Féminicides en Europe : des chiffres disparates, une réalité commune
CRIMINALITÉ - Les féminicides ont une fois de plus défrayé la chronique cet été en Europe. Cependant, à l'exception de quelques pays tels que la France ou l'Espagne, la plupart des États membres de l'Union européenne ne possèdent pas de données officielles exhaustives sur ce sujet, voire n'en ont pas du tout.
Les données sur la violence envers les femmes au sein de l'Union européenne (UE) proviennent des informations recueillies par l'EIGE (Institut européen pour l'égalité entre les hommes et les femmes). Celles-ci ne sont pas toujours récentes au sujet de cette problématique pourtant cruciale : le dernier rapport public date de 2020.
Même si la plupart des pays sont à l'unisson contre les violences sexistes, la collecte de données par chacun d'entre eux est loin d'être homogène, comparable ou actualisée. Une enquête menée par l'organisation grecque MIIR (Mediterranean Institute for Investigative Reporting), en collaboration avec 17 autres médias européens appartenant au réseau EDJnet (European Data Journalism), a tenté de créer une carte actualisée de la violence à l'égard des femmes en Europe. Eurostat a enregistré 6.593 homicides intentionnels de femmes entre 2011 et 2021 dans 20 pays européens, dont 4.208 ont été perpétrés par leurs partenaires et 2.385 par des membres de la famille.
Il convient de préciser que ces chiffres sont principalement des estimations, car tous les pays ne tiennent pas (et continuent de ne pas tenir) un décompte précis des victimes, et leurs méthodes de comptabilisation varient. Malgré cela, les quelques chiffres existants montrent l'urgence : au moins 50 femmes sont tuées sous la violence de leur conjoint chaque semaine dans l'UE.
Été meurtrier en Espagne
Depuis l'année dernière, l'Espagne considère comme féminicides tous les meurtres impliquant une dimension liée au genre, et cela inclut désormais non seulement les meurtres commis par des partenaires ou des ex-partenaires.
Malgré l'augmentation des ressources consacrées à la prévention, le pays a été témoin de la période estivale la plus tragique en matière de violences faites aux femmes depuis cinq ans, avec un pic alarmant du nombre de crimes enregistrés au cours du mois d'août.
Au 31 août, 40 femmes ont été tuées par des hommes en Espagne en 2023, soit 10 de plus qu'en 2022 à ce stade de l'année. 45 mineurs sont devenus orphelins. Sur l'ensemble de ces personnes, seules neuf avaient déjà porté plainte contre leurs agresseurs. Au total, 1.224 femmes ont été tuées par la violence de genre depuis le début des enregistrements en 2003. Avec 15 victimes, cet été est le pire depuis 2018.
Tous les trois jours, une femme est victime d'un féminicide en France
En France, le ministère de l'intérieur a publié samedi 2 septembre le bilan des "morts violentes au sein des couples". Au total, 118 femmes ont été tuées en 2022 par leur conjoint ou ex-conjoint, soit quatre de moins qu'en 2021.
Selon cette étude, 145 morts violentes au sein du couple ont été enregistrées en 2022, dont 118 femmes et 27 hommes (+6 par rapport à 2021), soit un total quasiment identique à celui de l'année précédente (143).
En moyenne, un féminicide a lieu tous les trois jours en France.
Le 22 février 2023, le Conseil européen a pris une décision historique en décidant que l'Union européenne devrait adhérer à la Convention d'Istanbul en tant qu'entité transnationale. Cette résolution faisait suite à l'accord du Parlement européen, qui avait précédemment demandé l'inclusion de la violence à l'égard des femmes dans la liste des crimes reconnus au sein de l'UE.
Entrée en vigueur en 2014, la Convention d'Istanbul représente le premier texte international légalement contraignant établissant des critères pour la prévention de la violence basée sur le genre, et elle pourrait fournir un cadre directeur pour les futures initiatives à Bruxelles.
Toutefois, en l'absence d'un système européen unifié de collecte de données, d'une protection renforcée des victimes, d'une application stricte de la loi et d'un renforcement des sanctions, la violence fondée sur le sexe persistera et s'aggravera.
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