Plus de 200 députés appellent Paris à mettre son véto contre l’accord UE-Mercosur
Le Mercosur, ou Marché commun du Sud, est une alliance commerciale créée en 1991 regroupant principalement l'Argentine, le Brésil, le Paraguay et l'Uruguay. L'accord de libre-échange entre l'Union européenne et le Mercosur, dont les négociations ont débuté en 1999, a été conclu en principe en 2019, mais n'a pas encore été ratifié. Il refait surface actuellement en raison des discussions en cours pour sa finalisation, suscitant une vive polémique.
Un accord “dépassé et incohérent”
Les agriculteurs européens, en particulier, s'y opposent fermement, craignant une concurrence déloyale due aux différences de normes de production entre l'UE et le Mercosur, notamment en matière de sécurité alimentaire et d'utilisation de pesticides. Le 22 octobre dernier, la FNSEA et les Jeunes Agriculteurs ont lancé un appel à la mobilisation le 15 novembre prochain en France pour entraver les négociations entre Bruxelles et le Mercosur. Les syndicats agricoles craignent que cet accord ne provoque une concurrence déloyale et ne déstabilise l’agriculture du continent.
La récente proposition d'un "fonds de compensation" par la Commission européenne, qui serait destiné à atténuer les impacts économiques sur les agriculteurs européens, a surtout attisé les tensions. Dans un communiqué du lundi 04 novembre, la Fédération Départementale des Syndicats d’Exploitants Agricole (FDSEA) a qualifié cette proposition de “provocation”. “Un chèque de compensation ne résout pas les problèmes de cet accord commercial”, dénonce-t-on.
Pour la FDSEA, cet accord est “dépassé et incohérent” et “faciliterait l’importation sur le marché européen de produits agroalimentaires éloignés des normes imposées aux industries et producteurs européens, entraînant une concurrence déloyale et intolérable pour nos secteurs”.
Le mois dernier, le président français Emmanuel Macron répétait que “l’accord n’était pas acceptable en l’état”. Paris pourrait toutefois se retrouver en minorité, face notamment à l’Allemagne, qui souhaite booster son industrie et l’ouvrir un peu plus à l’exportation.
Lundi, plus de 200 députés, aussi bien de gauche que de droite, ont appelé le gouvernement à bloquer la conclusion de cet accord de libre-échange, qui “trahit”, selon eux, l’ambition européenne. “L'accord, négocié par la Commission européenne, trahit deux fois ce que doit être l'Union européenne. Il trahit l'ambition d'une élévation des standards environnementaux, sociaux, sanitaires. Il trahit aussi l'engagement pour la souveraineté alimentaire de notre continent”, déplorent les 209 parlementaires.
Les députés en appellent au véto français
Les signataires sont issus des groupes Gauche Démocrate et Républicaine, Socialistes, Écologistes, Ensemble Pour la République (EPR), Démocrates, Horizons, Liberté Indépendants Outre-mer et Territoires, et Droite républicaine. Dans leur tribune collective, ils disent “refuser d'ouvrir les marchés européens à du poulet dopé aux antibiotiques, à du bœuf élevé sur fond de déforestation”, ou encore à du “maïs traité à l'atrazine”.
Dénonçant la perte par la France de “100.000 exploitations agricoles en dix ans” et le risque
“d'en perdre le même nombre dans la décennie qui s'ouvre, alors que 75% de la déforestation au Brésil est liée à l'élevage bovin, cet accord reviendrait à sacrifier nos valeurs profondes à des intérêts commerciaux et géopolitiques court-termistes, à une course à l'influence et aux nouveaux marchés”.
Il reste alors à Paris, écrivent encore André Chassaigne, François Hollande, François Rufin ou Julien Dive, “que quelques jours pour bloquer la conclusion de cet accord de libre-échange, annoncée pour la mi-novembre. Quelques jours pour réaffirmer la priorité donnée à la protection de nos agriculteurs et la durabilité de nos productions (...) à la qualité sanitaire de notre alimentation”.
“Il est temps que la France fasse preuve du courage, de l'autorité, de la force de conviction dont nous la savons capable. Nous, députés de tous bords, demandons donc au gouvernement de bloquer la conclusion de l'accord de libre-échange (...) à la Commission européenne de respecter ce veto français”, concluent-ils.
La mobilisation à laquelle appellent les fédérations et autres organisations d’agriculteurs est justement prévue à quelques jours du G20 qui doit se dérouler au Brésil, et qui devrait aussi être l’occasion pour les deux parties de conclure le Mercosur.
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