Pédophilie : cinq ans de prison requis contre un prêtre jésuite adepte des "massages sensuels"
Cinq ans de prison, dont deux ferme, ont été requis mercredi 7 à l'encontre du Père Dominique Peccoud, 70 ans, jugé en appel à Grenoble pour atteintes sexuelles sur mineurs, mais qui n'a reconnu que des "massages sensuels". La cour a mis sa décision en délibéré au 19 octobre.
"Je n'ai jamais voulu avoir de contacts sexuels avec ces enfants. Ils me mettaient sur un piédestal, ils n'arrivaient plus à m'aborder avec la moindre simplicité. J'attendais (de ces massages) qu'on puisse avoir des relations plus simples", a déclaré à la barre le jésuite, ancien conseiller du directeur général du Bureau International du Travail (BIT) de 1996 à 2007.
Après de premières accusations contre lui, le religieux avait été contraint de se dénoncer, sur pression de sa hiérarchie, dans une lettre adressée au parquet en avril 2008. Il a été condamné à deux ans de prison avec sursis par le tribunal correctionnel de Grenoble, en avril 2015, pour des atteintes sexuelles sur trois mineurs. Le parquet, qui avait déjà requis cinq ans de prison dont deux ans ferme, a fait appel.
Mercredi, l'avocate générale a requis la même peine qu'en première instance assortie d'une interdiction définitive d'exercer une activité en contact avec des mineurs.
"Caresser les testicules d'un enfant qu'on a baptisé, je ne pense pas qu'on vous l'enseigne dans vos pratiques religieuses", a relevé la magistrate, critiquant les réponses "pitoyables" du prévenu qui "accuse et dénigre les victimes".
Au total, les cas d'une dizaine d'adolescents de familles aisées ont été évoqués devant la cour d'appel de Grenoble. Il lui est essentiellement reproché des caresses, des attouchements, des massages sur des adolescents dont il partageait souvent le lit, nu, à l'occasion de vacances.
Les faits se sont déroulés sur une longue période dans une maison spirituelle dans le Morbihan, une villa à Salon-de-Provence (Bouches-du-Rhône), une maison avec sauna à Londres ou un chalet à Morzine (Haute-Savoie).
Le prêtre, doté d'un fort ascendant sur les enfants, leur proposait des massages après le ski ou le tennis, et en profitait pour leur toucher les parties génitales, selon les victimes.
"Vous avez une compétence particulière pour effectuer ces massages?", lui a demandé une magistrate de la cour devant la répétition des faits. "Cette pratique du massage, je ne pense pas qu'elle vienne des jésuites. Y a-t-il des gens que vous n'ayez pas massé?", s'est étonné un autre.
Disant avoir "été éduqué en dehors de toute pudeur", le prêtre a seulement reconnu des "comportements décalés" et affirmé que sa lettre d'aveux avait été écrite "sous la contrainte" et ses propos déformés par son ancien avocat. Hétérosexuel "à fond", il a assuré n'avoir "jamais été attiré sexuellement par ces garçons".
Aucune victime ne s'est portée partie civile au procès. Mais les débats ont longuement porté sur les accusations du neveu de M. Peccoud, Paul Chabre, 45 ans, qui accuse son oncle de multiples viols et agressions sexuelles dans les années 80 et 90. Ces faits sont toutefois prescrits.
Le prévenu s'est défendu avec beaucoup d'assurance en évoquant les "fantasmes" et les "allégations" de son neveu qui ne sont "pas de l'ordre du réel". Son avocat, Me Denis Dreyfus, a plaidé la relaxe.
Ancien directeur des études de l'école Sainte-Geneviève de Versailles (1975-1982) et ancien directeur de l'école supérieure d'agriculture de Purpan à Toulouse (1982-1990), Dominique Peccoud est retraité à Grenoble depuis 2008 où il a rejoint une communauté jésuite.
Début septembre, la province de France de la Compagnie de Jésus a renforcé la lutte contre les abus sexuels en précisant les règles à observer dans un "document d'orientation" de 13 pages à l'intention de ses membres.
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