De l'importance d'une réflexion sur le "troisième tour" de l'élection et de son influence sur la présidentielle
EDITO — Au cours de ce quinquennat, la nature monarchique du pouvoir présidentiel a été portée à son paroxysme. Cinq années d’exercice exclusif du pouvoir, dont deux passées sous un état d’urgence permanent. En tout, 1 826 jours lors desquels le peuple n’a jamais pu véritablement influer sur la feuille de route du locataire de l’Élysée, pourtant censé n’être que son simple délégué.
La solution pour restaurer la démocratie, ou du moins sauver ce qu’il en reste, ne devrait-elle donc pas passer par l’affaiblissement de la fonction du président de la République ? Dans ce cas, les législatives qui interviendront juste après l’élection présidentielle pourraient bien s’avérer la solution. Celles-ci constitueraient une sorte de troisième tour imposant à celui ou celle qui sera élu le 24 avril le devoir de composer avec un Parlement qui ne lui est pas acquis.
Dans l’éventualité où Marine Le Pen serait élue, il est fort probable que les législatives conduiront à une telle configuration politique. Jean-Luc Mélenchon, par son score réalisé à l’occasion du premier tour de l’élection présidentielle, s’est bel et bien imposé comme leader de la gauche. Si celui-ci parvient à reproduire cette prouesse lors du « troisième tour », il sera donc très difficile au RN de cohabiter au sein de l’hémicycle avec les députés de la France insoumise. Depuis toujours, M. Mélenchon a fustigé avec véhémence les positions de la patronne du Rassemblement national, récidivant une nouvelle fois avant-hier soir en exhortant ses électeurs à ne « pas donner une seule voix à Le Pen ».
Pourtant, parmi d’autres, les deux adversaires politiques se rejoignent sur une thématique vitale pour les Français : l’opposition aux mesures autoritaires, dites sanitaires. 40 ans de battage médiatique « contre les extrêmes », accompagné d’une ostracisation de quiconque s’affilie de près ou de loin au parti de Marine Le Pen, ont, cependant, instauré un clivage politique factice qui empêche toute alliance politique. C’est pourquoi, au grand désarroi des démocrates avant tout patriotes qui soutiennent Jean-Luc Mélenchon, il n’est pas impossible que cela soit l’une des raisons expliquant que l’insoumis ait manqué de rentrer dans l'histoire en refusant toute union nationale.
Si le chef de file de la France insoumise assure sincèrement qu’il place l’intérêt supérieur de la Nation avant toute autre chose, de par la perméabilité entre la France insoumise et le Rassemblement national sur plusieurs dossiers essentiels, cet acte d’une portée historique ne s’imposait-il pourtant pas à lui ?
Du reste, si Emmanuel Macron est réélu, pourquoi ne pas lui imposer pareille contrainte salvatrice ?
Les sondages annonçant un deuxième tour éminemment serré, le poids de l’abstention sera encore plus important au second tour de l’élection qu’au premier tour. Elle démontre le désintérêt des Français pour cette élection pourtant capitale. Néanmoins, clé de voûte qu’elle est pour que le débat renaisse dans notre pays, il importerait, une fois n’est pas coutume, que l’abstention fût la moindre possible aussi bien le 24 avril que lors des législatives. Et ceci d’autant plus si, pardonnez-moi de devoir insister, sa circoncision à sa partie congrue tend à contraindre le président de la République élu à devoir composer.
Jean-Luc Mélenchon n'ayant pas appelé à mettre dans l’urne le bulletin Emmanuel Macron, ceux de ses électeurs qui suivront sa consigne de ne pas voter pour Marine Le Pen, auront donc le choix entre voter Emmanuel Macron, voter blanc ou ne pas voter. Nonobstant l’aversion qu’éprouvent les mélenchonistes envers le Rassemblement national, il est hautement envisageable qu’ils s'interrogent.
Voter Macron, c'est laisser aux médias mainstream le champ libre d’enfermer les Français dans une forme de terrorisme intellectuel qui légitime l’autoritarisme perpétuel. Voter Macron, c’est laisser se maintenir ce que certains sociologues n’hésiteront pas à nommer un « racisme de classe ». Voter Macron, c’est également la menace du retour du passe sanitaire à l'automne. Enfin, voter Macron, c’est la probable vaccination obligatoire.
Le mélenchoniste peut-il rester en accord avec lui-même s’il renie ce combat anti-Macron ?
Bien entendu, non !
Si voter Le Pen, c’est voter contre les consignes, c’est aussi, toutefois, respecter le choix de près de 7 Français sur 10 qui ont déclaré vouloir changer de président. Quelle issue reste-t-il ? Le vote blanc ?
La politique réserve toujours des surprises de taille au second tour…
Côté Marine Le Pen, il reste un double challenge à relever : polir la forme et surtout travailler le fond. Travailler le fond afin d’éviter un débat télévisé d’entre-deux-tours à l’image de celui de 2017. Sur la forme, c’est peut-être à elle qu’appartient de tendre la main en offrant aux Français ce Gouvernement d'union nationale qui donnerait enfin corps au principe de la République :
« Gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple. »
En conclusion, ceci ressemble fortement à un gigantesque test de Benton dont nous sommes tous, quelque part, les dindons de la farce. Il n’en demeure pas moins que, dans deux semaines, nous serons tout un chacun amenés à prendre en notre âme et conscience une décision qui influencera le cours de cette élection historique. Aussi, citoyens, citoyennes, faites votre choix.
* la politique sanitaire a été la grande absente de cette campagne. Une campagne qui n'en a, du reste, nullement été une, puisque l'on a débattu de rien.
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