États généraux de la justice : Emmanuel Macron s'attaque au droit d'amendement

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FranceSoir
Publié le 20 octobre 2021 - 20:02
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F. Froger / Z9, pour FranceSoir
"On peut fermer la boutique, si c’est ça qu’il veut"
F. Froger / Z9, pour FranceSoir

Lundi 18 octobre, lors du lancement des États généraux de la justice à Poitiers, Emmanuel Macron s'est attaqué une fois de plus au droit d'amendement des parlementaires... entre autres.

Un droit qui dérange

Déjà en 2018, pendant le projet de réforme des institutions, qui avait pour objectif d'améliorer le travail parlementaire, le droit d'amendement était pris pour cible par l'exécutif. À l'époque, c'était Édouard Philippe qui portait ce projet de réduction des amendements, et c'était François de Rugy, en président de l'Assemblée nationale, qui s'y était opposé.

Trois ans plus tard, en juillet 2021, c'est Olivier Véran qui imaginait le virus siroter "une petite bière", pendant les sulfureux débats sur le passe sanitaire. Discutables et discutés, ces derniers duraient manifestement trop longtemps à son goût, notamment à cause des 1 146 amendements qui avaient été déposés par les parlementaires à ce moment.

Jamais deux sans trois : cette fois, c'est Emmanuel Macron qui a sorti ses gros sabots pour "moderniser la justice". Selon lui, notre droit, de manière générale, aurait progressivement été rendu illisible à cause d'une "inflation législative". C'est pour remédier à cela qu'il a mentionné une réforme constitutionnelle du droit d'amendement. Quand cela s'est su, la nouvelle n'a pas manqué de faire bondir les parlementaires concernés :

Les sources de cette "inflation législative" et de l'illisibilité du droit français

 

À ce sujet, tout le monde semble s'accorder : aujourd'hui, on ne comprend pas grand-chose aux législations. D'ailleurs, les membres de l'opposition n'étaient pas les derniers à faire savoir leur mécontentement à ce sujet.

En président de la République, Emmanuel Macron prend donc les choses en main, balayant accidentellement les principes de séparation des pouvoirs. Selon lui, c'est la faute des parlementaires et de leurs trop nombreux amendements si les débats sont trop longs. Seulement, l'opposition n'a pas prévu de se laisser malmener plus qu'elle ne l'est déjà : « Il faut lui expliquer qu’il ne nous reste plus que ça. Sinon, on peut fermer la boutique, si c’est ça qu’il veut, on fait un régime présidentiel sans Parlement » a protesté Michel Zumkeller, député UDI. Effectivement, déjà pour le passe sanitaire, l'Assemblée nationale avait fait les frais d'un exécutif zélé qui avait simplement décidé de ne pas tenir compte du premier vote.

Entre temps, de son côté, le gouvernement ne s'est pas gêné pour multiplier les projets de loi, les décrets et les règlements. Une précipitation législative qui n'a jamais trop rassuré les parlementaires, donnant lieu à une foule d'incompréhensions à chaque assemblée. Alors, à qui la faute ?

Trop de lois tuent la loi

Par ailleurs, l'ambiance électrique de ces dernières années a aussi fait naître un nombre incalculable de plaintes et de recours devant la justice. En tête de file, ce sont bien les responsables du gouvernement qui sont le plus souvent visés : Agnès Buzyn, Édouard Philippe, et maintenant Olivier Véran, sont tous trois dans le viseur de la Cour de justice de la République (CJR), seule instance capable de juger les membres du gouvernement. Instance qu'Emmanuel Macron voulait d'ailleurs aussi supprimer. Effectivement, il rappelait lundi que « la situation que nous vivons pose une question qui peut mettre en tension l’autorité judiciaire avec les autres pouvoirs ». N'est-ce pas là pourtant le fondement même de la séparation des pouvoirs ?

Couper l'herbe sous le pied des parlementaires en révoquant d'abord le droit d'amendement, puis remettre en question le rôle de la CJR, ne reviendrait-il pas à donner le plein contrôle des lois à l'exécutif, tout en assurant au gouvernement qu'il pourra lui-même s'y soustraire, sans trop souffrir des conséquences par la suite ?

Quoi qu'il en soit, les États généraux de la justice doivent donner lieu à 120 jours de travail et de réflexion, « libres, ouverts et indépendants ». Cela nous projette déjà début 2022, soit peu de temps avant l'élection présidentielle. Si le timing est trop serré pour que cela puisse se changer en loi d'ici avril, c'est parfait pour préparer le terrain d'une campagne pour un prochain mandat.

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