée France insoumise Mathilde Panot, devant un comportement de l’autorité juridique qu’elle avait qualifié de « servile ».

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