A i>Télé, les journalistes restent mobilisés mais le conflit pèse sur le moral
"J'ai l'impression que chaque jour est pire que le précédent"... Si les salariés d'i>Télé restent mobilisés, reconduisant leur grève jour après jour depuis près d'un mois, l'enlisement du conflit commence sérieusement à peser sur leur moral. Chaque matin, c'est le même rituel: réunis en assemblée générale, les salariés débattent de la poursuite du mouvement. Lors de ces AG, "l'ambiance est lourde, triste, déprimante", décrit une journaliste.
Jeudi, devant l'immeuble d'i>Télé, certains journalistes avaient les larmes aux yeux. Au cœur des crispations de ce long conflit : le directeur général et directeur de la rédaction Serge Nedjar, de l'avis de nombreux journalistes. "S'il était partant, ce serait une voie de sortie de crise express", estime même un reporter. "Sa double casquette pose problème, le personnage suscite un profond rejet. Il y a eu deux motions de censure contre lui, la façon dont il a géré la crise a aggravé la situation. Entre 40 et 50 personnes sont prêtes à partir s'il conserve ses fonctions. Ca pourrait être l'acte de décès de la chaîne", s'alarme-t-il.
"C'est un dialogue de sourds, l'ambiance est très tendue. C'est aussi très difficile au niveau financier mais on tient car nos revendications sont légitimes. C'est la direction qui nous empêche de travailler", s'emporte une pigiste, très remontée. Pour soutenir financièrement les salariés, une cagnotte de solidarité avec les grévistes a été lancée sur le net. Près de 1.000 personnes y ont contribué.
S'y ajoute la vente de t-shirts, sacs et badges "Je soutiens i>Télé" et une soirée mercredi, où plusieurs personnalités (François Bayrou, Cécile Duflot, Aurélie Filippetti...) sont venues témoigner leur soutien. "On est très touché du soutien qu'on reçoit. La cagnotte ne couvrira pas tous les jours de grève mais permettra d'en payer une petite partie", indique un jeune journaliste, qui estime avoir perdu 1.000 euros depuis le début de la grève.
A l'impression que les dirigeants ne les écoutent pas s'ajoutent des incertitudes sur leur avenir: "Avec tous les départs, on se demande dans quelles conditions on va reprendre le travail. Quand on reprendra, la rédaction sera amputée", s'émeut une rédactrice.
Alors que plusieurs journalistes ont officialisé leur départ ces dernières semaines (le rédacteur en chef Alexandre Ifi, le chef du service reportage Emmanuel Goubert...), ils sont encore nombreux à chercher ailleurs. "On regarde ailleurs mais le contexte n'est pas terrible. En même temps, en novembre, qu'est-ce qu'on va trouver? C'est trop tard. Pour les têtes d'affiche, d'accord, mais pour les autres?", s'interroge une jeune journaliste, dépitée d'avoir passé la nuit de l'élection américaine à distribuer des t-shirts de soutien au lieu de travailler.
"Je suis en manque de journalisme depuis plus de 3 semaines", confie un autre membre de la rédaction. "Ne pas couvrir les élections, c'était un déchirement. C'est comme l'avant et l'après débat de la primaire de droite qu'on nous a refusés. Ce sont des moments importants dont on ne voulait pas priver nos téléspectateurs". "C'est extrêmement difficile car j'ai été très isolée. Cette nuit, j'ai pleuré pour iTELE, pour cette situation complètement bloquée", confiait La correspondante historique de Canal+ aux États-Unis, Laurence Haïm, mercredi sur Europe 1.
"On n'est pas une rédaction de +Che Guevara+, on s'est mis en grève pour défendre notre indépendance éditoriale mais notre combat a dépassé la chaîne. C'est une lutte pour l'indépendance des médias", estime un journaliste.
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