"Propose enfant à adopter d’occasion" : Le Rehoming ou le marché de l'enfant de seconde main aux Etats-Unis
Des candidats à la parentalité adoptent des enfants, et parfois le regrettent. Alors, ils rendent l’enfant aux services sociaux ou font appel à des agences afin qu’il soit reproposé à l’adoption. Ça s’appelle le Rehoming, et rien ne l’interdit aux États-Unis. Dans certains cas, les parents adoptifs déçus se chargent eux-mêmes de trouver de nouveaux adoptants qui ne font alors pas l’objet d’un contrôle des services sociaux. C’est interdit, mais on trouve quand même de nombreux groupes qui proposent des enfants à adopter sur internet et notamment sur Facebook.
Le Rehoming a été découvert du grand public en 2013, suite à une dépêche de l’agence de presse Reuters qui révélait cette pratique aux États-Unis. S’en étaient suivis de nombreux articles racontant des histoires terribles d’enfants abandonnés une seconde fois voire plusieurs fois, et confiés à nouveau aux services sociaux, ou parfois revendus sur internet à de nouvelles familles. La révélation a fait grand bruit, à l’échelle internationale, puis le soufflet médiatique est retombé et… le Rehoming continue d’être pratiqué. Quelques 25 000 enfants sont ainsi abandonnés par leur famille adoptive aux États-Unis tous les ans.
Des parents adoptifs déçus
Les enfants victimes de cette pratique ont, pour la majorité d’entre eux, fait l’objet d’une première adoption à l’international, mais cela arrive aussi dans le cadre d’adoptions nationales.
D’après l’agence caritative « Adoptions from the heart » les raisons invoquées par les adoptants, pour abandonner l’objet d’un désir qui leur a pourtant coûté fort cher, sont des troubles du comportement de l’enfant qu’ils n’étaient pas préparés à gérer. Ils dénoncent d’ailleurs souvent un manque de soutien des autorités compétentes dans l’éducation de leur progéniture toute neuve.
En effet, ces enfants donnés à l’adoption ont souvent un passé difficile et même les bébés peuvent être issus de milieux sociaux très défavorisés ou problématiques et souffrir par exemple d’un syndrome d’alcoolisme fœtale. Les autres causes d’abandon mises en avant par les adoptants sont des troubles de l’attachement réactionnel, un syndrome post-traumatique ou un Trouble déficit de l’attention avec hyperactivité (TDAH), toutes pathologies qui font que l’éducation du petit n’est pas un long fleuve tranquille et que le rêve d’une relation parents/enfant idyllique et de famille parfaite en prend un vieux coup.
Mais il arrive aussi tout simplement que les parents adoptifs soient déçus par leur expérience de la parentalité et affirment ne pas arriver à s’attacher à l’enfant.
Le marché de l’enfant d’occasion.
Des agences se sont donc spécialisées dans la récupération et la revente de ces enfants rejetés par leur famille adoptive. Ainsi, l’agence Wasatch International Adoption propose-t-elle un programme « second chance ».
Cette agence se défend de pratiquer le Rehoming dans la mesure où elle suit « une procédure légale soigneusement réglementée en suivant toutes les lois de l'État dans lequel l'enfant vit et toutes les lois de l'État dans lequel vit la nouvelle famille adoptive ». Mais enfin, il s’agit quand même d’un business consistant à retrouver un nouveau foyer à des enfants abandonnés par une précédente famille adoptive. Il serait plus juste de dire qu’il s’agit de Rehoming respectant la loi.
L’agence facture 2 400 dollars aux adoptants désirant se débarrasser de l’enfant devenu indésirable et 4 000 dollars pour le programme aux familles souhaitant adopter plus 500 dollars pour la démarche. Il est à noter qu’adopter un enfant en « seconde main » coûte beaucoup moins cher qu’une adoption internationale dont les frais à engager avoisinent les 20 000 dollars.
Petites annonces sur internet.
Mais certains déçus de l’adoption trouvent les procédures légales pour remettre l’enfant sur le marché de l’adoption trop longues ou onéreuses. Ou ils veulent rentrer dans leurs frais et revendre l’enfant. Or, officiellement, obtenir un enfant via une vente est interdite aux États-Unis depuis une loi de 2012 entrée en vigueur en 2014.
Alors, ces familles cherchent des repreneurs de gamins par leurs propres moyens, en utilisant notamment internet. C’est interdit mais la loi est très mal appliquée et les risques de sanction sont faibles.
C’est ainsi que l’on trouve sur Facebook des groupes ou pages nommés « Real baby for adoption and Rehoming » (« Vrai bébé pour adoption et Rehoming » - NDLR) ou « Free babies available for adoption » (« Bébés gratuits disponibles pour l’adoption » - NDLR) ou plus simplement « Adoption center ». On y trouve des photos de bébés à céder, souvent accompagnées d’un texte vantant leur qualité, et des annonces de demandes du style « cherche bébé de 6 semaines à adopter » ou « cherche petite file à adopter ». Quand un internaute se dit intéressé par une offre, il est invité à contacter l’annonceur en message privé.
Un gros problème est que les futurs adoptants ou ré-adoptants ne font pas l’objet des contrôles mis en place dans le cadre des adoptions suivant les procédures légales. Cette pratique fait la part belle aux prédateurs sexuels et à des traites en tout genre.
Pourtant, vu le nombre d’annonces que l’on trouve rapidement, sur des groupes en accès libre, on peut penser que ni les autorités, ni les modérateurs des réseaux sociaux ne sont très préoccupés par ces pratiques illégales.
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