Le recyclage du plastique est un grand écran de fumée
Autrefois symbole de progrès, le plastique est devenu l’incarnation de notre société du jetable. Avec près de 400 millions de tonnes produites chaque année, il est aujourd'hui dans tous nos objets, mais aussi partout dans l'environnement, et notre corps. Et notre bonne idée, c'est de le recycler.
L'enfer est pavé de bonnes intentions, comme qui dirait, mais recycler un cycle qui n'est pas bon, ce n'est pas une bonne idée... Nous savons depuis un moment déjà que le plastique est polluant, qu'il n'est pas biodégradable, et qu'il s'immisce dans la biodiversité - nous compris - sous forme de microplastique.
Pour limiter sa production, nous avons décidé de le recycler. Résultat, comme l'explique Nathalie Gontard, chercheuse à l’Inrae : moins de 2 % des plastiques sont recyclés en circuit fermé pour retrouver leurs propriétés d’origine. La majorité finit en "décyclage", transformée en objets moins qualitatifs comme des pulls ou des pots de fleurs.
Flore Berlingen, autrice de Recyclage, le grand enfumage - Comment l'économie circulaire est devenue l'alibi du jetable, déplore que derrière cette "illusion verte" se cache une dynamique qui favorise toujours plus de consommation. "Les industriels surfent sur l’argument marketing pour maintenir des productions jetables", dénonce-t-elle. Résultat : le consommateur est bercé par l’idée que consommer du plastique recyclé est une solution, quand en réalité il continue d’alimenter un cycle polluant. Et ce dernier est évidemment défendu corps et âme par les lobbies industriels, qui freinent les réglementations plus ambitieuses. C'est ce qu'on a vu lors du dernier sommet antipollution qui s'est tenu fin novembre en Corée du Sud.
En Europe aussi, plutôt que de prendre des grandes décisions, on choisit d'attacher le bouchon à la bouteille, encore une fois pour rassurer les consommateurs en assurant qu'ils peuvent consommer sans s'inquiéter de polluer. Comme le rapporte le sénateur Alain Houpert sur X, entre 3 et 9 milliards d'euros ont été dépensés en R&D par l'Union européenne pour arriver à cette brillante idée, révélatrice d'une technocratie déconnectée des enjeux réels.
Fabienne Lagarde, chercheuse à l’Institut des molécules et matériaux du Mans, explique que "les grandes problématiques environnementales, telles que le changement climatique, la perte de biodiversité ou la pollution par les plastiques, ne peuvent être abordées que de manière globale". Selon elle, "l'Homme de 2024 contient du plastique", et elle prédit que ce sera encore pire à l'avenir si aucune décision globale n'est prise rapidement.
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