Le pape invite à la prudence sur l'"interprétation" du rapport Sauvé en France
Le pape François a invité lundi à la prudence quant à "l'interprétation" du rapport Sauvé sur la pédocriminalité dans l'Eglise de France, mettant en garde contre le mélange de "situations historiques" éloignées dans le temps.
Ces propos interviennent quelques jours après la remise en question des conclusions de la commission sur la pédocriminalité dans l'Eglise (Ciase) par des intellectuels catholiques, des critiques rejetées par son président Jean-Marc Sauvé et le chef de l'épiscopat, Eric de Moulins-Beaufort.
"Quand on fait ce genre d'étude, on doit être attentif à l'interprétation que l'on en fait", a déclaré le pape aux journalistes lors d'une conférence de presse dans l'avion le ramenant d'Athènes.
"Lorsque vous réalisez une étude sur une période aussi longue, vous risquez de confondre la façon de voir le problème il y a 70 ans avec la façon de le voir maintenant", a poursuivi le souverain pontife de 84 ans.
Interrogé sur le rapport de la Ciase, qui a créé une déflagration dans l'institution et ouvert la voie à des réparations pour les victimes, le pontife argentin a reconnu ne "pas l'avoir lu" et ne pas avoir eu "connaissance des commentaires des évêques français".
Pour François Devaux, cofondateur de l'association La parole libérée, à l'origine des affaires Preynat et Barbarin, aujourd'hui dissoute, les propos du pape relèvent "de l'ignorance, de la bêtise et du déni".
- "Manque de discernement" -
"La commission Sauvé a fait un travail pendant trois ans, et cela ne l'intéresse pas!". "Au moment où les choses sont en train d'aboutir, il balaie ça d'un revers de la main (...) C'est affligeant", a-t-il réagi auprès de l'AFP.
Selon M. Devaux, "il y a un grave manque de discernement (du souverain pontife, ndlr) et aucune volonté de se confronter à la réalité". "Ca va permettre à tous de comprendre: le pape, c'est le coeur du problème", a-t-il tranché.
Début octobre, François avait exprimé sa "honte" après les révélations choc de la Ciase, qui a estimé à 330.000 le nombre de personnes de plus de 18 ans ayant fait l'objet de violences sexuelles en France depuis 1950, quand elles étaient mineures, de la part de clercs, religieux ou personnes en lien avec l'Eglise.
La commission a également pointé "un ensemble de négligences, de défaillances, le silence et une couverture institutionnelle qui ont présenté un caractère systémique", des conclusions face auxquelles l'épiscopat et les congrégations religieuses ont dit leur "honte absolue" et leur "effroi".
Une partie des 22 membres de la Ciase devaient être reçus le 9 décembre au Vatican, mais la rencontre a été reportée sine die.
Interrogé par la presse, le pape est par ailleurs revenu sur la démission de Mgr Michel Aupetit, estimant que la réputation de l'archevêque de Paris avait été salie par "les commérages", l'empêchant ainsi de "gouverner".
"Quand la rumeur grandit, grandit, grandit et atteint la réputation d'un homme, celui-ci ne peut plus gouverner (...) Et c'est une injustice. C'est pourquoi j’ai accepté la démission de Mgr Aupetit, non pas sur l’autel de la vérité mais sur l'autel de l'hypocrisie", a-t-il expliqué.
Il a cependant évoqué "un manquement" de la part de Mgr Aupetit "au sixième commandement" ("Tu ne commettras pas d'adultère", ndlr), "pas total mais des petites caresses et des massages qu'il faisait à sa secrétaire".
Jeudi, le Vatican avait annoncé que le pape avait accepté la démission du prélat de 70 ans, qui avait été accusé, dans la presse, d'avoir entretenu une relation intime avec une femme, ce qu'il a catégoriquement démenti.
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