Les e-mails en dehors des heures de travail sont un danger pour la santé mentale et physique
Le recours massif au télétravail a aboli les barrières entre vie professionnelle et vie personnelle, et de nombreux salariés doivent envoyer et répondre à des e-mails en dehors de leurs heures de travail. Amy Zadow, chercheur en psychologie organisationnelle à l'Université d'Australie-Méridionale a mené une recherche pour connaître l’impact psychologique que cette habitude peut avoir. Sans surprise, l'étude montre que cette pratique, qui est parfois justifiée par la volonté d’être professionnel, n'est pas aussi inoffensive qu’elle paraît.
Patrons et collègues, sources de pression psychologique hors des horaires de travail
Cette nouvelle étude a interrogé plus de 2 200 employés, universitaires et professionnels dans 40 universités australiennes de juin à novembre 2020. Les chercheurs ont constaté des niveaux de stress élevés, avec une quantité importante de communications en dehors des heures de travail. 55% des personnes interrogées envoient des emails à des collègues le soir et 30 % le week-end, tout en attendant une réponse le jour même. Le constat est que 70,4 % des professionnels ayant des superviseurs qui s’attendent à des communications en dehors des horaires du travail manifestent de la détresse psychologique, et 63,5 % de l'épuisement émotionnel. 22,1 % d’entre eux ont également signalé des problèmes de santé physique, tels que des maux de tête et des maux de dos. Le stress généré par ces communications ne vient pas seulement de la pression des supérieurs hiérarchiques. Les groupes d'employés qui estiment devoir répondre aux messages de travail de collègues en dehors des heures de travail ont également signalé des niveaux plus élevés de détresse psychologique. 31 % des employés ont signalé un trouble psychologique modéré ou sévère, et 62 % ont déclaré qu'ils pensaient que le « climat de sécurité psychosociale » - de leur lieu de travail - le degré auquel il protégeait leur santé psychologique - était « mauvais ».
Des problèmes de santé liés au manque de déconnexion
Être dans un état constant d'hyper-vigilance peut affecter le métabolisme et l'immunité, ce qui expose davantage aux infections, à l'hypertension artérielle et à la dépression. Des recherches récentes de l'Organisation mondiale de la santé et de l'Organisation internationale du travail suggèrent que les heures supplémentaires peuvent même augmenter le risque de maladie cardiaque et d'accident vasculaire cérébral. Travailler en dehors des horaires du travail réduit également le temps consacré aux activités de récupération telles que les interactions sociales, l'exercice physique et le temps passé dans un environnement naturel, des activités essentielles pour préserver la santé physique et surtout psychologique. L'intrusion du travail dans la vie familiale peut également nuire aux relations familiales et aux soutiens communautaires, comme le bénévolat.
Le « droit à la déconnexion », un cadre pour limiter les dégâts d’une culture du travail sous tension
En France, les télétravailleurs sont protégés par le droit à la déconnexion et par la durée légale du travail. Cependant la loi ne propose pas de définition de la déconnexion, ni de mesures concrètes pour assurer l’effectivité de ce droit, ce qui rend la protection du salarié inefficace dans plusieurs circonstances. Pour une autre experte de la santé psychologique dans le milieu du travail, Maureen Dollard, le problème des e-mails et les messages en dehors des heures de travail reflète des problèmes de société plus larges, liés aux pressions de la productivité, de l'insécurité de l'emploi et de la diminution des ressources au travail.
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