« L’adieu interdit » de Marie de Hennezel
Marie de Hennezel, psychologue engagée dans les problématiques de fin de vie, livre dans « L'adieu interdit » son témoignage. Elle a examiné les réalités effrayantes dans le traitement réservé aux personnes âgées en Ehpad pendant le premier confinement. C’est cette expérience qu’elle désire partager avec le lecteur en évaluant les conséquences de cette situation sur notre société.
Cette période, Marie de Hennezel la décrit comme « une fin de notre humanité ». Elle dénonce cette approche de la mort de manière froide et efficace, elle indique que « nos experts scientifiques et nos gouvernants ont commis une faute ». C’est tout son travail sur les soins palliatifs qui a été gommé d’un coup. Mais l’analyse de Marie de Hennezel surmonte cette colère en empruntant une démarche vertueuse, exemplaire. Observant les décisions extrêmes prises par le gouvernement, l’auteure cherche à comprendre afin d’évaluer, dénoncer, mais aussi agir et proposer des solutions pour ne plus revivre cela.
La recherche insistante de la juste compréhension de la situation par l’auteure ne peut se faire qu’en analysant les faits. Et les équilibres sont subtils. Ainsi l’isolement mortifère des résidents d’EHPAD résulte, certes, de règles drastiques mais aussi de la peur-panique des familles qui ne sont pas venues voir leurs proches alors même qu’elles y étaient autorisées. Le tri des patients, qui semble barbare, est éclairé par une autre réalité, celle du pronostic « fonctionnel », c’est-à-dire l’état dans lequel le patient va survivre. Ou encore, les décisions de ne pas accueillir les familles lors des rites funéraires est le fait de décisions du Gouvernement mais également de pressions des sociétés funéraires qui se sont opposées aux assouplissements prévus dans un second temps.
Cette recherche du regard "juste" sur le traitement des personnes âgées et de leurs familles pendant le premier confinement n’empêche pas de dénoncer les situations dramatiques. Certains, notamment parmi les soignants et administratifs en EHPAD, se sont sentis « constamment complices de situations de l’ordre de l’inhumain ». Repousser les familles, engager le « protocole palliatif Covid » ( « endormissement définitif par injection de Rivotril ») par des personnels non médicaux, mettre les défunts eux-mêmes dans les housses mortuaires, ne pas laisser les familles voir une dernière fois leur père ou mère. Toutes ces situations ont généré une grande angoisse et de la violence, les individus se désalignant de leurs valeurs profondes.
Pourtant, l’auteur insiste sur tout ce qui demeure positif dans le cadre de cette crise. Elle met en lumière, par exemple, ceux nombreux qui ont fait un pas de côté, et qui, par leur action individuelle, ont « adouci la cruauté de la situation ». Ce sont des personnes, des associations, des soignants qui, dans les EHPAD et dans les services funéraires ont remis l’humanité sur les rails, guidés par leur éthique. Marie de Hennezel esquisse également des solutions pour l’avenir, celles permettant d’associer par exemple les citoyens aux décisions, ou d‘avoir un « filtre » éthique pour les mesures d’urgence prises dans le cadre sanitaire. « Pour ne plus jamais vivre ça ! »
L’adieu interdit, Pour ne plus jamais vivre ça, Marie de Hennezel, éditions Plon.
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