Crise au Moyen-Orient : l’Egypte craint des répercussions sur son économie
ECONOMIE - Alors que les violences font rage entre Israël et le Hamas à Gaza, l'activité touristique en Égypte subit de plein fouet les répercussions du conflit. Reportage entre Louxor et Hurghada, où les sites archéologiques prestigieux et les stations balnéaires sur la mer Rouge craignent de dures répercussions.
Dimanche 22 octobre, un char israélien a accidentellement touché une position égyptienne à la frontière, a reconnu l'armée israélienne. Le Caire a fait état de“blessures” mineures.
Dans le même temps, dix-sept camions d'aide humanitaire ont été autorisés à traverser le terminal égyptien de Rafah en direction de la bande de Gaza, point de la frontière d'où arrivent habituellement de nombreuses marchandises en territoire palestinien. Un deuxième convoi en deux jours depuis le début de la guerre entre Israël et le Hamas.
Quant au déplacement des Palestiniens vers l’Egypte, évoqué par les Israéliens, le président égyptien Abdel Fattah al-Sissi a déclaré :“Obliger les Palestiniens à émigrer vers l’Egypte est inacceptable”.
Une situation qui n’est pas nouvelle pour l’Egypte qui, depuis la création d’Israël, a toujours subi les guerres et les crises.
Aujourd’hui, c’est donc tout le secteur touristique égyptien, moteur de l’économie du pays, qui fait face à de nouveaux défis à la suite du conflit entre Israël et le Hamas à Gaza.
L’Égypte est une des nations qui attirent le plus de visiteurs au monde. Si le Covid avait fait baisser de 70 % ces chiffres, l’Égypte est un des pays qui a connu la plus grande relance post-pandémie.
11,7 millions de touristes en 2022
Le pays a enregistré 11,7 millions d’arrivées l’an dernier et espérait quasiment doubler ce chiffre en 2023, mais les combats des dernières semaines chamboulent les prévisions. Le Quai d’Orsay a prévenu les ressortissants français qui sont actuellement présents dans le pays de faire preuve de la plus grande vigilance et de se tenir absolument à l'écart de toute manifestation ou rassemblement...
Côté égyptien, on tente de dédramatiser. Les autorités assurent que la situation est sous contrôle et que les touristes sont en sécurité dans les stations balnéaires, éloignées de la zone des affrontements. Mais le climat d’insécurité risque de dissuader bon nombre de visiteurs. Alors qu’Israël se prépare à une offensive terrestre, un policier a tué deux touristes israéliens et leur guide égyptien début octobre, à Alexandrie.
Hurghada, station phare sur la mer Rouge, pourrait être particulièrement affectée. Près de 40% des touristes qui la visitent sont des Israéliens. Or, le conflit a provoqué une forte augmentation des tensions intercommunautaires en Égypte.
La cité balnéaire huppée voisine d’El Gouna, qui avait déjà reculé les dates de la sixième édition de son festival de cinéma, vient de décider son report. Ce qui n’arrange pas les affaires de Didier, l’un des propriétaires belges de la chaîne d’hôtel Three Corners dont l’emblématique Ocean View qui donne sur la marina d’El Gouna. “C’est normal de décaler, par sécurité, vu la situation, mais de ce côté de la mer Rouge, nous sommes moins touchés.”
Une sacrée baisse de fréquentation
Au Sahara Park, un centre d’attraction dans le désert, entre excursion en 4/4, balade à dos de dromadaire ou encore quad et dîner-spectacle, les bédouins qui vivent de cet afflux de tourisme ne cachent pas leur peur de perdre leur gagne-pain comme Ahmed, 45 ans père de deux enfants, qui constate déjà une “sacrée baisse de fréquentation”.
Laila, guide touristique, se veut philosophe : “Nous sommes trop loin des lieux d’affrontement. Mais je n’aime pas ce climat anxiogène, ça me rappelle l’attentat de Charm el-Cheikh (un avion de tourisme abattu en 2005 avait fait 88 victimes). Je travaillais sur place à l’époque et j’avais accompagné une famille à l’aéroport qui m’avait salué chaleureusement avant de périr en plein vol. Je ne veux plus vivre pareil cauchemar.”
Un climat anxiogène cause de reports et annulations
A Louxor, où les touristes se pressent pour venir admirer les vestiges de 4600 ans d’histoire, les convois de bus se succèdent, arrêtés à intervalles réguliers par des checkpoints policiers. Un corridor touristique très surveillé dont le dispositif sécuritaire a été renforcé ces derniers jours. Ici, beaucoup de touristes européens, russes et américains continuent à venir découvrir les sites de Carnac ou de la vallée des Rois. “Beaucoup moins que d’habitude”, constate toutefois le jeune Ahmed, vendeur de souvenirs.
Si sur place, nous n’avons pas eu de craintes particulières, dix jours après les attaques du Hamas en Israël, la situation reste très tendue dans la région. De plus en plus de touristes s'interrogent et souhaitent reporter ou annuler leurs voyages non seulement en Israël, mais aussi en Égypte et en Jordanie. Au moment où l'Égypte compte sur le tourisme pour relancer son économie, cette nouvelle flambée de violence complique la donne et il faudra du temps avant que les touristes étrangers reviennent en confiance, un coup dur de plus pour l’industrie touristique égyptienne.
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