Nouveaux affrontements à venir à gauche sur la réforme du travail
Satisfaction du Medef, embarras du PS et courroux des frondeurs: le projet de loi sur le Travail, qui sera présenté le 9 mars en Conseil des ministres, promet de nouveaux débats animés au Parlement, la ministre Myriam El Khomri n'excluant pas a priori le recours à l'article 49 alinéa 3 de la Constitution.
Le texte prévoit entre autres de consacrer la primauté de l'accord d'entreprise sur la branche en matière d'assouplissement du temps de travail, un plafonnement des indemnités prud'homales en cas de contestation d'un licenciement, la création d'un compte personnel d'activité (CPA) et des mesures sur le licenciement destinées à "lever la peur d'embaucher" selon les mots de la ministre du Travail aux Échos.
Myriam El Khomri est vite montée au créneau pour défendre son projet un jour après l'avoir transmis au Conseil d’État, anticipant peut-être les réactions sur l'une des dernières grandes réformes du quinquennat de François Hollande.
Qualifiant sa réforme de "changement de philosophie important", elle a même glissé qu'elle n'excluait pas l'utilisation du 49-3, affirmant qu'elle et Manuel Valls "prendront leurs responsabilités" face à un débat parlementaire "très nourri".
Les critiques ne se sont pas fait attendre à gauche. Jean-Christophe Cambadélis a déclaré qu'il aurait "du mal à voter" cette réforme "dans l'état" car elle "ne montre pas son équilibre entre une flexibilité et une sécurité". Pour le premier secrétaire du PS, c'est notamment la question du licenciement économique qui coince. "Tout ce qui est dans ce texte" sur le sujet "est discutable", a-t-il dit.
Une réforme des licenciements économiques également jugée "dangereuse" par la CFDT car elle risquerait en l'état "d'organiser une concurrence entre les filiales européennes d'un même groupe" et de "fragiliser les salariés français" selon Véronique Descacq, numéro-2 du syndicat contactée par l'AFP. Un point de vue partagé par les jeunes socialistes qui ont appelé le gouvernement à "revoir sa copie".
Le texte qui devrait être présenté à l'Assemblée nationale début avril, et qualifié de "dynamitage du code du travail" par le secrétaire national du PCF Pierre Laurent, ne passe pas non plus pour les frondeurs du PS.
Le député Christian Paul a parlé de "scandale ambulant" concernant le plafonnement des indemnités aux prud'hommes à 15 mois de salaire et dénoncé "des éléments extrêmement contestables" sur les 35 heures et le droit du licenciement. Laurent Baumel a évoqué une "réforme globalement inutile".
L'ancien ministre Benoît Hamon a lui dénoncé un texte qui "visiblement ne passe pas" auprès des organisations syndicales "toutes obédiences confondues". Il a annoncé "des débats extrêmement intenses" sur une réforme qui "ne sera pas une affaire de quelques frondeurs face au gouvernement".
"La ministre anticipe le fait de ne pas avoir la majorité", a-t-il assuré qualifiant l'hypothèse du 49-3 brandie par Myriam El Khomri de "très mauvaise méthode".
Du côté du patronat et de la droite, en revanche, la réforme "va dans le bon sens", expression dans toutes les bouches jeudi. Les représentants du patronat Pierre Gattaz (Medef) et François Asselin (CGPME) ont salué le projet de loi, le premier appelant le gouvernement à "aller jusqu'au bout".
François Asselin est resté plus prudent dans l'attente du texte définitif et est revenu sur le nouveau cadre pour le licenciement économique, qui permettra "d'éviter les appréciations différentes d'une juridiction à une autre" selon lui.
Chez les Républicains, le secrétaire général Eric Woerth s'est satisfait que son parti ait été "entendu" et s'est dit favorable arguant que "tout ça est plutôt pavé de bonnes intentions".
Ce texte "devra être adopté avant la fin juin", a averti le Premier ministre Manuel Valls à la sortie d'une réunion avec les ministres et les secrétaires d’État jeudi à Matignon. Le ministre de l'Economie Emmanuel Macron a quant à lui évoqué une "réforme importante".
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