Abandons d'animaux : tout savoir sur ce fléau, les sanctions et sur le travail des refuges
A chaque période estivale, se pose le problème des abandons des animaux. Au total, selon la Fondation 30 millions d'amis, 100.000 animaux seraient laissés chaque année par leur maître ou maîtresse, une pratique qui est en soi un délit. Sont concernés: l'animal domestique, apprivoisé ou tenu en captivité[1].
Les animaux de compagnie[2], faisant partie des animaux domestiques, ne sont donc pas les seuls à souffrir de ce fléau. Néanmoins, ils sont les plus abandonnés. Les associations de protection des animaux font un travail colossal. Des vidéos[3] très émouvantes circulent sur les réseaux sociaux afin notamment de prévenir les abandons. Par ailleurs, un animal abandonné devient, par la force des choses, errant et finira en fourrière pour y être euthanasié s'il ne trouve pas une nouvelle maison.
Les animaux de compagnie peuvent être abandonnés dans un refuge[4], et aucune sanction ne sera alors infligée aux personnes agissant de la sorte dans la mesure où seules celles qui abandonnent leur animal de compagnie sur la voie publique sont concernées par l'infraction du délit d'abandon. Cependant, une certaine pression pèse sur les associations de protection des animaux lorsqu'un animal est abandonné dans leur refuge. En effet, elles sont tiraillées entre le fait d'accepter un nouvel arrivant et le nombre maximal à ne pas dépasser. Elles savent qu'un animal refusé sera un futur errant… Mais il leur est impossible de le signaler aux autorités et sont ainsi démunies face à ce problème grandissant.
Les personnes souhaitant procéder à l’abandon de leur animal au sein d’un refuge doivent remplir et signer un document d’abandon, qui les exonérera de leur responsabilité à l’égard de l’animal. Ce document est assimilé à un acte de renonciation au droit de propriété mais permet surtout de donner plusieurs renseignements sur l’animal afin que l’association puisse le prendre en charge de façon adaptée et le proposer à l’adoption de façon éclairée. Ainsi, il conviendrait mieux de parler d’une cession de propriété de l’animal à l’association qui l’accueille que d’un abandon au sens délictuel, laissant l’animal livré à lui-même.
L'article 521-1 du code pénal[5] dispose en son 1er alinéa que "Le fait, publiquement ou non, d'exercer des sévices graves, ou de nature sexuelle, ou de commettre un acte de cruauté envers un animal domestique, ou apprivoisé, ou tenu en captivité, est puni de deux ans d'emprisonnement et de 30.000 euros d'amende". Il faut attendre le 9e alinéa pour que soit abordé le problème de l'abandon. Ce dernier dispose qu'"Est également puni des mêmes peines l'abandon d'un animal domestique, apprivoisé ou tenu en captivité, à l'exception des animaux destinés au repeuplement". Ainsi, l'accent est mis sur le fait que l'infraction est constituée même en l'absence de sévices ou d'actes de cruauté accomplis volontairement avec l'objectif de provoquer la souffrance ou la mort de l'animal. A titre d’exemple, le fait de laisser des animaux dans un pré sans nourriture ni abreuvement est constitutif d’infraction au sens de l’article[6]. Un parallèle peut être fait avec les personnes qui laissent leur animal dans une voiture par 40°; la question se pose de savoir si cet oubli ne peut pas relever d'un acte involontaire d'abandon?
Dans la mesure où "le regard suppliant des chiens abandonnés n'est peut-être pas moins poignant que la vue d'animaux coiffés d'électrodes[7]", il serait temps d'aller plus loin dans la protection des animaux. Un éclaircissement sur le sens juridique du mot "abandon" serait un bon commencement pour ensuite procéder au régime juridique adapté, avec notamment la prise en compte par le droit des caractères vivant et sensible des animaux. La consécration juridique des animaux comme des "êtres vivants doués de sensibilité[8]" devrait justifier la possibilité d’aller plus loin à titre de sanction. Par exemple, il pourrait être envisagé l’interdiction de reprendre un animal lorsqu’on a été auteur d’infraction d’abandon auparavant.
L’idéal serait surtout d’agir en amont et à titre préventif en luttant contre les abandons comme l'a préconisé le Parti animaliste lors des législatives. Il propose "d'encadrer strictement l’abandon licite auprès d’un refuge; de rendre obligatoire la stérilisation des animaux de compagnie abandonnés pour les refuges et des animaux errants pour les collectivités; d' inciter les propriétaires à stériliser leurs animaux via des crédits d’impôts; de renforcer les aides d’Etat aux refuges, créer des refuges publics en remplacement des fourrières et d'interdire la mise à mort d’animaux dans les refuges en dehors de l’euthanasie à des fins de soulagement de l’animal[9]".
Les abandons d’animaux n’ont malheureusement pas fini de faire parler d’eux et c’est pourquoi le droit doit poursuivre son évolution à des fins d’éradication de ces problèmes.
[1] Pour des exemples jurisprudentiels d'abandon d'animaux captifs, cf. Cour d'appel de Rennes, 24 avril 2014, Cour d'appel Chambéry, 5 février 2014 abandon d'un animal captif. Revue Semestrielle de Droit Animalier 1/2014 p. 182 http://www.unilim.fr/omij/files/2014/11/RSDA-1-2014.pdf
[2] Selon l'article L. 214-6 I du code rural et de la pêche maritime "On entend par animal de compagnie tout animal détenu ou destiné à être détenu par l'homme pour son agrément".
[3]La nouvelle campagne de la Fondation 30 millions d'amis est effectivement saisissante: http://www.30millionsdamis.fr/la-fondation/nos-campagnes/lhistoire/video/index.php?from=WAZ&utm_source=zoomhp&utm_medium=LP1&utm_campaign=ABANDON2017
La campagne de la SPA l'est également: http://action.la-spa.fr/pasdepretexte?reserved_code_media=W17PB0ZZH#video-header
[4] Selon l'article L.214-6 II du code rural et de la pêche maritime "On entend par refuge un établissement à but non lucratif géré par une fondation ou une association de protection des animaux désignée à cet effet par le préfet, accueillant et prenant en charge des animaux soit en provenance d'une fourrière à l'issue des délais de garde fixés aux articles L. 211-24 et L. 211-25, soit donnés par leur propriétaire".
[5] https://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do?idArticle=LEGIARTI000006418952&cidTexte=LEGITEXT000006070719
[6]Crim. 16 juin 2015, n°14-86.387
[7] Jean-Pierre Marguénaud, L'animal en droit privé. Publications de la faculté de droit et des sciences économiques de Limoges. Presses Universitaires de France. 1992 p. 345
[8] Article 515-14 du code civil: https://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do?cidTexte=LEGITEXT000006070721&idArticle=LEGIARTI000030250342
[9] https://parti-animaliste.fr/animaux-de-compagnie/
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