Nouveau bras de fer entre Airbnb et la ville de Paris
Airbnb, accusé de concurrence déloyale par les hôteliers, a proposé de limiter "automatiquement" sur sa plateforme la location d'une résidence principale à 120 nuits par an à Paris, à la place d'une procédure voulue par la mairie, qui a accueilli sèchement cette annonce.
La société américaine a indiqué mardi avoir proposé en décembre à la capitale de mettre en place "des limites automatisées" pour s'assurer que certains biens proposés sur Airbnb ne soient pas louées plus de 120 nuits par an, "sauf si les hôtes ont la permission requise pour le faire".
La loi Alur, adoptée en 2014, stipule déjà qu'un particulier ne puisse pas louer sa résidence principale au-delà de cette durée. La nouveauté viendrait du blocage automatique de la location sur le site.
En outre, la loi pour une république numérique adoptée en octobre 2016, a renforcé les obligations imputables aux loueurs comme aux intermédiaires.
Le texte impose notamment aux personnes souhaitant louer leur résidence dans certaines villes comme Paris de s'enregistrer auprès de la mairie, et aux plateformes de veiller à ce que le logement proposé, s'il s'agit d'une résidence principale, ne soit pas loué plus de 120 jours par an.
Mais les décrets d'application n'ont pas encore été publiés.
- "Opération de communication" -
Pour Airbnb, sa proposition vise à "continuer à promouvoir des pratiques responsables qui s'inscrivent dans la durée" et "fait suite à l'introduction d'initiatives similaires à Londres et à Amsterdam", a expliqué le directeur général d'Airbnb France, Emmanuel Marill.
Le site a en effet annoncé en décembre avoir limité automatiquement la durée de location des logements dans ces villes à respectivement 90 et 60 jours.
Si en France les hôtes ont des autorisations pour louer davantage que 120 nuitées pour des raisons soit professionnelles (par exemple, une mutation) ou de santé, ou parce qu'ils ont un bail touristique, ils pourront dépasser cette limite "en déclarant sur l'honneur disposer des autorisations pour le faire, et donc être prêts à voir leur données transmises éventuellement à la mairie pour faciliter ses contrôles", a précisé Airbnb.
Le site présente cette initiative comme une "alternative" à l'enregistrement souhaité par la ville de Paris.
"Il n'est pas question pour nous d'abandonner la mise en place du numéro d'enregistrement", a toutefois indiqué mardi à l'AFP l'adjoint PCF au Logement de la maire PS de Paris Anne Hidalgo, Ian Brossat.
"Le décret doit être publié d'ici fin avril et nous avons l'intention de mettre en place cette mesure qui nous permettra de sortir de l'opacité dans laquelle nous sommes aujourd'hui", a-t-il souligné.
La ville multiplie les initiatives pour lutter contre la location meublée touristique illégale, qui se développe dans la capitale au détriment du secteur hôtelier et contribue à une pénurie de logements pour la location non-touristique.
La proposition, "intéressante", d'Airbnb démontre selon lui que "tout le monde s'accorde sur le fait qu'on ne peut pas laisser le système se développer sans régulation".
Roland Héguy, président de la principale organisation des hôteliers et restaurateurs, l'Umih, estime pour sa part que l'annonce du site est "une simple opération de communication" visant à "s'acheter une bonne conduite".
"Il n'y a rien de nouveau" dans la proposition d'Airbnb, a-t-il affirmé à l'AFP. "Les pouvoirs publics ne doivent pas se laisser enfumer par ces déclarations."
Même réserve pour Didier Chenet, président du syndicat patronal GNI: "Airbnb essaie de s'approprier des décisions alors qu'elles sont tout simplement des obligations formulées par la loi", a-t-il commenté auprès de l'AFP. Le gouvernement doit, selon lui, "sortir les décrets d'application (de la loi sur une République numérique) "le plus rapidement possible".
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