Remaniement en Russie : Vladimir Poutine nomme un économiste à la tête de la Défense, Sergueï Choïgou hérite du Conseil de sécurité
Un brin de changement dans le gouvernement russe. Le ministre Sergueï Choïgou quitte la Défense lors d'un remaniement inattendu, mené par Vladimir Poutine quelques jours après son investiture pour un cinquième mandat non consécutif. Un économiste de formation, l’ex-vice-président du gouvernement depuis 2020, Andreï Belooussov, le remplace en pleine offensive russe sur le front ukrainien, deux ans après le début du conflit. Sa nomination, justifie le Kremlin, devrait apporter de “l’innovation” et de la “compétitivité économique” dans l’industrie de la défense.
Sergueï Choïgou occupait le poste de ministre de la Défense depuis 2012. Il était ainsi à la tête de l’armée russe lors de l’invasion de la Crimée puis, huit ans plus tard, le début de la guerre en Ukraine. Son départ était vivement réclamé par l’ancien chef de Wagner, Evgueni Prigogine, mort l’été dernier dans le crash d'un avion d'affaires allant de Moscou à Saint-Pétersbourg.
Un économiste à la tête de l’armée russe
Malgré une série de défaites en Ukraine, le chef du Kremlin a décidé de lui maintenir sa confiance. Mais ce dimanche 13 mai, après 14 ans à la tête de l’armée russe, Sergueï Choïgou a été relevé de ses fonctions. Il a été remplacé par Andreï Belooussov, un économiste de formation qui était jusque-là Premier vice-président du gouvernement depuis l’épidémie de COVID, en 2020.
Tout au long de sa carrière, il a plus été proche de l’Académie russe des sciences que des académies militaires. Entre 2000 et 2006, Andreï Belooussov est conseiller auprès du Premier ministre puis devant, jusqu’à 2008, sous-ministre du Développement économique et du Commerce. Il devient directeur des finances et de l’économie au cabinet du Premier ministre russe jusqu’à 2012, année à laquelle il est nommé ministre du Développement économique au cabinet dirigé par Dmitri Medvedev.
De 2013 à 2020, il est nommé assistant présidentiel aux affaires économiques. Son profil tout comme le timing de sa nomination à la tête de la Défense peut étonner plus d’un, considérant, outre sa carrière loin des casernes, les dernières percées de l’armée russe sur le front ukrainien sous son prédécesseur. Ce dernier, qui affichait avec Sergueï Lavrov, chef maintenu de la diplomatie russe, l’une des meilleures longévités, n’est pas appelé à la retraite mais devient secrétaire du Conseil de sécurité.
"Choïgou continuera à travailler dans ce domaine, qu’il connaît bien, qu’il connaît très bien de l’intérieur, avec ses collègues et ses partenaires sur son ancien lieu de travail", a expliqué le porte-parole de la présidence russe, Dmitri Peskov.
Le Conseil de sécurité était jusque-là dirigé par un certain Nikolaï Patrouchev, ancien patron du FSB sous les deux premiers mandats de Poutine, démis de ses fonctions selon un décret publié par le Kremlin, mais dont le futur rôle “lui sera communiqué dans les prochains jours”.
Le Kremlin “s’ouvre à l’innovation” pour “remporter la guerre”
Dmitri Peskov explique ces choix par un “besoin venant du front”, après plus de deux ans de combats en Ukraine. “Aujourd'hui, sur le champ de bataille, celui qui l'emporte, c'est celui qui est le plus ouvert à l'innovation", résume-t-il.
Son chef, Vladimir Poutine, appelait depuis des mois, au même rythme que les pays européens, à “l’innovation” dans l’industrie de la défense, pour produire de plus grandes quantités d’armes et de munitions. "Le ministère de la Défense doit être absolument ouvert à l’innovation, à l’introduction de toutes les idées avancées, à la création des conditions de la compétitivité économique", poursuit le porte-parole du gouvernement.
Ce remaniement, qui doit encore être validé par les représentants de la Douma d’État et du Conseil de la Fédération, c’est-à-dire les deux chambres du Parlement, intervient au moment où l'armée russe maintient son avancée sur le front, particulièrement dans les régions de Kharkiv et du Donbass.
Quant au chef d’état-major, Valéri Guerassimov, il conserve sa mission, c’est-à-dire le commandant sur le terrain, “sans qu’Andreï Belooussov n’empiète sur ses fonctions”, affirme encore Dmitri Peskov.
Le départ de Sergueï Choïgou a fait réagir le ministre de la Défense Britannique Grant Shapps. Il accuse le désormais ex-ministre de la Défense d’être responsable de "plus de 355 000 victimes", des morts et des blessés, "parmi ses propres soldats". "Moscou a besoin d’un ministre de la Défense capable (...) de mettre fin à l’invasion, mais tout ce qu’elle obtiendra, c’est une autre marionnette de Poutine", a-t-il ajouté dans un post sur X.
Toutefois, aux yeux de nombreux observateurs, cette quête “d’innovation” est surtout l’expression par Vladimir Poutine de sa détermination à mener une guerre plus longue ...
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