Blanchiment de fraude fiscale : le procès de Serge Dassault pourrait être reporté
A l'ouverture du procès de Serge Dassault, poursuivi pour blanchiment de fraude fiscale sur des comptes cachés à l'étranger, ses avocats ont soulevé ce lundi 4 plusieurs questions de procédure, susceptibles d'entraîner un report du procès du sénateur (LR) de 91 ans, qui encourt une peine d’inéligibilité. Le tribunal correctionnel de Paris y répondra mercredi matin. Serge Dassault n'était pas présent à l'audience lundi.
Le parquet national financier (PNF) reproche au PDG du groupe Dassault, fondé par son père Marcel, d'avoir détenu des comptes à l'étranger pour dissimuler le produit direct de sa propre fraude fiscale. En cause, quatre comptes de fondations et sociétés, aux Iles Vierges britanniques, au Luxembourg et au Liechtenstein, qui ont abrité jusqu'à 31 millions d'euros en 2006, 11 millions en 2014.
Premier à prendre la parole pour M. Dassault, Me François Artuphel a soulevé une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) sur le blanchiment de fraude fiscale. "On ne peut pas être poursuivi pour blanchiment si la fraude fiscale, en amont, n'est pas démontrée", a-t-il plaidé. Me Jacqueline Laffont a quant à elle soulevé une autre QPC, portant cette fois sur le régime des perquisitions dans les études notariales. Le notaire historique de Serge Dassault avait été perquisitionné en février 2015 dans le cadre de cette enquête. Se pose selon Me Laffont la question de savoir s'il est conforme à la Constitution de procéder à de telles perquisitions sans la "présence active" d'un représentant de la profession et sans véritable possibilité de recours.
Le parquet national financier a demandé au tribunal de rejeter l'une et l'autre de ces QPC. Pour la première, car le blanchiment est un "délit distinct qui comprend une intention coupable différente". Pour la seconde, notamment car "les droits de la défense ne sont en cause que chez l'avocat, pas chez le notaire".
Serge Dassault est également jugé pour avoir omis de déclarer 11 millions d'euros en 2014 et 16 millions d'euros en 2011 à l'ancêtre de la HATVP, la Commission pour la transparence financière de la vie publique, chargée de vérifier les situations patrimoniales des élus. La HATVP avait émis un "doute sérieux" sur "l'exhaustivité, l'exactitude et la sincérité" de ses déclarations, le soupçonnant d'avoir omis de déclarer des avoirs détenus à l'étranger. M. Dassault a depuis régularisé sa situation, tant auprès de l'administration fiscale que de la Haute autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP), selon une source proche de l'enquête.
La défense de M. Dassault a également demandé un complément d'information. Il n'a jamais été entendu, font valoir ses avocats, l'accusation rétorque qu'il a à deux reprises reporté ces rendez-vous judiciaires par des "moyens dilatoires". "La logique voudrait qu'on entende d'abord M. Dassault" à l'audience, a relevé le président Olivier Géron. La défense souligne quant à elle que M. Dassault a "hérité" de ces fonds, et se posera sur le fond du dossier la question de savoir depuis quand il en était le "bénéficiaire économique".
L'existence de "cagnottes" au Luxembourg et au Liechtenstein avait déjà été évoquée dans le cadre de l'enquête sur un système présumé d'achats de voix lors des campagnes municipales de Corbeil-Essonnes (Essonne) en 2009 et 2010. Une enquête dans laquelle Serge Dassault est mis en examen avec sept autres personnes, dont l'actuel maire, Jean-Pierre Bechter (LR), qui lui a succédé à la tête de la ville, après l'annulation du scrutin de 2008 en raison de "dons d'argent".
Dans l'enquête menée par les juges d'instruction, plusieurs témoignages accréditent un système d'achat de voix. L'industriel est mis en examen pour achat de votes, complicité de financement illicite de campagne et financement en dépassement du plafond autorisé. Il ne nie pas les dons d'argent, mais conteste toute corruption et tout lien avec les élections. L'affaire est toujours en cours d'instruction.
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