#EntenduALaRédac : sexisme ordinaire, harcèlement et violences sexuelles dans les rédactions
Les violences sexistes et sexuelles sont "massives" dans le milieu du journalisme, selon une enquête, menée par les collectifs Prenons la une, Nous toutes et Paye ton journal, qui pointent des faits graves dans plus de 200 rédactions en France.
Les révélations de la Ligue du Lol ont permis de libérer la parole au sein des rédactions des médias français. Trois associations –Prenons la une, Nous toutes et Paye ton journal– qui luttent contre les violences sexistes et sexuelles ont lancé une enquête participative qui a mis en lumière l'ampleur du phénomène.
Ainsi selon les résultats de l'enquête dévoilée par Le Monde et France info, "67% des femmes ayant répondu affirment avoir été victimes de propos sexistes, 49% de propos à connotation sexuelle et 13% d’agressions sexuelles". "Les femmes victimes de discriminations liées à leur origine réelle ou supposée sont plus souvent victimes de propos à connotation sexuelle que la moyenne des répondant.e.s.", précise l'étude.
Propos rapportées par une participantes à l'enquête: "Tu as oublié ton pantalon ce matin? Tu es maquillée comme une voiture volée? Anissa… Ah non, pardon, Fatima. Je me suis trompé de bougnoule".
Sur les 1.837 réponses recueillies en dix jours, en ligne et sous le couvert de l’anonymat, (dont 271 émanant des écoles de journalisme), 1.500 personnes déclarent avoir été victimes ou témoins d'au moins un agissement sexiste dans le cadre de leur travail. Dans le détail, 199 personnes, dont 188 femmes, déclarent avoir été agressées sexuellement, et deux avoir été violées dans le cadre du travail.
Lire aussi - Plus de 900 journalistes dénoncent une profession rongée par un "sexisme systémique"
Plus inquiétant encore, quand les faits sont dénoncés, 3% des cas, la direction et les RH ne sont pas informées lorsque des violences sexuelles ont lieu dans le cadre du travail, alors que lorsque ces services sont alertés, ils ne prennent aucune sanction dans 66% des cas. Dans 60% des cas d'agression sexuelle comme dans 70% des cas de harcèlement, les rédactions n'ont pas réagi suite au signalement
Pour Aude Lorriaux, journaliste et porte-parole de Prenons la une, "les rédactions doivent se remettre en cause et se demander pourquoi il y a autant de femmes victimes de sexisme ou de harcèlement sexuel qui ne vont pas voir leur direction".
Et ces types de comportements sont déjà présents dès l'école de journalisme à en croire l'étude qui dresse un tableau bien noir des violences sexistes dans ces établissements. Quelque 10 % des étudiantes qui ont témoigné affirment avoir été agressées sexuellement dans le cadre de leurs études ou de leurs stages, 62 % d’entre elles disent avoir été témoins de propos sexistes dans leur école et 28 % de faits de harcèlement sexuel. "Lors d'un stage dans les bureaux d'une chaîne de TV française à l'étranger, un cameraman a profité de l'obscurité de la salle de montage pour passer sa main sous mon tee-shirt", a rapporté une étudiante.
Déjà dans le sillage de l'affaire de la Ligue du Lol, plus de 900 journalistes avait signé fin février signé une tribune dans Le Monde pour dénoncer le "sexisme systémique qui ronge la profession" et appeler les rédactions à "prendre la mesure de la gravité du cyberharcèlement dont sont victimes les femmes journalistes". Les signataires appellaitent les directions des rédactions à une "prise de conscience" et demandent à ce que "la cooptation et l'entre-soi, au bénéfice quasiment exclusif d'une seule partie de la population" ne soient plus "les mécanismes d'embauche obligés des journalistes".
Voir:
Le sexisme, principal levier humoristique dans les médias en France
"Ligue du LOL": des journalistes accusés de harcèlement en ligne notamment sur des jeunes femmes
"Ligue du LOL": après la misogynie, les dérapages homophobes
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