Loi Travail : la courte manifestation des syndicats sous tensions à Paris
Une fois n'est pas coutume depuis le début du mouvement début mars, le cortège de plusieurs milliers de manifestants s'est ébranlé vers 14H15 sous un chaud soleil de la place de la Bastille, pour une boucle de 1,6 km autour du bassin de l'Arsenal qui devait les ramener à leur point de départ. "Il va y avoir du monde", a prédit le leader de la CGT, Philippe Martinez.
La sécurité a été drastiquement renforcée: un large périmètre était fermé à la circulation, et des opérations de pré-filtrage avec palpation, fouilles et même contrôles d'identités étaient effectués aux abords de la place de la Bastille, les policiers empêchant l'accès aux manifestants munis de casques, ont constaté des journalistes de l'AFP.
Après les violences survenues en marge du défilé du 14 juin à Paris, aucun débordement "ne sera toléré", avait averti la veille le ministre de l'Intérieur, Bernard Cazeneuve. Avant même le début de la manifestation, 25 personnes avaient été interpellées, selon la préfecture de police.
Plus de 2.000 policiers étaient mobilisés pour sécuriser le défilé. Le quartier s'était préparé à une éventuelle casse: vitres d'abribus démontées, pieux en bois retirés... Certains commerçants hésitaient à fermer boutique. "J'en ai vu des bien pires! De toute façon c'est une manifestation de CRS, pas de manifestants!" plaisantait un kiosquier.
Syndicats et gouvernement se renvoient la balle sur leurs responsabilités respectives concernant la sécurité des défilés. Depuis mars, des casseurs s'immiscent dans les manifestations. Le 14 juin - mobilisation nationale à Paris ayant réuni 75.000 à 80.000 personnes, selon la police, un million, selon les organisateurs - a été marqué par des violences et d'importantes dégradations, notamment de l'hôpital Necker-Enfants malades.
CGT et FO ont renforcé leurs services d'ordre mais n'en démordent pas: à eux la sécurisation à l'intérieur des cortèges, aux forces de l'ordre l'extérieur. Initialement, la mobilisation de jeudi n'était pas censée être une date-clé. Philippe Martinez avait même prévu de défiler à Bordeaux.
Mais les menaces d'interdiction des deux têtes de l'exécutif ont changé la donne. Jusqu'à l'interdiction décrétée mercredi matin, --une première depuis 1962--, qui a provoqué un tollé côté syndical et politique avant d'être rapidement levée. "Si Manuel Valls n'avait pas fait ses déclarations intempestives publiques, il n'y aurait pas eu de manifestation aujourd'hui", a souligné le leader de FO, Jean-Claude Mailly. Le défilé de jeudi défend aussi "le droit à manifester, garant de la démocratie", pour M. Martinez.
"Je ne vois pas pourquoi on interdirait une manifestation, sinon, on est en dictature. Ca a été un élément qui m'a poussé à venir manifester aujourd'hui", témoigne dans la manifestation parisienne Christophe Le Roy, 45 ans, salarié de Suez Environnement.
La CGT et FO ont à nouveau insisté jeudi pour être reçu par François Hollande, qui a affirmé qu'il irait "jusqu'au bout" sur la loi travail. "On veut une réponse", a insisté M. Martinez, estimant que "quand sept organisations syndicales écrivent au président de la République, la moindre chose c'est de répondre, quelle que soit la réponse".
Le défilé parisien entre dans le cadre d'un appel national à grèves et manifestations dans toute la France, le dixième depuis mars à l'initiative de sept syndicats (CGT, FO, Solidaires, FSU, UNL, Unef, Fidl). Le texte est examiné au Sénat jusqu'à vendredi avant un vote le 28 juin, date d'une nouvelle mobilisation.
De nombreuses manifestations se tenaient en régions. Au Havre, la manifestation se déroulait dans le calme. Elle rassemblait 3.400 personnes selon la police, 20.000 selon les manifestants. A Marseille, ils étaient 2.840 selon la police, 45.000 selon les organisateurs, et à Toulouse respectivement 3.500 et 12.000. A Rennes, au cours d'une manifestation sauvage qui s'est détachée du parcours officiel, des manifestants cagoulés armés de marteaux s'en sont pris à des vitrines.
Aucune perturbation n'était prévue à la SNCF. L'Aviation civile attend "des retards possibles", et Easyjet a préventivement annulé une soixantaine de vols.
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