Fillon : les avocats demandent à la justice l'abandon d'une "enquête illégale"
Les avocats du candidat de la droite à la présidentielle en France, François Fillon, ont demandé jeudi l'abandon de l'enquête judiciaire en cours pour des soupçons d'emplois fictifs visant son épouse, la jugeant "illégale".
Plongé depuis deux semaines dans une tourmente qui lui a fait perdre son statut de favori de la course à la présidentielle, M. Fillon avait déjà contre-attaqué lundi en défendant la "légalité" des emplois de son épouse Penelope et deux de leurs enfants comme assistants parlementaires.
Le candidat conservateur, qui porte un projet économique "radical" pour redresser la France, avait néanmoins présenté des "excuses" en reconnaissant que ces pratiques choquaient aujourd'hui l'opinion publique.
Jeudi, ses avocats ont soulevé des points de procédure remettant en cause la compétence du parquet national financier (PNF), qui a ouvert l'enquête pour détournement de fonds et abus de biens sociaux.
"Nous avons aujourd'hui demandé au parquet national financier de se dessaisir de l'enquête préliminaire en cours", a déclaré l'avocat de François Fillon, Me Antonin Lévy, lors d'un point de presse aux côtés de l'avocat de Penelope Fillon, Me Pierre Cornut-Gentille.
Le parquet national financier n'avait pas réagi jeudi soir à la demande des avocats.
Après des révélations de l'hebdomadaire Le Canard enchaîné, la justice a ouvert une enquête le 25 janvier pour jauger la réalité du travail effectué pendant quinze ans par Penelope Fillon en tant qu'assistante parlementaire de son mari et de son suppléant.
Au total, Penelope Fillon a touché un salaire cumulé de 680.380 euros nets pendant environ quinze ans, étalés entre 1988 et 2013, selon les chiffres publiés par le candidat. François Fillon a également employé deux de ses enfants, qui ont touché 84.000 euros brut entre 2005 et 2007. Les deux enfants ont été entendus jeudi par les enquêteurs.
Pour les avocats, "l'infraction de détournement de fonds publics ne peut être reprochée à François Fillon", car à leurs yeux ce délit n'est pas applicable à un parlementaire.
"L'absence de cette infraction rend le PNF incompétent pour enquêter et son enquête en devient illégale", a insisté Me Lévy.
Les avocats ont également déploré les fuites des investigations dans les médias et annoncé le dépôt d'une plainte pour violation du secret de l'enquête.
"L'enquête est quasiment aujourd'hui plus médiatique que judiciaire (...). Il est important que les électeurs ne se fassent pas voler leur élection en avril", a souligné l'avocat.
Selon les sondages, François Fillon serait désormais éliminé dès le premier tour du scrutin, le 23 avril, devancé par la candidate de l'extrême droite Marine Le Pen et le centriste Emmanuel Macron.
- "Scrutin encore gagnable" -
Lors d'une longue conférence de presse lundi, François Fillon a reconnu avoir commis une "erreur" en embauchant sa femme et ses enfants comme collaborateurs parlementaires, tout en répétant que ces faits étaient "légaux".
Il a repris cette semaine ses déplacements sur le terrain, avec parfois plusieurs dizaines de personnes hostiles l'alpaguant pour lui demander de "rendre l'argent".
Lors d'un meeting à Poitiers (ouest) jeudi soir, il en a appelé au "bon sens" des électeurs. "On voudrait dans les médias que je sois un +saint+, je ne suis, mes amis, qu’un homme, un homme qui n’a pas enfreint la loi", a-t-il lancé, dénonçant à nouveau une "attaque impitoyable".
L'image de François Fillon, empêtré dans cette affaire d'emplois présumés fictifs, se dégrade cependant nettement dans l'opinion.
Seules 22% des personnes interrogées (13 points de moins par rapport à un mois plus tôt) ont désormais une image positive du candidat selon un sondage publié jeudi. Chez les seuls sympathisants de la droite et du centre, François Fillon dégringole de 22 points (55%).
Les critiques qui avaient surgi dans son propre camp ces dernières semaines, au point d'évoquer tout haut l'hypothèse d'un retrait du candidat au profit d'un "plan B", se sont officiellement tues après sa conférence de presse lundi. Un ancien ministre s'est ainsi déclaré "épaté" par la contre-attaque du candidat, 62 ans.
Mais en coulisses, de nombreux élus confient leur "désarroi". "Il y a un mois, la présidentielle était imperdable pour la droite. Aujourd'hui, on se demande si on sera au second tour", se lamente l'un d'eux.
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