Coupe du Monde 2022 au Qatar : le boycott serait sans effet sur le climat, selon Agnès Pannier-Runacher

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FranceSoir
Publié le 14 septembre 2022 - 18:30
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La ministre de la Transition écologique Agnès Pannier Runacher
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JOHN THYS / AFP
La Coupe du Monde de football au Qatar aura lieu du 22 novembre au 18 décembre 2022.
JOHN THYS / AFP

Les chantiers de construction des stades de la Coupe du Monde de football ont commencé au Qatar en 2010, année de l'attribution du plus grand événement footballistique au pays du golfe. À l'hiver prochain, pour la première fois depuis sa création, la coupe du monde de la FIFA aura lieu dans un pays du Moyen-Orient. Si l'événement est historique, la grande ferveur qu'il suscite est toutefois ternie par les conditions déplorables et désormais connues des travailleurs qui ont construit toutes les infrastructures afin que l'événement puisse se tenir.

À cela, s'ajoute la question climatique et les émissions de gaz à effet de serre, émis par la climatisation des stades.

Invité du Grand Jury RTL-Le Figaro-LCI le 11 septembre 2021, la ministre de la Transition écologique Agnès Pannier-Runacher a dû s'expliquer sur la tenue de cet événement sportif qui suscite la colère et l'incompréhension d'une partie de la population priée de respecter les consignes de « sobriété énergétique ». 

Le coût humain 

Des hommes, mais également des femmes, originaires le plus souvent d'Afrique ou d'Asie, construisent toutes les infrastructures : stades, routes et métro.

Dès le début des travaux, les mauvaises conditions de travail sont connues : exploitation, travail forcé, parfois non payé, horaires excessifs... des conditions souvent dénoncées comme proches de l'esclavagisme par des organisations de défense des droits humains. Parmi les dispositions les plus choquantes, celles qui, par un système de parrainage, permettent aux employeurs d'empêcher les travailleurs de quitter le pays et leur emploi. 

En 2017, après des années de pressions de la part de différentes ONG comme Amnesty Internationale et « une plainte relative au non-respect de la convention n° 29 sur le travail forcé », un accord est signé entre l'Organisation internationale du travail et les autorités du Qatar qui s'engagent à coopérer avec l'Organisation afin d'instaurer une législation et des pratiques en conformité avec les normes internationales du travail. 

Depuis, de nombreuses dispositions légales ont été dans le bon sens puisque le Qatar a décidé de supprimer le certificat de « non-objection » ; désormais tous les travailleurs peuvent quitter leur emploi ou en changer sans avoir à solliciter l'autorisation de leur employeur, comme cela était le cas auparavant. 

D'autres réformes comme la mise en place d'un Fond de soutien et d'assurance des travailleurs ou la possibilité de créer des syndicats, ont également été ratifiées.

Cependant, selon Amnesty International, si de nombreuses lois ont été adoptées, peu auraient été mises en œuvre et de nombreux travailleurs auraient continué à être victimes de mauvais traitements de la part de patrons sans scrupules. 

6 500 morts sur les chantiers de constructions des stades au Qatar depuis 2010, c'est le chiffre révélé le 23 février 2021 par The Guardian. Ces chiffres collectés auprès des gouvernements du Sri Lanka, du Pakistan, d'Inde, du Bangladesh et du Népal seraient toutefois sous-estimés, puisque de très nombreux pays comme les Philippines et le Kenya, qui ont envoyé des travailleurs, n'auraient pas fourni les leurs. Quoi qu'il en soit, depuis 2010, les analyses des données des pays qui ont envoyé ces travailleurs, révèlent que chaque semaine, une moyenne de 12 ouvriers auraient perdu la vie dans ces chantiers.

Entachés de ce scandale, la 22e édition de la Coupe du monde, organisée par la FIFA (Fédération internationale de football association), qui a sollicité deux millions de travailleurs, aura bien lieu du 20 novembre au 18 décembre 2022 malgré un appel au boycott qui ne cesse de s'amplifier sur les réseaux sociaux.

Tandis que la polémique ne s'éteint pas, la ministre de la Transition écologique, Agnès Pannier-Runacher, était invitée au Grand Jury RTL-Le Figaro-LCI pour répondre aux délicates questions écologiques que suscite la tenue de cet événement sportif.

La question climatique

À l'heure où des efforts considérables sont demandés à l'ensemble des citoyens des pays européens, invités à réduire leurs dépenses énergétiques, les propos d'Agnès Pannier-Runacher passent mal. 

« Je ne crois pas que le fait de boycotter la Coupe du monde change malheureusement les émissions de gaz à effet de serre de cet événement » a déclaré la ministre, qui, pour justifier la tenue de l'événement, a ajouté : « Il y a des équipes qui se préparent depuis des années. Cette décision a été prise dans un autre contexte climatique ».

Si l'on suit le raisonnement de la ministre, en 2010, personne n'était capable de comprendre les enjeux écologiques d'une telle décision. Pourtant, le fait n'est pas nouveau : l'économie du Qatar dépend majoritairement des hydrocarbures dont la combustion est connue pour être responsables des principales émissions de dioxyde de carbone (CO2). Or, entre 2009 et 2019, les besoins énergétiques du Qatar ont doublé, une hausse qui n'est certainement pas étrangère à la décision d'organiser la manifestation sportive dans ce pays. 

Toujours pour répondre aux critiques récurrentes et afin de dédouaner l'État français de ces responsabilités, Agnès Pannier-Runacher a expliqué que l'attribution de la Coupe du monde au Qatar n'était pas venue « de l'État français » mais qu'il s'agissait « d'une décision internationale ». Une réflexion quelque peu risquée lorsqu'on sait que le parquet national financier (PNF) a ouvert en 2016, une enquête et mène une investigation sur un déjeuner organisé le 23 novembre 2010 à l'Élysée où étaient réunis autour du président Nicolas Sarkozy, Michel Platini, à l'époque patron de l'Union des associations européennes de football (UEFA), Sébastien Bazin, actionnaire du PSG et Tamim ben Hamab al Thani, devenu depuis émir du Qatar. Selon l'ancien président de la FIFA, Joseph Blatter, cette rencontre à l'Élysée aurait « complètement changé la donne ». Hasard ou non du calendrier, neuf jours après cette rencontre, le 2 décembre 2010, le Qatar était choisi pour accueillir la Coupe du monde et six mois plus tard, le club Paris Saint-Germain passait sous pavillon qatari, racheté par la société d'investissement Qatar Sports Investments (QSI) qui en devenait actionnaire à hauteur de 70 %.

L'enquête ouverte par la justice française autour de l'attribution de la Coupe du monde de 2022, est loin d'être achevée. Pourtant, les premiers éléments du dossier révèlent que l'ex-président de l'UEFA, Michel Platini, aurait joué un rôle important dans le choix du Qatar ; ce dernier a d'ores et déjà reconnu avoir défendu la monarchie du golfe en votant pour elle lors du scrutin organisé par la fédération internationale de football (FIFA) en décembre 2010. 

Lire aussi : Coupe du monde 2022 : un collectif alsacien dénonce un chantier meurtrier au Qatar 

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