Manifestation autorisée à Bastille : "une victoire" clament les leaders syndicaux
Le gouvernement français a fait volte-face mercredi en autorisant finalement une manifestation organisée par les syndicats opposés à la loi travail jeudi à Paris, qu'il avait interdite dans un premier temps, "une victoire", selon les leaders syndicaux concernés.
La manifestation se déroulera "sur un parcours proposé par le ministre de l'Intérieur", une boucle de 1,6 km autour du bassin de l'Arsenal, près de la place de la Bastille, a annoncé mercredi l'intersyndicale (CGT, FO, FSU, Solidaires, Unef, UNL et Fidl), lors d'une conférence de presse.
Elle a fait cette annonce à l'issue d'une rencontre dans la matinée d'environ 45 minutes entre le ministre de l'Intérieur Bernard Cazeneuve et les secrétaires généraux de la CGT, Philippe Martinez, et de FO, Jean-Claude Mailly.
Les deux responsables syndicaux ont qualifié la décision de "victoire pour les syndicats et la démocratie". M. Martinez a aussitôt demandé à François Hollande de recevoir "très rapidement" les syndicats au sujet du conflit sur le projet de loi. C'est "le coeur du sujet", a insisté M. Mailly, même si les discussions se sont cristallisées ces derniers jours autour des manifestations.
Après deux jours de tractations avec les syndicats, le préfet de police de Paris avait dans un premier temps annoncé l'interdiction du défilé jeudi matin, ce qui aurait constitué une première historique depuis la manifestation du 8 février 1962 organisée par des centrales syndicales pour la paix en Algérie. Cette annonce a provoqué un tollé politique et syndical, y compris à la CFDT, favorable au projet de loi.
François Hollande avait prévenu en Conseil des ministres que "tant que les conditions n'étaient pas réunies", l'autorisation ne serait pas accordée, selon le porte-parole du gouvernement Stéphane Le Foll.
Mercredi matin, Jean-Claude Mailly, avait fustigé "un Premier ministre enferré dans son autoritarisme". "La prochaine étape c'est peut-être qu'il nous arrête", avait-il ironisé.
L'Élysée s'est défendu de toute décision politique, estimant que l'interdiction était "une décision de gestion opérationnelle de l'ordre public", ne relevant pas d'un "arbitrage" du président de la République.
A l'issue du Conseil des ministres, Stéphane Le Foll a récusé toute dissension au sein du gouvernement, assurant que "l'exécutif sur ce sujet est en totale cohérence avec ces principes" et que "les décisions sont prises de manière collective".
A gauche, les critiques ont fusé après l'annonce de l'interdiction. "C'est une faute historique", a réagi le député socialiste Christian Paul, chef de file des "frondeurs". Pierre Laurent (PCF) a exprimé de son côté sa "stupéfaction".
L'interdiction ferait de la CGT "le bouc émissaire et la victime de la gauche au pouvoir" et serait "mortifère pour l'histoire et notre culture de gauche", avait mis en garde le député PS Pascal Terrasse.
Marine Le Pen, la présidente du Front national, avait dénoncé sur son compte Twitter une "atteinte grave à la démocratie".
En revanche, le gouvernement avait reçu le soutien de François Fillon, pour lequel "la raison l'a emporté". Mais mardi depuis Berlin, Nicolas Sarkozy avait jugé "pas raisonnable" d'interdire aux syndicats de manifester.
Après les violences du 14 juin, le ton s'était nettement durci entre gouvernement et syndicats, en lutte depuis mars contre une réforme du droit du travail qu'ils jugent trop favorable aux employeurs et dangereuse pour les droits des salariés.
Jeudi, pour la nouvelle journée de mobilisation contre la loi travail, examinée au Sénat jusqu'à vendredi avant un vote le 28, manifestations et arrêts de travail sont programmés un peu partout dans le pays. La SNCF ne prévoit aucune perturbation sur son réseau. M. Martinez a par ailleurs annoncé que la prochaine manifestation à Paris, prévue le 28, avait également été autorisée, selon des modalités qui restent à déterminer.
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