Statut des cheminots : Macron et l'exemple embarrassant de La Poste
Emmanuel Macron aurait-il choisi la mauvaise illustration? L'exemple de La Poste pour justifier la réforme du statut des cheminots à la SNCF a fait bondir l'opposition ainsi que de nombreux internautes sur les réseaux sociaux.
Sur TF1 ce jeudi 12, le président de la République a cherché à défendre le nouveau mode de recrutement prévu par la réforme de l'entreprise ferroviaire (que les "nouveaux entrants" ne bénéficient plus du statut de cheminot) en rappelant que La Poste, depuis 2002, n'embauche plus de fonctionnaires mais conclut des contrats de droit privé. Depuis 2014, ces nouveaux salariés sont plus nombreux.
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"Expliquer aux cheminots que leur avenir, c’est de finir comme La Poste, il n’a fait que rendre service à la mobilisation", a taclé le député de la France insoumise Eric Coquerel. Comme lui, ils sont nombreux à mettre en avant les fermetures successives des petits bureaux, symbole pour beaucoup de l'impact de cette transformation sur le service public.
Mais plus grave, La Poste a également connu depuis quelques années un malaise croissant et de nombreux suicides de salariés dénonçant leurs conditions de travail. Neuf employés se seraient suicidés entre 2014 et 2016 et cinq auraient réchappé à une tentative de suicide sur leur lieu de travail. Plusieurs alertes avaient pourtant été émises, et l'ont encore été depuis, sur ce mal-être.
Point commun à tous ces documents: la mise en avant d'une réorganisation chaotique de La Poste qui se répercute sur les employés.
Après un suicide en 2013, le cabinet Catéis soulignait dans un rapport l'état de santé "préoccupant, voire inquiétant sur les derniers mois" d'une partie des personnels de la direction de la communication.
En 2014, Sud-PTT s'inquiétait déjà des réorganisations "incessantes", qui "accentuent le caractère pathogène des organisations de travail".
Voir: La Poste - rapport accablant sur une plateforme nordiste après l'AVC d'une employée
En 2016 plusieurs cabinets adressaient à la direction de La Poste une lettre évoquant une"logique purement taylorienne (qui) s’impose: les agents ne sont vus que comme des exécutants sommés d’appliquer la stratégie édictée par des cadres dirigeants –qui sont par ailleurs les seuls à voir leur effectif s’étoffer".
Un autre rapport commandé par le Comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) de La Poste évoquait la même année "une organisation construite sur des règles instables et l'urgence des aléas qui immerge en permanence les agents dans l'incertitude" et "une pression permanente pour produire coûte que coûte malgré les aléas et sans moyens supplémentaires, repoussant les agents dans leurs derniers retranchements en termes de santé".
Rien ne permet de dire que la réforme de la SNCF provoquerait la même situation, notamment parce que La Poste a été confronté dans le même temps à un changement drastique de son activité avec la révolution numérique. Mais avec cet exemple, Emmanuel Macron n'a certainement pas donné la meilleure image de son projet de réforme.
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