L’émergence d'un nouvel enseignement : le droit animalier
Depuis l’amendement Glavany, les animaux sont consacrés dans le code civil comme des "êtres vivants doués de sensibilité" au sein de l’article 515-14 [1]. Cette avancée législative valorise les animaux en procédant à leur extraction de la catégorie des biens [2]. Elle s’envisage aussi comme un point de départ à l’émergence du droit animalier dans l’enseignement.
Pour autant, avant cet amendement, une doctrine et une revue juridique ont su s'imposer.
En ce qui concerne la doctrine, elle s’étoffe au fur et à mesure des années mais le fondateur incontournable est Jean-Pierre Marguénaud, le plus humain des animalistes et professeur de droit privé à l'université de Limoges, qui n'a pas attendu que le sujet du droit animalier devienne à la mode pour en faire une de ses spécialisations.
Sa thèse, dont le titre est L'animal en droit privé a été soutenue en 1987 et publiée en 1992. Elle est la pierre angulaire du droit animalier français. Par ailleurs, sous la direction de Jean-Pierre Marguénaud, Florence Burgat et Jacques Leroy la Revue Semestrielle de Droit Animalier (RSDA) a vu le jour en 2009.
L'avant-propos de la RSDA précise notamment que la Revue a pour ambition de combler l'absence de revue juridique en la matière, lequel est ressenti comme un vide "par un certain nombre de chercheurs et beaucoup d'acteurs de la vie économique ou associative. Elle s'efforcera d'y parvenir en regroupant les forces de juristes de toutes les spécialités académiques mais aussi de philosophes et de scientifiques sans le soutien desquels la réflexion juridique s'essoufflerait vite sur un pareil sujet".
L'aboutissement du travail accompli par Jean-Pierre Marguénaud est l'enseignement du droit animalier en France qui se définit comme une discipline du droit traitant des questions animalières afin d’y apporter des réponses nécessaires.
Il convient de préciser que l’ensemble des scandales sur les maltraitances animales a fait émerger d’autant plus cette discipline.
L’Espagne fut le premier pays européen à avoir créé un master de Droit des animaux à l’Université Autonome de Barcelone (formation créée et dirigée par Teresa Gimenez-Candela, professeure de droit), il y a quelques années déjà.
L’intérêt toujours grandissant de la cause animale s’est inséré ensuite au sein des universités françaises avec pour commencer, le Centre Européen d’Enseignement et de Recherche en Ethique (CEERE) de l’Université de Strasbourg qui propose depuis septembre 2015 un master Ethique et Société dont une spécialisation est consacrée à l’"Animal: science, droit et éthique".
À Limoges, l'institut du droit équin en collaboration avec l'université de Limoges a lancé également en septembre 2015 un diplôme universitaire (DU) de droit équin mais surtout l’université de Limoges s’est faite remarquer par la création d’un diplôme universitaire (DU) de droit animalier, à l’initiative de Lucille Boisseau-Sowinski, maître de conférence en droit privé, et de Jean-Pierre Marguénaud en partenariat avec la Fondation 30 Millions d'Amis (qui était à l'origine de la pétition qui a conduit à la réforme du code civil) et la ville de Brive-la-Gaillarde.
À Brest, sous forme d'une Unité d'enseignement libre, l'université de Bretagne occidentale propose d'étudier le droit animalier.
Enfin, l'Université d'Aix-en-Provence propose une introduction au droit animal dans le cadre de son master 2 de droit international et européen de l'environnement.
L'université n'est pas le seul lieu d'enseignement concerné, et même si cela ne va pas dans le sens de la protection des animaux, il convient de préciser l'existence d'une option "chasse" au baccalauréat au sein d'un lycée à Limoux, dans l'Aude.
De plus, depuis quelques jours est lancée une pétition afin de proposer un module "éthique animale" dans les programmes de l’école. Le droit animalier n’a donc pas fini de faire parler de lui…
[1] Cette disposition a été introduite par l’article 2 de la loi n° 2015-177 du 16 février 2015 « relative à la modernisation et à la simplification du droit et des procédures dans les domaines de la justice et des affaires intérieures » que le Conseil constitutionnel avait déclarée conforme à la Constitution par une décision n° 2015-710 DC du 12 février 2015.
[2] V. Jean-Pierre MARGUÉNAUD, « L’entrée en vigueur de « l'amendement Glavany » : un grand pas de plus vers la personnalité juridique des animaux », RSDA, 2/2014, p. 15 et s. (http://www.unilim.fr/omij/files/2015/04/RSDA-2-2014.pdf)
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