Bernard Cazeneuve relance ses "consultations sur l'islam de France"
Le ministre de l'Intérieur organise lundi 29 une "journée de consultations sur l'islam de France", nouvelle initiative pour améliorer, avec une fondation, le financement et l'organisation d'une religion au cœur de débats fiévreux dans un pays ciblé par les jihadistes.
La polémique politique autour du burkini est loin d'être retombée, malgré l'intervention du Conseil d'Etat sur le plan juridique. Le Premier ministre Manuel Valls a estimé que doit continuer "le débat" sur une tenue de bain très minoritaire sur les plages françaises, mais qu'il juge symbole d'un "islamisme mortifère".
Lundi sera un autre jour, grâce aux "consultations sur l'islam de France" menées par Bernard Cazeneuve Place Beauvau, espère-t-on cependant côté musulman. "On va repartir sur une dynamique positive, cet épisode va mettre fin à la séquence nauséabonde du burkini", anticipe le président du Conseil français du culte musulman (CFCM), Anouar Kbibech.
Fil rouge de cette journée: une série de réunions avec des responsables cultuels, personnalités de la société civile et parlementaires pour mettre sur pied la future "fondation pour l'islam de France".
Cette structure est en gestation depuis des mois mais sa préparation a été accélérée après l'attentat de Nice (86 morts) et l'assassinat d'un prêtre par des jihadistes en juillet.
Objectif de cette fondation: lever des financements français, alors que ceux venant de l'étranger sont jugés peu transparents.
Figure de la gauche républicaine, Jean-Pierre Chevènement, 77 ans, est pressenti pour en prendre la présidence. Mais le choix d'un non-musulman a suscité de l'incompréhension dans les rangs de la deuxième confession de France (plus de 4 millions de croyants estimés) et la classe politique.
"J'accomplis cette démarche à la demande du ministre de l'Intérieur, à titre bénévole. Je pense que comme ancien ministre de l'Intérieur moi-même, je ne pouvais pas refuser de contribuer à cette oeuvre d'intérêt public", explique à l'AFP l'intéressé, qui avait lancé en 1999 une "consultation des musulmans de France" ayant abouti, quatre ans plus tard, à la création du CFCM.
Séparation de l'Etat et des cultes oblige, la "Fondation pour l'islam de France", qui succèdera à l'automne à une "Fondation des oeuvres de l'islam de France" mort-née en 2005 en raison de dissensions internes, ne traitera que de questions profanes: financement de thèses d'islamologie, de bourses pour favoriser l'accès aux diplômes universitaires de formation civile et civique - quinze en cette rentrée - mis en place pour imams et aumôniers...
Son conseil d'administration comprendra onze personnes, parmi lesquelles le président du CFCM, trois représentants de l'Etat, cinq personnalités qualifiées et deux membres du "comité des donateurs" de la fondation.
En outre un "conseil d'orientation" composé d'une vingtaine de personnes sera chargé de chercher les projets à financer. Tous ne seront pas des responsables du culte musulman. "Il y a un vivier de gens - professeurs, avocats, cadres supérieurs... - qui veulent se mobiliser et ne sont pas assez visibles dans le débat", glisse-t-on Place Beauvau.
Une association cultuelle sera adossée à la fondation pour s'occuper du financement de la formation théologique des cadres musulmans et de la construction des mosquées. C'est elle qui pourrait collecter demain une "contribution volontaire" sur le halal.
Mais pourquoi la nouvelle fondation réussirait-elle là où l'ancienne a échoué ? "Il y a une prise de conscience, chez les responsables musulmans, de la nécessité d'agir de manière collective, de ne pas produire une impression de division et d'impuissance vis-à-vis de l'opinion et de leurs propres fidèles", assure-t-on à l'Intérieur.
Beauvau voit d'ailleurs dans la relance de la fondation une "nouvelle étape" dans un processus déjà marqué, en juin 2015 et mars 2016, par la convocation d'une "instance de dialogue" élargie, censée pallier le déficit d'image et de représentativité du CFCM.
Pour Anouar Kbibech, "donner aux institutions musulmanes des moyens financiers va contribuer à renforcer leur rôle dans la prévention de la radicalisation, en particulier via l'habilitation des imams".
Dans l'aventure de la nouvelle fondation, dit-il, "tout le monde est dans un esprit constructif afin que, cette fois-ci, ce soit la bonne".
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