Covid'en rire : l'humour ne connaît pas la crise sanitaire
Privés de scène, éloignés de leur public, les humoristes ont dû redoubler de créativité, et parfois écrire des sketches plus engagés, il faut dire bien alimentés par le caractère ubuesque de l'actualité.
- Est-ce que vous auriez un vaccin contre le covid s'il vous plaît ?
- LA Covid ! Oui bien sûr j’en ai plein. Regardez, je suis vacciné, j’ai plus de masque ! Alors vous voulez lequel ?
- Attendez mais vous en avez plusieurs ?
- Ah ben y’en a plein ! Mais aucun qui est à 100% par contre. Sputnik 5 est à 92% de réussite.
Ainsi débute "Comment choisir son vaccin anti-covid", une vidéo postée le 18 novembre sur Topito. Depuis le mois de février, ce site de divertissement aux 30 millions de visites par mois écume tous les thèmes de la crise sanitaire sous un angle volontairement satirique. “Dès le début de l’épidémie en Chine, nous nous sommes dit qu’il y avait matière à en rire. Cela nous paraissait si loin…”, explique son co-fondateur, Laurent Moreau. Une gestation plus tard, le sujet est plus que jamais au centre des préoccupations des Français... Et donc des humoristes qui, Covid oblige, ont dû revoir leur manière de travailler. “Au départ, beaucoup de stand-uppers se sont sentis totalement désarmés, se souvient Laurent Moreau. Faire le pitre derrière un écran sans retour de rire, c’est difficile quand on n’a pas l’habitude. Mais certains ont réussi à tirer leur épingle du jeu”. Parmi eux Gérémy Credeville et Marie Reno.
Musicienne de formation, Marie Reno est une humoriste qui chante. Sa première vidéo de l’ère Covid s’intitule logiquement : “Pandemia, la dernière comédie musicale avant la fin du monde” (8 millions de vues). Mais celle qui a la plus cartonné reste une parodie de Louane : “C’était quand le jour 1 du confinement” qui a réuni13 millions de vues !
“J’ai été hyper inspirée par le quotidien qui a changé du jour au lendemain. Sans la covid, je n’aurais pas eu le réflexe de tourner avec mes deux frères avec lesquels j’étais confinée, et mon idée de comédie musicale n’aurait sans doute jamais éclos”, confie cette trentenaire qui officie par ailleurs sur Rire et Chansons.
L’un de ses deux frères, Franjo, est également humoriste. A l’instar de Marie, le virus a boosté sa créativité. Depuis le confinement, il joue tous ses personnages : flic, citoyen, clochard, voisin délateur... Pour le plus grand bonheur de ses fans (Couvre-feu a été visionnée par 12 millions d’Internautes) ! Gérémy Credeville s’est quant à lui démarqué avec des vidéos qui n’auraient probablement pas vu le jour en d’autres circonstances : les aventures de Sandra & Fabien, un couple de Playmobil ! C’est néanmoins sa récente parodie de Francis Cabrel, “Est-ce que ce monde est sérieux” dénonçant pêle-mêle le port du masque des enfants et la fermeture des librairies, qui l’a définitivement consacré : quasiment 5 millions de vues.
“Je ne suis pas un militant. Je ne cherche pas à dire aux gens s’ils doivent ou non aller voter, mais le contexte sanitaire pousse presque malgré soi à écrire des textes plus engagés”, commente ce Lillois également chroniqueur à la radio et à la télévisioN.
Une tendance confirmée par Franjo qui se définit pourtant comme un humoriste de pur divertissement. “J’ai fait ce métier pour amuser le public mais récemment, j’ai commencé à écrire des sketchs qui dénoncent l’absurdité des mesures et mettent en scène mes craintes. Je ne prends pas parti, je cherche juste à tourner en dérision la situation. Le plus terrible, c’est que je n’ai pas besoin de trop me creuser la tête pour que ce soit drôle tant le contexte est absurde”, déplore le jeune homme.
Une position qui diffère de celle d'Ingrid Courrèges, qui reprend également avec succès des classiques avec fantaisie et humour mais dans un registre plus engagé.
Surfant sur la vague épidémique, de nombreux artistes ont tenté avec plus ou moins de succès de sortir de l’anonymat. “Nous avons diffusé énormément de vidéos d’humoristes confirmés ou débutants qui avaient envie que l’on passe leurs créas sur Topito lors du premier confinement. L’important pour nous, c’était que les internautes se marrent, peu importait que la vidéo ait ou non été produite par nos équipes. Les gens avaient particulièrement besoin de nous à ce moment-là”, commente Laurent Moreau.
Ce besoin, Gérémy Crédeville le ressent encore. “Je fais des blagues de 3 minutes dans une journée, ce n’est pas grand-chose et pourtant je constate que ça aide les gens”, témoigne-t-il avant d’ajouter qu’aujourd’hui il se sent un peu plus utile. Même son de cloche chez Marie Reno : “Je n’ai jamais reçu autant de messages de remerciement. Les médias nous matraquent le crâne du matin au soir. J’imagine que les journalistes font leur travail mais ils manquent profondément d’empathie. Notre rôle consiste à provoquer quelques sourires dans toute cette grisaille...”
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