Vent de fronde contre le ministre de l’Intérieur

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FranceSoir
Publié le 10 juillet 2020 - 15:43
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Gérald Darmanin le 8 juillet 2020 Place Beauvau
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© Thomas COEX / AFP
La nomination de Gérald Darmanin suscite la colère des associations féministes
© Thomas COEX / AFP
Une cinquantaine de rassemblements féministes sont organisés ce vendredi contre « le remaniement de la honte » et en particulier la nomination de Gérald Darmanin au ministère de l’Intérieur. 
 
Cela ne passe pas : celui qui est désormais le premier flic de France est en effet sous le coup d’une enquête pour viol, même s’il y a eu en réalité deux « affaires Darmanin ». La première, toujours en cours, provoque la colère des associations féministes. De quoi s’agit-il exactement ?
 
Première enquête en 2017
 
Une première enquête préliminaire est ouverte au printemps 2017 et rendue publique dans les médias en janvier 2018. Elle concerne des faits remontant à 2009. Alors chargé de mission au service des affaires juridiques de l’UMP, Gérald Darmanin s’était vu solliciter une faveur de la part d’une jeune femme qui souhaitait faire réviser son casier judiciaire. Selon la plaignante, Sophie S., il lui aurait fait miroiter son soutien en échange d’un autre type de faveurs, sexuelles s’entend. La soirée s’était dans tous les cas terminée dans un hôtel parisien. 
 
Gérald Darmanin, qui a lui aussi déposé plainte, pour dénonciation calomnieuse, voit dans un premier temps l’affaire classée sans suite, la femme concernée ne répondant pas aux convocations des enquêteurs. Or en janvier 2018, Sophie S. s’adresse de nouveau au parquet de Paris et dépose plainte avec constitution de partie civile pour viol, harcèlement sexuel et abus de confiance.
 
Non-lieu et reprise des investigations
 
Le parquet rouvre une enquête préliminaire pour viol. Il n’y a à ce stade aucune mise en examen. Le 16 août 2018, sur les réquisitions du parquet, le juge d’instruction rend une ordonnance de non-lieu expliquant notamment que :
« Le défaut de consentement ne suffit pas à caractériser le viol. Encore faut-il que le mis en cause ait eu conscience d’imposer un acte sexuel par violence, menace, contrainte ou surprise »
L’affaire en reste donc là, jusqu’au 14 novembre 2019. A cette date, c’est la Cour de cassation qui demande le réexamen de la validité du non-lieu. 
 
Finalement, le 11 juin dernier la Cour d’appel de Paris ordonne la reprise des investigations, mais davantage pour une question de procédure. Il n’y a en effet pas d’éléments nouveaux dans le dossier, mais la juridiction a estimé que le juge d’instruction n’aurait pas dû, en août 2018, « se fonder uniquement sur les résultats de l’enquête préliminaire » pour rendre sa décision de non-lieu.  
 
Une deuxième affaire classée sans suite 
 
Gérald Darmanin a fait l’objet d’un autre plainte, en février 2018. Le site Médiapart publie alors le témoignage d’une jeune femme expliquant qu’elle s’est sentie « obligée » d’avoir un rapport sexuel avec celui qui est alors ministre de l’Action et des comptes publics pour décrocher un emploi et un logement. Alors qu’une plainte est déposée pour abus de faiblesse, Gérald Darmanin parle de calomnie et se défend sur RTL :
« Je n’ai jamais abusé ni légalement ni moralement de qui que ce soit, et surtout pas d’une femme »
Ouverte en février, l’enquête préliminaire est classée sans suite en mai de la même année, le parquet estimant que les investigations n’avaient pas permis de « caractériser dans tous ses éléments constitutifs une infraction pénale. 
 
Un ministre toujours soutenu
 
Il y a donc bien une procédure en cours contre le nouveau ministre de l’Intérieur. Mais elle n’est pas contradictoire avec sa nomination, comme l’a expliqué le premier ministre Jean Castex au micro de Jean-Jacques Bourdin cette semaine :
« J’assume totalement cette désignation, il a le droit comme tout le monde à la présomption d’innocence »
Déjà en janvier 2018, au moment de la réouverture de l’enquête pour viol, Matignon avait officiellement fait savoir que Gérald Darmanin avait « toute la confiance du premier ministre ». 
 
Mi-juin, la porte-parole du gouvernement Sibeth Ndiaye avait renouvelé le soutien au ministre, rappelant que « la décision de la Cour de cassation intervient sur des sujets de forme ». Quant à la Garde des Sceaux Nicole Belloubet elle avait simplement déclaré sur « la justice suivra son cours », tout en ne manquant pas de souligner que « Gérald Darmanin est un excellent ministre du budget ». 
 
Un « message négatif »
 
Mais depuis, Gérald Darmanin a pris du galon dans le gouvernement, nommé ministre de l’Intérieur. Une décision qui n'a pas manqué de faire réagir les avocates de Sophie S : 
« Comment ne pas redouter désormais que la fonction du mis en cause pèse sur l’ensemble de la procédure »
Me Elodie Tuaillon-Hibon et Me Marjolaine Vignola estiment par ailleurs que « ce geste politique dont on imagine mal qu’il ait été fait sans le plein aval de l’Elysée » est un « message négatif envoyé à la Grande cause du quinquennat, la cause des femmes ». 
 
 

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