Egalité des sexes : encore du boulot en matière de parentalité
Partage des tâches, écarts de salaire, représentations stéréotypées : dans une société encore largement inégalitaire entre les femmes et les hommes, une plus grande implication des pères à la maison pourrait déjà réduire bon nombre de disparités.
Michael Kaufman, chercheur spécialisé dans les études de genre depuis 40 ans, est affirmatif : "Si on veut une société plus égalitaire, il est essentiel que les jeunes générations voient que leurs pères font la vaisselle, la cuisine... Pour qu'on cesse dès le jeune âge de faire une distinction entre +un boulot de femme+ et +un boulot d'homme+".
"Prendre soin de ses enfants, en particulier des bébés qui ne parlent pas, développe notre capacité d'empathie, c'est-à-dire de ressentir ce que l'autre ressent. Et cette empathie est indispensable pour prévenir aussi des situations de violences", insiste auprès de l'AFP l'auteur du "Guide du féminisme pour les hommes et par les hommes", dont la traduction française vient de paraître aux Éditions Massot.
Pour cet Américain, seul membre masculin du Conseil consultatif à l'Égalité des genres, mis en place par le G7, le mouvement #Metoo a été "un catalyseur d'éveil des consciences, y compris masculines" et "des politiques volontaristes doivent suivre".
En France, plusieurs pétitions et tribunes ont réclamé ces derniers mois une révision du congé paternité - onze jours, week-end inclus -, jugé "trop court pour être efficace". Une demande féministe de longue date, portée par de plus en plus d'hommes.
Dans quelques semaines, un rapport proposant des pistes de réforme sera remis au gouvernement, qui pourrait décider d'un allongement.
- Paternité et carrière -
Pour Hugo Gaspard, 45 ans, il faudrait "au moins" le doubler. "Notre système actuel est peu incitatif car ce congé est mal rémunéré et trop court", plaide auprès de l'AFP ce père de trois enfants, qui a fondé il y a un an "Daron", un magazine de société dédié aux pères. "Pendant onze jours, on n'a pas le temps de prendre une part active dans l'arrivée du bébé, de trouver sa place et d'équilibrer les tâches".
Au-delà du congé paternité, c'est la vision "encore stéréotypée, notamment des chefs d'entreprise sur la paternité, la carrière" qu'il faut changer, poursuit-il. Et "faire comprendre aux hommes qu'ils peuvent s'impliquer dans la parentalité, sans que ce soit par défaut, que ça mette à mal la virilité ou l'efficacité professionnelle. Mais il reste du boulot".
Les chiffres ne le démentent pas : 70% des pères prennent un congé paternité, 4% un congé parental, mais 80% des employés à temps partiel sont des femmes, et 24% d'écart de salaire subsiste entre hommes et femmes.
Des disparités qui se répercutent dans le foyer, où les femmes consacrent en moyenne 1 heure et 35 minutes par jour aux enfants, contre 41 minutes seulement pour les hommes, un chiffre qui a néanmoins presque doublé depuis 1985 (22 minutes).
Récemment, la sociologue Ariane Pailhé a étudié les effets du congé paternité sur la répartition des tâches et ses résultats sont plutôt "positifs".
"On remarque un partage des tâches plus marqué et durable chez les couples où les pères ont pris un congé, que chez ceux où le père a prévu de le prendre", dit à l'AFP Mme Pailhé, directrice de recherches à l'Institut national des études démographiques (Ined).
Autre signe encourageant, "le temps en plus passé par les hommes à s'occuper des enfants n'est pas du temps en plus passé par les femmes à faire le ménage. C'est du temps bénéfique au couple", poursuit-elle.
Dans le monde, près des deux tiers des enfants de moins d'un an vivent dans un pays où aucun congé paternité rémunéré n'est instauré, selon l'Unicef.
"Il reste beaucoup de travail à accomplir", souligne l'organisme à l'occasion de la fête des pères, car "huit pays à travers le monde, dont les États-Unis, ne disposent d'aucune politique de congé maternité ou paternité".
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