Martinique : au pont de la Lézarde, les forces de l'ordre face aux barrages
"Ce soir, c'est le pont de la Lézarde": comme tous les jours depuis une semaine, les gendarmes envoyés en renfort en Martinique, sont intervenus mardi soir sur un des nombreux barrages qui bloquent l'île.
Un peu plus tôt, lors d'une conférence de presse, le ministre des Outre-mer, Sébastien Lecornu, venu rencontrer les syndicats et les élus, avait prévenu: "la liberté de circulation est un enjeu majeur", "un plan de libération des axes va se décliner dans les prochaines heures et les prochains jours".
Trois heures plus tard, un escadron de gendarmerie se dirigeait vers le pont de la Lézarde au Lamentin, à quelques kilomètres à l'est de Fort-de-France, occupé depuis le matin même. Le quartier étant en zone police, un commissaire est embarqué dans l'escadron.
Les occupants du barrage, "savent qu'on arrive. On a deux solutions, soit ils sont déjà partis, soit ils nous attendent et on ne sait pas ce qui peut se passer", confie à l'AFP un gradé qui participe à l'opération.
Le pont est stratégique car il enjambe l'autoroute A1, axe très fréquenté et également bloqué depuis le matin. Des pneus y flambent sur les voies. L'unité d'élite de la police nationale, le Raid, intervient.
Cette fois, les occupants ont choisi la première option: ne restent sur le pont que des amas de pneus qui servaient la journée à filtrer la circulation.
Lors de précédentes interventions en d'autres points, les manifestants avaient choisi de rester sur place et d'affronter les gendarmes, n'hésitant pas à faire rouler une voiture bélier sur eux et même à tirer à balles réelles.
"En quelques jours, en Martinique, plus d'une centaine de coups de feu ont été tirés contre des policiers et des militaires de la gendarmerie", selon M. Lecornu.
- 57 interpellations en Martinique -
La journée, les barrages sont occupés par des grévistes, des syndicalistes, des mères de familles... Le soir, alors que l'île est sous couvre-feu de 19H à 5H, des jeunes occupent la place cédant souvent à la violence.
Né du refus de cette obligation vaccinale pour soignants et pompiers, le mouvement de grogne aux Antilles s'est étendu à des revendications politiques et sociales, notamment contre la vie chère, occasionnant violences, pillages et incendies.
Il a gagné la Martinique où la contestation a débuté le 22 novembre. Comme la Guadeloupe, l'île est placée sous couvre-feu.
Sur le pont de la Lézarde, les 62 hommes et femmes de l'escadron de gendarmerie se déploient et "montent la garde" pour éviter de nouveaux regroupements.
Une entreprise est appelée pour évacuer les pneus et les pompiers pour éteindre les feux sur l'autoroute. Les quelques rares automobilistes sont priés de faire demi-tour.
Des gendarmes accompagnent le Raid dans la cité voisine pour effectuer des vérifications. Quelques balcons d'immeuble sont brièvement éclairés avec des projecteurs des forces de l'ordre.
Il n'y aura pas d'arrestation ce soir dans le secteur du pont de la Lézarde mais depuis le début du conflit en Martinique, 57 personnes ont été interpellées, selon le ministre.
Au pied d'un de ces petites immeubles, sous une pluie battante, une voiture cabossée est aussi évacuée.
Elle n'a pas eu le temps de servir à bloquer la circulation comme sur de nombreux rond-points de l'île, désormais jonchés de carcasses de voitures calcinées.
Un nouvel escadron de gendarmerie doit arriver prochainement de métropole portant à cinq leur nombre en Martinique, comme en Guadeloupe, qui connaît les mêmes tensions sociales.
A ces gendarmes s'ajoutent des renforts du Raid et du GIGN mais aussi des renforts de policiers venus d'autres territoires et notamment de Guyane, a détaillé le ministre.
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