Elections européennes 2019 : l’avenir de l’Union est-il menacé ?

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La Maison de l'Europe de Paris, édité par la rédaction
Publié le 18 décembre 2018 - 15:29
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Le président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker devant le Parlement européen réuni à Strasbourg, le 12 septembre 2018
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© FREDERICK FLORIN / AFP
Du 23 au 26 mai 2019, les citoyens européens sont appelés aux urnes pour renouveler le parlement européen.
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Du 23 au 26 mai 2019, les citoyens européens vont élire leurs représentants au Parlement européen pour un mandat de cinq ans. En France, elles auront lieu le dimanche 26 mai 2019. Montée des populismes, taux d’abstention élevé, ingérence… Quels sont les enjeux qui vont venir rythmer ces élections souvent boudées par les électeurs?

Depuis 1979, les citoyens européens sont appelés à voter aux élections européennes au suffrage universel direct. On compte actuellement 751 sièges au sein de l’hémicycle pour la dernière législature 2014-2019. Pour 2019, une légère baisse est prévue: on passe de 751 à 705 députés à cause du départ des Britanniques prévu pour mars 2019. Comment vont être répartis les sièges restants? Le Parlement européen a déjà tranché cette décision et va allouer des sièges à huit Etats membres sous-représentés démographiquement dont cinq pour la France.

> D’un scrutin régional à un scrutin national

Outre le nombre de sièges, la nature du scrutin va également changer en France. On passe d’un scrutin régional avec un découpage du pays en huit circonscriptions en une circonscription unique au niveau national. Chaque parti politique devra donc présenter une liste de candidats pour tout le territoire français.

Ce changement de scrutin fait débat et a suscité de vives réactions dont l’opposition du Parti des Républicains (LR) davantage favorable au maintien des circonscriptions régionales comme l’a souligné Constance Le Grip, ancienne députée européenne et actuelle députée LR à l’Assemblée Nationale lors d’une conférence de la Maison de l’Europe sur La place politique et institutionnelle du Parlement européen le 29 novembre dernier.

"J’ai déchanté pour le scrutin régional qui ne nous a pas donné un meilleur ancrage dans la politique nationale. Je ne suis pas mécontente qu'on ait un débat national sur l'Europe", a quant à elle estimé Pervenche Berès, députée européenne du groupe politique Socialistes et Démocrates (S&D).

Contrairement au scrutin législatif français, le scrutin est proportionnel: "les partis ayant obtenu plus de 5% des suffrages bénéficieront d'un nombre de sièges proportionnel à leur nombre de voix". "Le scrutin européen pour la France est la seule élection avec un scrutin proportionnel intégral. Ce qui est inhabituel en France mais ça ne l'est pas pour plusieurs de nos voisins européen", a précisé Nicolas Becuwe de Kantar Public.

Ce mode de scrutin permet entre autres l’émergence de partis politiques qui enregistrent des scores assez faibles à l’échelon national. C’est le cas du parti Europe Ecologie-Les Verts (EELV) qui a enregistré un score historique en 2009 avec 16% des voix, devenant ainsi le troisième parti.

> Qui sera à la tête de la Commission européenne?

Un autre élément fait débat: la poursuite ou non du "Spitzenkandidat" ou plus communément appelé la désignation du candidat "tête de liste" pour la présidence de la Commission européenne. Ce système, institué par le Traité de Lisbonne et qui n’a pas de caractère automatique, a été appliqué pour la première fois en 2014 sous l’impulsion du Parlement européen pour qui cela représentait une avancée démocratique. Les partis politiques européens devaient choisir un candidat tête de liste et celui issu du parti politique vainqueur voyait son candidat nommé par le Conseil européen, composé des dirigeants européens, et approuvé par le Parlement. Des partis politiques européens se sont déjà prêtés au jeu: Manfred Weber pour le PPE, Frans Timmermans pour les Socialistes et Démocrates (S&D), Ska Keller et Bas Eickhout pour le Parti vert européen et Jan Zahradil pour les Conservateurs et Réformistes Européens (CRE). Certains chefs d’Etat et de gouvernement, dont le président français Emmanuel Macron et la chancelière allemande Angela Merkel sont défavorables au maintien de ce système craignant de manquer de poids sur la décision finale. Le Parlement européen y est quant à lui très fortement attaché. D’après un communiqué, les députés sont prêts à rejeter tous les candidats qui ne seraient pas "candidats en tête de liste".

> Abstention et montée des populismes?

D’après Nicolas Becuwe de Kantar Public, un fort taux d’abstention est à craindre pour ces élections européennes. Depuis 1979, le taux de participation au sein de l’Union européenne n’a fait que baisser. De 61,99% en 1979, il était de 42,61% en 2014. Ces taux de participation en baisse peuvent en partie s’expliquer par l’intérêt et les connaissances limités des citoyens envers ces élections comme l’atteste Nicolas Becuwe: "Une majorité des Européens ne savent pas qu'il y a des élections européennes en 2019 et selon nos enquêtes, l'intérêt et la connaissance sont limités. 30% des Européens sont certains d'aller voter".

Autre difficulté, les élections européennes s’inscrivent dans des contextes politiques nationaux très différents. Parmi ces contextes nationaux disparates, on constate l’émergence de forces politiques populistes de tout bord selon Kantar Public. En Hongrie, en Pologne ou encore en Italie, des partis politiques populistes -parfois en opposition avec les valeurs de l’UE- sont au pouvoir et menacent les fondements de la construction européenne. "La sauvegarde des valeurs européennes est menacée. J'espère qu'une partie de la droite va se séparer de l'extrême-droite. J'espère que l'on aura une coalition autour des valeurs" souhaite Pascal Durand, eurodéputé du parti européen des Verts. De son côté, Pervenche Berès ne se montre guère plus optimiste: "Dans le contexte où l'on sera dans ces élections européennes 2019, le tripartisme risque d'être bousculé. Il y aura une progression relative des populistes des deux bords de l'hémicycle".

Outre le taux d’abstention et la montée des populismes, la principale inquiétude des citoyens européens réside en la possible ingérence dans les élections. L’enjeu majeur reste celui de la sécurité de ces élections. D’après une enquête de la Commission européenne, 61% des citoyens européens s’inquiètent de la manipulation potentielle des élections du fait de cyberattaques, 59% s’inquiètent de l’influence sur les élections d’acteurs étrangers et de groupes criminels et enfin 67% s’inquiètent de l’utilisation des données personnelles laissées en ligne à des fins de ciblage des messages politiques.

Face à ces inquiétudes et à ces risques potentiels, la Commission européenne a présenté en septembre un ensemble de mesures visant à garantir que les élections de l'année prochaine au Parlement européen se déroulent de manière libre, équitable et sûre.

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La Maison de l’Europe de Paris organise en partenariat avec Kantar Public un cycle de conférences sur le Parlement européen en vue des élections européennes 2019. Celui-ci a débuté par la conférence du 29 novembre dernier, d’où ont été récoltées les citations de cet article, et se poursuivra jusqu’en mai 2019.

(Centre d’Information Europe Direct de la Maison de l’Europe de Paris)

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