Loi Travail : entre 20.000 et 60.000 personnes pour une manifestation sans débordements
Soleil radieux, roses distribuées aux forces de l'ordre, des CRS sans visières ni casques... Le défilé, sous très haute surveillance, s'est déroulé dans un calme inhabituel depuis le début de la mobilisation en mars. Bien loin des images des violences du 14 juin dans la capitale, dont l'ampleur a été à l'origine d'un bras de fer entre gouvernement et syndicats sur la manifestation de ce jeudi.
Le cortège de 60.000 manifestants, selon les syndicats, 20.000 selon la police, s'est ébranlé vers 14h15 de la place de la Bastille, pour un parcours restreint de 1,6 km autour du bassin de l'Arsenal. Une heure à peine après le départ, le carré de tête syndical avait bouclé le parcours et était revenu place de la Bastille.
La précédente manifestation parisienne comparable à celle de jeudi, le 26 mai, avait rassemblé 100.000 personnes à Paris, selon les syndicats. Celle du 14 juin, d'ampleur nationale - des centaines de cars étaient venus de toute la France - en avait réuni un million selon les organisateurs, 75.000 à 80.000, selon la police.
Les autorités avaient pris les devants. Une centaine de personnes ont été interpellées en amont du défilé et plus de 2.000 policiers étaient mobilisés.
La sécurité avait été drastiquement renforcée: opérations de pré-filtrage avec palpations, fouilles et même contrôles d'identité ont été effectués, les policiers empêchant l'accès aux manifestants munis de casques...
Fait singulier, les manifestants ont battu le pavé en boucle. Le cortège "officiel" a été rejoint par des militants de Nuit Debout qui marchaient en sens inverse, mêlant leurs slogans dans une joyeuse cacophonie. "Retrait de la loi Travail !", "Tout le monde déteste le PS", "La police déteste tout le monde"...
Depuis début mars, des casseurs s'étaient systématiquement immiscés dans les manifestations, et syndicats et gouvernement s'étaient renvoyé la balle sur leurs responsabilités respectives concernant la sécurité des défilés. Le 14 juin avait a été marqué par des violences et d'importantes dégradations, notamment de l'hôpital Necker-Enfants malades.
Initialement, la mobilisation de jeudi n'était pas censée être une date-clé. Mais les menaces d'interdiction des deux têtes de l'exécutif, au nom de la sécurité, ont changé la donne. Jusqu'à l'interdiction décrétée mercredi matin -une première depuis 1962- qui a provoqué un tollé côté syndical et politique avant d'être rapidement levée. "Si Manuel Valls n'avait pas fait ses déclarations intempestives publiques, il n'y aurait pas eu de manifestation aujourd'hui", a souligné le leader de FO, Jean-Claude Mailly.
Certains manifestants, à Paris mais aussi en régions, ont dit défiler pour la première fois parce qu'ils avaient à coeur de défendre la liberté de manifester. "Je suis très inquiet quand j'entends qu'un ministre puisse avoir, même un instant, à l'esprit d'interdire une manifestation syndicale", a témoigné David, professeur de collège. "Ce qui s'est passé mercredi est indigne d'un gouvernement dans une démocratie", disait Daniel, demandeur d'emploi à Rennes.
Concentrant leurs critiques sur Manuel Valls, CGT et FO ont à nouveau insisté jeudi pour être reçues par François Hollande, qui a affirmé qu'il irait "jusqu'au bout" sur la loi Travail.
Le président de la République "peut aller jusqu'au bout en passant en force, en utilisant le 49-3, mais il peut aussi aller jusqu'au bout en discutant et en faisant des changements", a commenté M. Mailly.
Outre le défilé parisien, un appel national à grèves et manifestations avait été dans toute la France, le dixième depuis mars à l'initiative de sept syndicats (CGT, FO, Solidaires, FSU, UNL, Unef, Fidl) qui demandent toujours le retrait du projet de loi et entendent "ne rien lâcher". Le texte est examiné au Sénat jusqu'à vendredi avant un vote le 28 juin, date d'une nouvelle mobilisation.
Selon les chiffres recensés par les bureaux de l'AFP, la participation a baissé en régions, notamment au Havre (3.400 personnes selon la police, 20.000 selon les manifestants, contre 40.000 le 9 juin), à Marseille (2.800 selon la police contre 5.000 le 14 juin), à Lyon, à Bordeaux...
Elles ont eu lieu également dans le calme, sauf à Rennes où de jeunes manifestants encagoulés ont commis de nombreuses dégradations.
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