Les jeux de la mort et du coronavirus : pas de hasard
La pandémie avait été prévue !
Les princes qui nous gouvernent, comme stupéfiés par la peste qui n’en finit pas de nous pourrir la vie, ont trouvé l’excuse dite du « Black Swan » (Cygne Noir), c’est-à-dire de l’événement imprévisible qui surprend le monde entier et que personne ne pouvait anticiper. Le « Black Swan » est un animal qui sévit plutôt dans les milieux boursiers, quand on cherche à « expliquer », après coup, un krach. Ubu voudrait aussi le voir voler dans le domaine sanitaire.
Hé bien ! cet argument ne vaut rien. Non seulement, la pandémie était prévisible, mais elle avait été prévue en 2005 – il y a donc 15 ans – par un certain Michael T. Osterholm dans un article publié par The New England Journal of Medecine. A l’époque, Osterholm était directeur du Centre pour la recherche sur les maladies infectieuses et la politiques de santé à l’Université du Minnesota. Son article est intitulé explicitement Preparing for the Next Pandemic (Se préparer pour la prochaine pandémie). Et en effet, il y donnait tout un tas de conseils pour parer à une nouvelle catastrophe qui ne pouvait que survenir.
L’article fut repris par Foreign Affairs, la prestigieuse revue américaine à la portée des décideurs du monde entier. On en trouve encore aujourd'hui une version originale en libre lecture sur NEJM.[1]
Osterholm commençait par nous rappeler que la grippe espagnole avait fait entre 50 et 100 millions de morts dans les années 1918-1919. Aujourd'hui avec une population mondiale quadruple de celle des années 1920, on peut redouter une hécatombe encore plus impressionnante en nombre de victimes, même avec une pandémie moins cruelle que celle de 1918-19.
Après ce rappel historique, Osterholm affirmait l’inévitabilité d’une autre pandémie. « Nombre d’événements et de facteurs récents ont accru notre inquiétude quant à l’imminence d’une nouvelle pandémie dans un proche avenir », écrivait-il. Et d’ajouter : « Plus de 50% de la population [des Etats-Unis] pourraient être malades avec un taux de mortalité de 5% », calculait Osterholm en 2005. Aujourd'hui, la population des Etats-Unis est de 328 millions. Avec un taux de mortalité de 5% sur la moitié de cette population, on aboutit à un total de 8,2 millions de morts (le nombre de décès dus au coronavirus a déjà atteint 393 000, on serait donc – heureusement - encore loin du compte !).
« Il y aurait, prévoyait encore Osterholm, des pénuries majeures […] pour de nombreux produits y compris la nourriture, le savon, le papier, les ampoules, l’essence, les pièces détachées pour les équipements militaires ou l’adduction d’eau dans les villes, les médicaments y compris les vaccins autres que ceux contre la pandémie. De nombreuses industries non essentielles, dans l’électronique, l’automobile ou les activités impliquant des contacts rapprochés entre personnes – dans les écoles, les spectacles, les restaurants – devraient être évitées, voire interdites ». Prophétie hallucinante par ses détails, qui se réalise sous nos yeux quinze après avoir été énoncée.
L’heure des comptes n’a pas encore sonné – surtout quand on est bouclé chez soi. Mais elle viendra sûrement…Et il faudra nous expliquer pourquoi et comment personne n’a tenu compte de l’avertissement documenté et raisonné de Michael Osterholm.
[1] On trouve référence de cet article dans Pandémologie politique, de Jean-Paul Gaudillière, Caroline Izambert et Pierre-André Juven qui vient d’être publié aux Editions La Découverte.
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