Allemagne : Scholz s'inquiète d'une alliance "impardonnable" avec l'extrême droite sur les migrants
Quand Angela Merkel critique le vote commun au Parlement de son parti conservateur avec l'extrême droite, le chancelier Olaf Scholz qualifie d'"erreur impardonnable" une alliance envisagée entre l'opposition conservatrice allemande et l'extrême droite pour adopter un durcissement des règles migratoires du pays à la suite d'un meurtre imputé à un Afghan.
"Depuis la fondation de la République fédérale d'Allemagne il y a plus de 75 ans, il y a toujours eu un consensus clair de tous les démocrates dans nos parlements : nous ne faisons pas cause commune avec l'extrême droite", a lancé le dirigeant social-démocrate devant les députés.
La mise en garde s'adressait au chef de file de l'opposition conservatrice, Friedrich Merz, favori des sondages pour devenir le nouveau chancelier à l'issue des élections législatives du 23 février.
Il veut faire voter mercredi deux motions prévoyant entre autres de bloquer à la frontière toute personne sans papier d'entrée légal, y compris les demandeurs d'asile. Puis, vendredi, il cherchera à faire adopter une loi limitant l'immigration et étendant les pouvoirs de police.
Les conservateurs se sont dit prêts à les faire adopter si nécessaire avec le soutien du parti d'extrême droite Alternative pour l'Allemagne (AfD).
Cette perspective suscite un vif débat à moins d'un mois du scrutin, et contribue à électriser un climat électoral déjà surchauffé.
- "Pas indifférent" -
Même si les motions n'ont pas de caractère contraignant, la constitution d'une majorité au Bundestag avec les voix d'un tel mouvement serait inédite depuis la fin de la seconde Guerre mondiale.
"Il n'est pas indifférent de collaborer avec l'extrême droite, pas en Allemagne", a averti le chancelier, alors que le Bundestag a commémoré le même jour les 80 ans de la libération du camp d'extermination d'Auschwitz.
"Une bonne décision ne devient pas fausse parce que les mauvaises personnes sont d'accord, elle reste importante", lui a répliqué M. Merz, appelant sociaux-démocrates et Verts du gouvernement à endosser ses propositions.
Ces deux partis les rejettent néanmoins car ils les jugent contraire au droit d'asile.
"Vous ne pouvez quand même pas violer le droit européen avec des amis de la Russie et des contempteurs de l'Europe !", a lancé le vice-chancelier écologiste Robert Habeck.
L'AfD, parti anti-migrants, préconise un arrêt des livraisons d'armes à l'Ukraine et prêche pour une sortie de l'Allemagne de l'UE et de l'euro.
- Série d'attaques meurtrières -
Les conservateurs affirment eux ne chercher aucune alliance à dessein avec ce parti.
Mais pour Friedrich Merz, il s'agit avant tout de tourner définitivement la page de la politique d'accueil en vigueur depuis dix ans dans le pays, qu'il juge laxiste.
Plus d'un million de Syriens et d'Afghans avaient trouvé refuge dans la première économie européenne en 2015/16 sous le gouvernement de l'ancienne chancelière conservatrice Angela Merkel, dont M. Merz ne cesse de critiquer le bilan en la matière.
Moins d'un mois avant le scrutin législatif anticipé, une récente agression au couteau à Aschaffenbourg (sud), imputée à un Afghan, a définitivement ancré l'immigration au cœur de la campagne, éclipsant les autres sujets.
Armé d'un couteau de cuisine, l'auteur présumé qui se trouvait en situation illégale et souffrait de troubles psychiatriques, s'en est pris il y a une semaine à un groupe d'enfants dans un parc, tuant un petit garçon de 2 ans et un passant de 41 ans qui s'était interposé.
L'agression fait suite à d'autres actes de violences impliquant des étrangers qui ont ébranlé l'Allemagne ces dernier mois, avec notamment une attaque à la voiture bélier sur le marché de Noël de Magdebourg qui a fait six morts en décembre, et une autre au couteau à Solingen l'été dernier, où trois personnes avaient péri.
Ce climat profite à l'AfD, créditée d'environ 20% des intentions de vote - deux fois plus que lors du scrutin de 2021. Le parti reste loin derrière les conservateurs avec environ 30% mais devant le SPD d'Olaf Scholz (15%) et des Verts (13%).
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