Ile-de-France : 850 migrants de Stalingrad installés à Sarcelles
Devant l'ancienne maison de retraite de Sarcelles (Val-d'Oise), les bus ont défilé toute la journée. Emmitouflés dans des doudounes, le regard fatigué, 850 migrants évacués d'un campement du nord-est parisien en sont descendus pour être installés quelques jours dans ce bâtiment.
Diouldé, un Guinéen de 24 ans, venait de passer sa troisième nuit dehors quand il est monté tôt ce matin dans un bus à destination de cette ville du Val-d'Oise. Sur les quelque 3.800 migrants évacués vendredi 4 du campement de Stalingrad à Paris, plus gros bidonville de France depuis la fin de la "Jungle" de Calais, 1.200 ont été conduits dans ce département, où trois structures d'hébergement temporaire ont été ouvertes.
"On a fait une ligne, on est montés dans le bus et on est arrivés ici", raconte Diouldé. Ce soir, il dormira sur un lit de camp, serré dans une petite chambre avec deux autres migrants qu'il ne connaît pas. Mais qu'importe: "C'est bon pour nous d'arriver ici. Dormir dehors c'était pas possible, j'avais trop froid".
Vêtu d'une simple doudoune et d'un jogging noir, le jeune homme est arrivé à Paris le 30 octobre, après avoir fui Conakry où il dit avoir été blessé par les forces de l'ordre lors d'une manifestation en 2015.
Comme lui, ce sont uniquement des hommes seuls qui ont été conduits dans cet ancien établissement pour personnes âgées. Fermé en décembre 2015, le "Cèdre Bleu" est situé dans une zone pavillonnaire de cette commune qui, comme d'autres, illustre les difficultés des villes de banlieue. La majorité vient du Soudan, d'Éthiopie ou de Guinée. Ils doivent être répartis à partir du début de la semaine prochaine vers d'autres hébergements en région.
A la descente du bus vendredi, un kit d'hygiène leur a été fourni par la Croix-Rouge, ainsi qu'un sachet repas. Un ticket comportant un numéro aussi: "Vous devez le présenter pour entrer et sortir du bâtiment et avoir les sachets repas les autres jours", leur explique un représentant de la préfecture, traduit en arabe par un membre de l'association Emmaüs.
Dans la nuit de jeudi à vendredi, cinquante membres de la sécurité civile ont préparé les lieux. De 20h à 2h du matin, ils ont "installé les lits, monté dans le parc les tentes qui serviront de réfectoire", raconte l'un d'eux à l'AFP, pendant qu'un nouveau groupe d'une cinquantaine de migrants arrive dans le bâtiment.
Certains portent de gros cabas en plastiques contenant des couvertures ou des duvets. Quelques-uns ont des tentes dans les mains. D'autres des valises.
"Ceux qui ont des affaires, ce sont ceux qui ont passé deux, trois mois à Stalingrad", assure Amadou, 23 ans, lui aussi de Guinée. Lui n'a même pas un sac à dos. Juste un portable avec lequel, à peine assis sur le lit qui lui a été attribué, il s'empresse d'appeler. "On est dans quelle ville?", demande-t-il pour renseigner son interlocuteur. "Il y a une gare? Des trains pour Paris?", interroge-t-il, indiquant que c'est là qu'il a ses rendez-vous pour sa demande d'asile.
Mais le député-maire PS de Sarcelles, François Pupponi, a dénoncé cette réquisition: "Encore une fois on nous a mis devant le fait accompli", regrette-t-il, en fustigeant le "mépris" de l'Etat et de la ville de Paris dont il a le sentiment d'être "la variable d'ajustement".
"Je ne refuse pas d'accueillir des migrants, j'ai même proposé qu'un centre d'accueil permanent de réfugiés soit créé sur le site" de l'ancienne maison de retraite, ajoute-t-il, réclamant "du dialogue" pour "des solutions pérennes".
"A partir de mardi ces personnes sont envoyées dans des centres d'hébergement", a de son côté expliqué la ministre du Logement Emmanuelle Cosse lors d'un point de presse en fin de journée. "Des élus sont inquiets des difficultés sociales que cela peut poser dans leur ville mais sur l'accueil temporaire nous avons discuté" de façon "franche" et "responsable", a-t-elle affirmé.
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