Étudiants en médecine au Conseil d'État : "Une première victoire, mais à quand la réintégration ?"
Contraints de changer de cursus à cause d'une réforme de l'évaluation finale en première année de médecine, un groupe d'étudiants a saisi la justice en fin d'année 2021. Le tribunal administratif ne leur a pas donné gain de cause. Mais, le 21 décembre dernier, le Conseil d'État a annulé la décision du tribunal et exigé une nouvelle étude de l'affaire. Une maigre consolation, mais une première victoire.
Retour sur la réforme qui est remise en cause
En 2021, 72 % de la note de première année de médecine étaient attribués à un oral portant sur des questions de société. Une surprise à laquelle les futurs médecins n'étaient pas préparés. Résultat : des étudiants classés dans les 300 premiers à l’écrit, se retrouvent propulsés dans les bas-fonds du classement final après avoir passé l'oral. Beaucoup sont ainsi contraints de se tourner vers un autre cursus que celui du convoité PASS (Parcours d’Accès Spécifique Santé), en allant, par exemple, en licence SIAS (Sciences interdisciplinaires appliquées à la santé) ou en licence L.AS (Accès Santé), voire en droit ou en éco-gestion.
L'incompréhension qui régnait au départ, tant du côté des étudiants que du côté du jury, a rapidement laissé place à la colère.
En pleine épidémie, alors que les questions de santé priment sur le reste, une réforme qui favorise les qualités oratoires des étudiants plutôt que leurs connaissances en médecine semble aller à l'encontre du bon sens. Comme le rappelait le sénateur et radiologue Alain Houpert en septembre dernier, « il manque des gens compétents auprès des patients. On devrait être en surnombre au collège des aides-soignants, des infirmières, alors que nous avons pléthore de personnel dans le background, ce qu'on appelle les bureaux et l'administration ». Notons qu'en plus de l'administration, aujourd'hui, nombreux sont les médecins à préférer la télévision.
Voir aussi : "On crache sur l'avenir" : le sénateur Alain Houpert défend les étudiants en médecine.
La justice a été saisie : « Nous sommes un crash-test avec cette réforme »
Treize d'entre eux ont choisi la voie du droit pour se défendre, et notamment pour essayer de réintégrer le cursus PASS. D'autres sont allés jusqu'à entamer une grève de la faim. Les étudiants parisiens avaient donc saisi le tribunal administratif et eu un rendez-vous avec la présidente de l’université de Paris. Le juge des référés avait alors observé que ces étudiants n’avaient pas subi d’injustice et devaient se plier à la façon de faire de l’université.
Plus tard, ils se sont tournés vers le Conseil d'État, plus haute juridiction administrative. L'institution a annulé la décision du tribunal administratif, affirmant que « le juge des référés a omis d’apprécier l’ensemble des circonstances et a entaché son ordonnance d’erreurs de droit ». Cela étant, rien n'est encore gagné, puisque le tribunal administratif doit simplement rejuger la plainte des étudiants. Rien n'assure que le résultat sera différent puisque le sujet de fond n'est pas véritablement traité.
La bataille ne fait que commencer
Charlotte, une de ces treize étudiants, nous confie :
« Je suis contente du verdict du Conseil d’État, cependant aujourd’hui ça n’a rien fait bouger. Je suis toujours en licence. Nous n’avons aucune nouvelle ni de l’université de Paris, ni de Frédérique Vidal que nous avons relancé à maintes reprises.
Notre avocat au Conseil d’État (Me Marc Bellanger, NDLR) leur a demandé de juger le fond. La juridiction a alors répondu que si j’étais réintégrée, cela devait obligatoirement enlever un étudiant en médecine qui a déjà commencé son année, ce qui est faux.
En somme, je suis satisfaite de la réponse du Conseil d'État, mais ça n'a rien apporté de concret à l’affaire. Nous attendons une réponse de l'université. Le médiateur ne répond pas non plus (ce qui retarde l’affaire au fond), la situation est insupportable ; on a l’impression d’être en face d’un mur. C’est une première victoire, certes, mais à quand la réintégration ? »
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